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Contes d'ici et d'ailleurs

Démarré par bunni, 18 Septembre 2012 à 00:22:36

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bellparole

Ce qui rend les amitiés indissolubles et double leur charme est un sentiment qui manque à l'amour : la certitude.

(Honoré de Balzac)

bellparole

Voilà Bunni, l'interprétation de l'histoire de la Gazelle et les chasseurs..



Ḥejaya't el ġzala w ṣiyadiin (conte)


LA GAZELLE ET LES CHASSEURS :

Un jour, la gazelle avait soif et s'en est allée boire à la fontaine...  lorsqu'elle a vu son reflet, elle n'était pas contente de la nature de ses pattes mais elle était fière de la longueur de ses cornes,
soudain, elle voit surgir des chasseurs, elle s'enfuit sur la piste mais les chasseurs n'arrivaient pas à l'atteindre,
à l'embouchure  de la forêt, ses cornes se sont emmélées dans les branches et la pauvre gazelle n'a pas pu se libérer,
les chasseurs l'ont rejointe et l'ont vu coincée dans les branchages et elle s'est dit "Ah pauvre de moi!, je n'aimais pas mes pattes qui m'ont sauvé et c'est mes belles cornes qui m'ont achevées...




Voilà Bunni la traduction de cette histoire, cela veut dire que dans la vie il faut s'accepter tel qu'on est....




Ce qui rend les amitiés indissolubles et double leur charme est un sentiment qui manque à l'amour : la certitude.

(Honoré de Balzac)

bunni

#107
Les souhaits ridicules


Si vous étiez moins raisonnable.
Je me garderais bien de venir vous conter
La folle et peu galante fable
Que je m'en vais vous débiter.
Une aune de boudin en fournit la matière.
"Une aune de boudin, ma chère !
Quelle pitié ! C'est une horreur !»
S'écriait une précieuse,
Qui, toujours tendre et sérieuse,
Ne veut ouïr parler que d'affaires de coeur.
Mais vous qui mieux qu'âme qui vive
Savez charmer en racontant,
Et dont l'expression est toujours si naïve,
Que l'on croit voir ce qu'on entend;
Qui savez que c'est la manière
Dont quelque chose est inventé,
Qui beaucoup plus que la matière
De tout récit fait la beauté.
Vous aimerez ma fable et sa moralité;
J'en ai, j'ose le dire, une assurance entière.

Il était une fois un pauvre bûcheron
Qui las de sa pénible vie,
Avait, disait-il, grande envie
De s'aller reposer aux bords de l'Achéron;
Représentant, dans sa douleur profonde,
Que depuis qu'il était au monde,
Le Ciel cruel n'avait jamais
Voulu remplir un seul de ses souhaits.

Un jour que, dans le bois, il se mit à se plaindre,
A lui, la foudre en main, Jupiter s'apparut.
On aurait peine à bien dépeindre
La peur que le bonhomme en eut :
"Je ne veux rien, dit-il, en se jetant par terre,
Point de souhaits, point de Tonnerre,
Seigneur, demeurons but à but.

-- Cesse d'avoir aucune crainte :
Je viens, dit Jupiter, touché de ta complainte,
Te faire voir le tort que tu me fais.
Ecoute donc : je te promets,
Moi qui du monde entier suis le souverain maître,
D'exaucer pleinement les trois premiers souhaits
Que tu voudras former sur quoi que ce puisse être.
Vois ce qui peut te rendre heureux.
Vois ce qui peut te satisfaire;
Et comme ton bonheur dépend tout de tes voeux,
Songes-y bien avant que de les faire."
A ces mots Jupiter dans les cieux remonta,
Et le gai bûcheron, embrassant sa falourde,
Pour retourner chez lui sur son dos la jeta.
Cette charge jamais ne lui parut moins lourde.
"Il ne faut pas, disait-il en trottant,
Dans tout ceci, rien faire à la légère;
Il faut, le cas est important,
En prendre avis de notre ménagère.
Çà dit-il, en entrant sous son toit de fougère,
Faisons, Fanchon, grand feu, grande chère,
Nous sommes riches à jamais,
Et nous n'avons qu'à faire des souhaits."
Là-dessus tout au long le fait il lui raconte.
A ce récit, l'épouse vive et prompte
Forma dans son esprit mille vastes projets;
Mais considérant l'importance
De s'y conduire avec prudence :
"Blaise, mon cher ami, dit-elle à son époux,
Ne gâtons rien par notre impatience;
Examinons bien entre nous
Ce qu'il faut faire en pareille occurrence;
Remettons à demain notre premier souhait
Et consultons notre chevet.

-- Je l'entends bien ainsi, dit le bonhomme Blaise.
Mais va tirer du vin derrière ces fagots."
A son retour il but, et goûtant à son aise
Près d'un grand feu la douceur du repos,
Il dit, en s'appuyant sur le dos de sa chaise :
"Pendant que nous avons une si bonne braise,
Qu'une aune de boudin viendrait bien à propos !"
A peine acheva-t-il de prononcer ces mots,
Que sa femme aperçut, grandement étonnée,
Un boudin fort long, qui partant
D'un des coins de la cheminée,
S'approchait d'elle en serpentant.
Elle fit un cri dans l'instant;
Mais jugeant que cette aventure
Avait pour cause le souhait
Que par bêtise toute pure
Son homme imprudent avait fait,
Il n'est point de pouille et d'injure
Que de dépit et de courroux
Elle ne dit au pauvre époux.
"Quand on peut, disait-elle, obtenir un empire,
De l'or, des perles, des rubis,
Des diamants, de beaux habits,
Est-ce alors du boudin qu'il faut que l'on désire ?
-- Hé bien, j'ai tort, dit-il, j'ai mal placé mon choix,
J'ai commis une faute énorme,
Je ferai mieux une autre fois.
-- Bon, bon, dit-elle, attendez-moi sous l'orme,
Pour faire un tel souhait, il faut être bien boeuf !"
L'époux plus d'une fois, emporté de colère,
Pensa faire tout bas le souhait d'être veuf,
Et peut-être, entre nous, ne pouvait-il mieux faire :
"Les hommes, disait-il, pour souffrir sont bien nés !
Peste soit du boudin et du boudin encore;
Plût à Dieu, maudite pécore,
Qu'il te pendît au bout du nez !"
La prière aussitôt du Ciel fut écoutée,
Et dès que le mari la parole lâcha,
Au nez de l'épouse irritée
L'aune de boudin s'attacha.
Ce prodige imprévu grandement le fâcha.
Fanchon était jolie, elle avait bonne grâce,
Et pour dire sans fard la vérité du fait,
Cet ornement en cette place
Ne faisait pas un bon effet;
Si ce n'est qu'en pendant sur le bas du visage,
Il l'empêchait de parler aisément.
Pour un époux merveilleux avantage,
Et si grand qu'il pensa dans cet heureux moment
Ne souhaiter rien davantage.
"Je pourrais bien, disait-il à part soi,
Après un malheur si funeste,
Avec le souhait qui me reste,
Tout d'un plein saut me faire roi.
Rien n'égale, il est vrai, la grandeur souveraine;
Mais encore faut-il songer
Comment serait faite la reine,
Et dans quelle douleur ce serait la plonger
De l'aller placer sur un trône
Avec un nez plus long qu'une aune.
Il faut l'écouter sur cela,
Et qu'elle-même elle soit la maîtresse
De devenir une grande Princesse
En conservant l'horrible nez qu'elle a,
Ou de demeurer Bûcheronne
Avec un nez comme une autre personne,
Et tel qu'elle l'avait avant ce malheur-là."

La chose bien examinée,
Quoiqu'elle sût d'un sceptre et la force et l'effet,
Et que, quand on est couronnée,
On a toujours le nez bien fait;
Comme au désir de plaire il n'est rien qui ne cède,
Elle aima mieux garder son bavolet
Que d'être reine et d'être laide.

Ainsi le bûcheron ne changea point d'état,
Ne devint point grand potentat,
D'écus ne remplit point sa bourse :
Trop heureux d'employer le souhait qui restait,
Faible bonheur, pauvre ressource,
A remettre sa femme en l'état qu'elle était.

Bien est donc vrai qu'aux hommes misérables,
Aveugles, imprudents, inquiets, variables,
Pas n'appartient de faire des souhaits,
Et que peu d'entre eux sont capables
De bien user des dons que le Ciel leur a faits.

bunni

La princesse des bambous

                       


Il était une fois un grand-père et une grand-mère. Tous les jours le grand-père allait couper des bambous et fabriquait toutes sortes d'objets avec; il gagnait ainsi sa vie. Un jour, travaillant dans un fourré de bambous, il en trouva un étrange, dont le tronc brillait, comme éclairé de l'intérieur. Le grand-père était bien étonné, et se demandait pourquoi cet arbre brillait ainsi; lorsqu'il coupa le tronc, il fut encore plus surpris : une jolie petite fille, minuscule, était assise dans le tronc, et c'était d'elle que venait cette lueur étrange. Le vieil homme posa la petite fille sur sa main, et rentra bien vite à la maison.

"Grand-mère, regarde! Je l'ai trouvée dans un bambou!" dit-il à sa femme, en lui montrant la charmante petite fille.

Grand-mère pensa que les dieux leur envoyaient cette enfant; ils l'appelèrent "la princesse des bambous", et la chérirent et l'élevèrent comme leur propre fille.

La petite princesse grandit très vite et devint une ravissante jeune fille. Quand Grand-père ou Grand-mère étaient fatigués ou bien tristes, il leur suffisait de la regarder, et ils se sentaient mieux. Après avoir trouvé la petite fille dans un bambou, quand Grand-père allait couper des arbres, il trouvait très souvent de l'or dans le tronc, aussi devint-il riche et pût-il construire une belle et grande maison. Tous trois vivaient très heureux ensemble; la princesse des bambous ne sortait jamais de la maison, mais sa beauté était réputée dans tout le Japon.

Beaucoup de jeunes gens qui en avaient entendu parler vinrent de tout le pays pour voir la princesse, mais Grand-père ne les laissait pas rencontrer son enfant bien-aimée. Un grand nombre d'entre eux étaient fort déçus de ne pas pouvoir voir cette beauté, et rentraient chez eux au bout de quelques jours. Quelques-uns seulement désiraient ardemment rencontrer la jeune fille et l'épouser; ils étaient cinq, à venir tous les jours devant la maison du vieil homme, faisant fi des intempéries.

Un jour, la princesse des bambous dit à Grand-père :

"Je vais demander à chacun de ces cinq jeunes gens de me rapporter l'objet que je désire; j'épouserai celui qui réalisera mon souhait."

Mais le jeune fille n'avait aucune envie d'épouser qui que ce soit, aussi demanda-t-elle des objets extrêmement difficiles à trouver. Au premier des jeunes gens elle demanda la coupe en pierre du bouddha, qui se trouve en Inde; au deuxième, l'arbre dont le tronc est en or et les fruits des perles; au suivant, la peau de la souris du soleil, dont on dit qu'elle se trouve en Chine; au quatrième, le joyau aux cinq couleurs que le dragon porte autour du cou; et au dernier, le cauris, un coquillage qu'on trouve parfois dans le nid des hirondelles, et qui porte bonheur aux femmes enceintes. La princesse des bambous demandait des choses dont on ne sait même si elles existent réellement, et les jeunes gens en furent très surpris et un peu découragés.

Les jeunes gens partirent donc à la recherche des objets demandés pas la princesse des bambous, et ne vinrent pas chez le vieil homme pendant quelques temps. Un jour, le premier d'entre eux revint et apporta la coupe de pierre du bouddha qui lui avait été demandée. Mais il n'était pas allé la chercher en Inde, il avait en fait ramené une vieille coupe qui se trouvait dans un temple près de Kyoto. Quand la princesse vit la coupe, elle comprit immédiatement que ce n'était pas la coupe de bouddha, car même si celle-ci est très ancienne et faite en pierre, elle brille comme aucune autre.

Le deuxième jeune homme, quant à lui, ne savait pas où trouver l'arbre au tronc d'or et aux fruits de perles. Comme il était très riche, il demanda à des artisans d'en fabriquer un. Il l'apporta alors à la princesse; l'arbre était vraiment magnifique, à tel point que la jeune femme crut que c'était réellement l'arbre qu'elle avait demandé. Elle était au désespoir, se disant qu'elle allait devoir épouser ce jeune homme, lorsque les artisans vinrent réclamer leur dû; elle comprit alors qu'elle avait été trompée et que cet arbre était un faux.

Le suivant, qui devait ramener la peau de la souris du soleil, donna une paya grassement des marchands qui se rendaient en Chine pour qu'ils lui ramènent cette fourrure. A leur retour, ils lui donnèrent une magnifique fourrure, l'assurant que c´était celle de la souris du soleil. Il se rendit alors chez la princesse, qui lui dit :

"C'est une très jolie fourrure; Mais on dit de la peau de la souris du soleil qu'elle ne brûle pas, même si on la jette au feu. Voyons cela.", et la princesse présenta la fourrure aux flammes. Celle-ci s'enflamma immédiatement et se consuma. Le jeune homme, couvert de honte, s'en alla précipitamment.

Le quatrième d'entre eux était très courageux, et décida de trouver lui-même le dragon qui porte un joyau de cinq couleurs au cou. Il partit donc en mer et navigua très longtemps, sillonnant les mers au hasard, étant donné que personne en sait où se trouve le dragon, ni même s'il existe. Mais durant son périple, il fut pris dans une tempête effroyable, et manqua de mourir. Il renonça à continuer ses recherches et rentra chez lui, mais il était encore gravement malade et ne pût rencontrer de nouveau la princesse des bambous.

Le cinquième et dernier des jeunes gens, auquel la princesse avait demandé le cauris, un coquillage porte-bonheur qu'on trouve parfois dans le nid des hirondelles, entreprit de fouiller les nids d'hirondelles. Un jour, il crut avoir trouvé le coquillage, et le serrant fermement dans sa main, il descendit précipitamment de l'échelle sur laquelle il se trouvait, tomba et se blessa gravement. De plus, ce qu'il tenait si précieusement à la main n'était pas du tout le fameux coquillage, mais une crotte d'hirondelle, toute dure et racornie. Voilà comment lui aussi échoua et personne ne pût ramener à la princesse les objets demandés.

La réputation de grande beauté de la princesse des bambous arriva jusqu'aux oreilles de l'empereur, qui désira la rencontrer. Un jour, il se rendit chez le vieil homme, et rencontra la princesse des bambous. Il en tomba immédiatement amoureux, et voulut l'emmener dans son palais. Mais la princesse refusa, lui disant :

"Je ne suis pas née sur cette planète, je ne peux pas aller avec vous."

Néanmoins, l'empereur ne pouvait oublier la ravissante jeune femme.

Un été, la princesse des bambous, regardant la lune, se mit à pleurer. Grand-père lui demanda ce qu'elle avait, mais elle ne lui répondit pas, restant silencieuse. La jeune femme était plus triste de jour en jour, et elle pleurait tous les soirs en regardant la lune. Grand-père et Grand-mère se faisaient bien du souci, mais la princesse gardait le silence et ils ne pouvaient en rien l'aider. A la mi-août, la veille de la pleine lune, la princesse des bambous parla enfin :

"Je ne suis pas née sur cette planète, je viens de la lune. Il avait été décidé que je vivrais quelques années sur la terre, mais aujourd'hui l'heure du retour approche. Demain, à la pleine lune, mes compagnons viendront me chercher et je devrai rentrer. J'ai été très heureuse avec vous, je vous remercie du fond du coeur."

Grand-père et Grand-mère étaient abasourdis, et très tristes. Ils ne voulaient pas quitter leur princesse bien-aimée, mais celle-ci leur dit :

"Je n'ai pas le droit de rester avec vous. Il faut que je retourne d'où je viens. J'en suis très triste aussi, mais je n'ai pas le droit de rester ici."

Grand-père décida alors d'aller demander de l'aide à l'empereur, pour empêcher que la jeune femme ne parte. Il raconta toute l'histoire de la princesse des bambous à l'empereur et celui-ci envoya deux mille soldats à la maison du vieil homme.

La nuit de la pleine lune de la mi-août, la maison du vieil homme était cernée par les soldats de l'empereur. La moitié d'entre eux étaient postés sur le toit, et les autres se massaient autour de la maison, tentant de protéger la princesse des bambous. A l'intérieur, Grand-père et Grand-mère entouraient leur enfant bien-aimée, attendant l'escorte venant de la lune. Dehors, les soldats tenant bien en main leurs arcs et leurs flèches observaient la lune. A l'instant où la lune fut vraiment pleine, toute ronde, l'escorte des gens de la lune descendit du ciel. Les nymphes de la lune brillaient d'une lumière irréelle, qui aveuglait les soldats, les empêchant de tirer.

Le plus étrange était que les soldats avaient également perdu toute volonté de combattre, ils ne pouvaient rien faire. Les soldats, Grand-père et Grand-mère, impuissants, regardèrent la princesse des bambous s'avancer vers l'escorte venue de la lune.

"Je suis très triste de vous quitter, mais je n'ai pas le droit de rester avec vous, je dois retourner d'où je viens. Je vous en prie, pensez à moi de temps à autre." Elle s'adressa ainsi une dernière fois à Grand-père et Grand-mère, puis écrivit une lettre à l'empereur. Les nymphes venues de la lune la revêtirent alors d'un manteau, une superbe étoffe de la lune, et la princesse des bambous oublia sa vie sur terre et repartit avec ses compagnons.

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Légende du perce neige : le cheval enchanté.



Le cheval enchanté

"Par une nuit d'orage, une vieille femme vint au château d'un prince demander abri. Le prince la vit et lui demanda de partir. Si elle voulait travailler elle pourrait avoir un abri... La vieille femme se changea alors en princesse-fée et lui dit "Vous n'avez pas de pitié ni de cœur. Vous serez transformé en cheval. Le sortilège sera rompu seulement si une jeune fille sincère vous fait un cadeau." Les années passèrent, le prince était malheureux et était désolé de ce qu'il avait fait. Toutes ces années de nombreuses princesses vinrent lui faire des cadeaux en vain. Un jour une jeune bergère nommée Giralda, qui aimait le prince, cueillit un perce-neige et l'emballa dans un papier blanc. Au dos elle écrivit avec des lettres blanches et rouges 'Martisor'. Quant elle vint vers le prince il se demanda s'il avait jamais vu si clairs et honnêtes yeux. Elle lui dit que son cadeau était un symbole de son amour. Elle lui donna le Martisor. Quand le prince toucha le cadeau il redevint humain. Ils se marièrent et vécurent ensuite toujours heureux.
Le prince décida que le 1er mars de chaque année, en souvenir, les hommes offriraient un martisor aux femmes qui leur sont proches, en signe de gratitude et d'amour."

Le perce-neige est étroitement lié à Martisor, la fête du printemps qui se célèbre le 1er mars en Roumanie, Moldavie et Bulgarie (Marteniza). Martisor [Mar-tsi-chor] dérive de martie, mars. Cette fête évoque également notre Saint-Valentin: Les hommes offrent aux femmes des martisors, porte-bonheur en forme de broche ou de pendentif comprenant notamment deux fils torsadés, rouge et blanc. Martisor verrait ses origines remonter à de plus de 2000 ans. D'innombrables légendes et traditions s'y rattachent.

bunni



La princesse et la licorne

Il était une fois, il y a très longtemps, dans un lointain pays, un roi ténébreux qui vivait dans un château sombre et silencieux.
Ce roi avait vécu tant de souffrances qu'il s'était réfugié dans cette forteresse pleine de fantômes d'où personne ne pouvait le déloger..
Il avait une fille.Elle grandissait dans cet environnement austère, sans contacts extérieurs,élevée par sa maman, une reine douce et timide.La princesse avait appris à raser les murs quand les colères du roi, en proie aux démons que lui seul voyait, faisaient trembler jusqu'aux fondations du château.Elle parlait peu, souriait toujours, pour ne pas briser le silence pesant qu'exigeait la maladie du roi.
Mais elle écoutait beaucoup, de tous ses sens. Le jour de ses seize ans, elle pris son courage à deux mains, et demanda la permission de sortir du château.La reine se figea sur son ouvrage; le roi fit mine de n'avoir rien entendu. « Papa, je voudrais sortir du château, s'il te plait ».
« Va, ma fille, si c'est ce que tu veux,mais dehors tu n'auras que des ennemis».La reine tourna la tête pour cacher ses larmes. La princesse tremblante mais déterminée, pris pour la première fois la direction du pont levis.
Le coeur gros, elle commença son voyage.Elle s'engagea sur la seule route qu'elle avait pu apercevoir d'une des meurtrières du château.Elle traversa des lieues de désert gris en évitant les rencontres.Un jour, elle décida de changer de direction ;son intuition lui susurrait qu'il devait y avoir autre chose, ailleurs.
Rapidement, le paysage changea curieusement.L'herbe et la végétation se permirent des audaces de formes et de couleurs,les oiseaux s'échangeaient gaiement leurs plus belles trilles, l'eau claire des ruisseaux sautait de rochers en rochers.Son cœur battait fort.Malgré la beauté des lieux elle se sentait anxieuse, elle n'avait peut-être pas le droit d'être là ? Alors, au détour d'un sentier étroit, alors qu'elle allait rebrousser chemin, elle s'arrêta net. Une créature magnifique se tenait devant elle, grande,blanche, irréelle, comme elle n'en avait vue que dans ses livres : une licorne...Avec un regard infiniment doux, l'animal s'avança vers la jeune fille.
« Bonjour, lui dit la licorne
- Bonjour. Comme vous êtes belle !
- Toi aussi .Qu'est ce qui t'amène par ici ?
- Je ne sais pas au juste, je suis désolée.J'avance depuis de longs jours sans savoir ce que je cherche.
- Je vois.Tu n'as pas à être désolée.Puis je t'accompagner ? Je pourrais te présenter mes amis ?»
Elles cheminèrent ensemble, le jeune fille aux pas mal assurés racontant son enfance, la licorne légère posant ses sabots à ses côtés.En chemin, elles rencontrèrent l'escargot, qui raconta le plaisir de sa vie lente et sa façon de profiter de la moindre goutte d'eau de pluie pour savourer le bonheur d'être en vie. Puis le papillon éblouissant qui savait ce qu'était une métamorphose; un majestueux cygne blanc lui conta une drôle d'histoire de vilain petit canard; une grenouille,qui avait longtemps vécu dans un puits,lui narra les difficultés de croire aux étangs, aux lacs, à la mer...
La princesse eut très souvent peur de ces créatures inconnues, douta parfois de ces histoires extraordinaires.Elle avait entendu tant de mises en garde pendant son enfance. Alors quand elle était trop fatiguée , la licorne la prenait sur son dos .Au bout de quelques jours, le jeune fille lui fit suffisamment confiance pour s'y endormir et se laisser guider. Finalement, il faisait bon dans cet étrange pays.Elle traversa de nouveaux paysages, fit d'autres rencontres, toutes plus étonnantes les unes que les autres. Elle fut souvent maladroite, ses erreurs lui donnèrent parfois envie de se cacher comme le bernard l'hermite. Mais la licorne était là, qui acceuillait ses faux pas d'une grande sollicitude, lui expliquait ce monde sans la brusquer. Elle lui apprit aussi à se défendre ou à dire non,car c'était parfois nécessaire. En échange, la princesse grimpait dans les arbres pour cueillir des fruits ou les fleurs qui agrémentaient les repas de la licorne. Celle ci semblait toujours savoir quand la princesse avait besoin d'assistance. Petit à petit la princesse pris confiance en elle en intégrant les conseils de sa nouvelle amie. L'aide de l'animal se fit plus discrète.
Elle compris aussi qu'elle ne pourrait redonner de couleurs aux joues de ses parents si ceux ci s'entêtaient à rester cloitrés.Elle chargeait des colombes de leur envoyer des herbiers, des dessins d'oiseaux...
Alors sa vie devint gaie, colorée, riche d'expériences et d'êtres très différents, passionnants.
Et ce ne fut là que le début, d'une très, très longue et très belle histoire.....

bunni



L'arbre qui chantait

Il y a très, très longtemps, un vieux sorcier entreprit un long voyage.
Un jour qu'il avait tant et tant marché qu'il ne sentait plus ses pieds, il décida de chercher un endroit pour se reposer.
C'est alors qu'il entendit soudain chanter. Ce n'était pas un chant comme celui des oiseaux, ni comme celui du vent à travers les feuilles, mais une voix claire, qui prononçait des mots qu'il ne comprenait point.
Poursuivant son chemin, il arriva dans une clairière. Juste au centre, se dressait un arbre majestueux, dont les feuilles brillaient au soleil. On eût dit qu'il était en or!
Alors, le sorcier entendit à nouveau le chant, mais, cette fois, plus fort que précédemment. Regardant tout autour de lui, il ne vit personne. Il n'y avait là que les branches dorées de l'arbre, plus quelques souris grises qui couraient dans l'herbe.
Le sorcier s'assit contre l'arbre pour souffler un peu. Il songea qu'il serait sage de piquer un petit somme avant de continuer sa route.
Mais le chant le tenait éveillé! Enervé, il regarda encore autour de lui, sans rien remarquer d'anormal.
"Il faut que je trouve ce chanteur! ", se dit-il. "J'aimerais bien qu'il se taise, pour que je puisse me reposer. "
Le vieux sorcier se leva et observa les alentours à travers le feuillage de l'arbre. Ce faisant, il posa ses mains sur le tronc et sentit l'écorce vibrer. Il comprit alors que le chant provenait de l'arbre lui-même!
-"Tiens ! Cela fait bien longtemps que je n'avais plus, entendu un arbre chanter!", grommela-t-il. "Mais, par chance, je connais encore le moyen de le faire cesser! "
Il sortit de la poche de son manteau long morceau de corde et le lança en l'air tout en marmonnant une formule. La corde se tortilla quelque peu, puis s'enroula deux fois autour du tronc. Le sorcier prononça ensuite d'autres mots magiques, puis il termina en faisant un gros nœud dans la corde. Aussitôt, le l'arbre d'or cessa de chanter.
-"Je vais enfin pouvoir me reposer", soupira le sorcier avant de s'allonger dans l'herbe.
Mais il découvrit alors des rubans de fumée, qui se dégageaient des racines de l'arbre. Peu à peu, la fumée s'épaissit, jusqu'à former un gros nuage gris, qui changea progressivement de couleur. Il devint d'abord gris foncé, et puis noir.
Tout à coup... il se mit à tournoyer sur lui-même et se transforma en un hideux génie aux longues oreilles, avec un gros nez bourgeonnant de verrues, des bras démesurés et des mains larges des pelles!
-"Hahaha! Hihihi! ", ricana le génie. "Quel stupide sorcier tu es! Il y a des années, un de tes confrères m'a enfermé dans cet arbre. Mais maintenant que tu lui as cloué le bec, je suis libre! Et j'ai fort envie de te dévorer! "
Ce disant, le génie saisit le vieux sorcier par la barbe.
Heureusement, ce dernier savait que les esprits des bois sont toujours idiots! Et celui-là semblait encore plus bête que les autres...
-"Vas-tu me faire mijoter ou rôtir?", demanda-t-il au génie. "Tu sais que les vieux sorciers ne se mangent pas crus. Tu aurais des crampes d'estomac! "
L'affreux génie réfléchit quelques instants.
"Je vais faire un grand feu et t'attacher à une branche. Ensuite, je te ferai rôtir au-dessus des flammes", déclara-t-il, tout content.
-"Mais je vais m'enfuir pendant que tu allumeras le feu", insinua le sorcier.
-"C'est vrai ... ", admit le génie. "Je vais... euh ... je vais ... "
-"Pourquoi ne me ligotes-tu pas? ", suggéra le sorcier. "Ainsi, je serai incapable de fuir. "
-"Très bonne idée! ", s'exclama le génie. "Mais à quoi donc vais-je t'attacher? "
-"A cet arbre, bien sûr! ", répondit le sorcier. "Utilise donc la corde que j'avais enroulée autour du tronc pour le faire taire! "
Convaincu, l'esprit des bois alla détacher la corde.
Il commença par défaire le nœud... tout comme le sorcier l'avait espéré. En effet, dès que la corde eut été dénouée, l'enchantement se trouva rompu!
L'arbre se remit à chanter et le génie, de violet qu'il était, vira au mauve foncé. Puis, très lentement, il se transforma en fumée noire, puis en fumée grise, pour disparaître enfin en minces rubans de vapeur blanche.
Le sorcier remit alors la corde dans la poche de son large manteau. Avant de se remettre en route, il prononça quelques mots magiques et ni bête ni homme -pas même un sorcier - ne revit jamais le génie des bois.





bunni



Le retour des fleurs

Conte australien


Comme il ne pouvait plus supporter les hommes et leur méchanceté, le plus puissant de tous les sorciers avait décidé de quitter son pays et de se réfugier tout au sommet de la plus haute des hautes montagnes. Aussitôt dit, aussitôt fait... Il s'en alla.

Un grand malheur s'abattit sur la nature ; toutes les fleurs, celles des bois, celles des prairies, celles des collines, celles des bords de mer, celles du long des rivières et celles de lacs moururent instantanément. Il n'y en eu pas une seule qui survécut. Le pays, jadis si beau et si fleuri devint rapidement un désert. Tous les animaux, les oiseaux, les papillons, les insectes s'enfuirent après la mort des fleurs. Pour voir les fleurs, les habitants ne pouvaient user que de leur imagination. Mais les enfants, qui n'avaient jamais connu ces merveilles, ne voulaient pas croire les anciens.

- Vous ne racontez que des histoires, leur disaient-ils et ils s'en allaient tristes dans le décor triste d'un pays sans fleurs.
Parmi tous ces enfants, il en était un qui ne pouvait imaginer que tout eut disparu pour toujours. Lorsque sa mère, lassée de raconter l'ancien temps, se taisait, il réclamait encore et encore d'autres histoires car il aimait entendre parler de la beauté des fleurs.
Il pensait que lorsqu'il serait un homme, il partirait à la recherche du grand sorcier et lui demanderait de redonner de la couleur au pays. 

Les années passèrent.   

Un jour, il fut grand. Son amour des fleurs avait grandi avec lui. Il s'en alla donc trouver sa mère et lui dit :
- Mère, je vais m'en aller à la recherche du grand sorcier et lui demander de nous rendre les fleurs.
Sa mère le regarda avec des yeux remplis d'effroi.
- Mais fils ! s'écria-t-elle, tout ce que je t'ai raconté n'était que des histoires. Il ne faut jamais croire aux histoires. Je te disais ce que ma mère me racontait parce qu'elle l'avait entendu raconter par sa mère qui le tenait de sa mère. Malheur à toi ! Les fleurs n'ont probablement jamais existé. Tu aurais beau marcher mille ans, jamais tu ne trouverais le sorcier qui vit tout en haut de la plus haute montagne.
Mais le fils ne l'écouta même pas, il prit son baluchon et s'en alla. Les gens du pays qui le voyaient passer se moquaient de lui :
- Ce garçon est fou ! disaient-ils. Il n'y a que les fous qui croient aux histoires.

Le jeune homme se dirigea vers le nord. Il marcha longtemps, longtemps, longtemps et arriva au pied d'une montagne, si haute, si haute que son sommet était invisible.
Il tourna autour de la montagne, mais ne vit aucun sentier, seulement de la roche et des cailloux. Il tourna encore et encore. Las de tourner, il se dit :
- « Il faudra bien que je découvre un chemin. Le sorcier a dû le prendre pour atteindre le sommet. »
Il inspecta avec attention les rochers et finit par découvrir une petite marche. En regardant de plus près, il aperçut une autre petite marche et puis encore une autre. Lorsqu'il leva les yeux vers le sommet de la montagne, il aperçut un escalier et il se mit à grimper sans jamais regarder en bas pour ne pas avoir le vertige

A la fin du premier jour, il s'arrêta sur une terrasse. Le sommet de la montagne n'était pas visible. Il en fit de même le deuxième, puis le troisième, puis le quatrième puis le cinquième puis le sixième jour.  Il commençait à se décourager quand, au soir du septième jour, il aperçut enfin le sommet. A force de courage et malgré la fatigue accumulée depuis 7 jours, il parvient à l'atteindre juste au moment où le soleil avait complètement disparu et que la nuit avait recouvert le monstre de pierre. Arrivé tout en haut, il aperçut une source. Il se pencha pour y boire un peu d'eau. Au premier contact de l'eau sur ses lèvres, toute sa fatigue s'évapora. Il se sentit fort et heureux comme jamais dans sa vie. Tout à coup, derrière lui, il entendit une voix qui lui demanda ce qu'il était venu chercher sur la plus haute des hautes montagnes.
- Je suis venu, dit-il, pour rencontrer le grand sorcier et lui demander de nous rendre des fleurs et des insectes. Un pays sans fleurs, sans oiseaux et sans abeilles, est triste à mourir. Seule le beauté peut rendre les gens bons et je suis certain que les gens de mon pays cesseraient d'être méchants, si le sorcier leur redonnait les fleurs.

Alors, le jeune homme se sentit soulevé par des mains invisibles. Il fut transporté délicatement vers le pays des fleurs éternelles. Les mains invisibles le déposèrent sur le sol au milieu d'un tapis de fleurs multicolores. Le jeune homme ne pouvait en croire ses yeux. Il y en avait tant et jamais il n'avait imaginé que les fleurs puissent être aussi belles ! Dans l'air, un délicieux parfum flottait et les rayons du soleil dansaient sur le sol multicolore comme des milliers et des milliers d'arcs-­en-ciel. La joie du jeune homme fut si grande, qu'il se mit à pleurer.

La voix lui dit de cueillir les fleurs qu'il préférait. Il s'exécuta et en cueillit de toutes les couleurs. Quand il en eut plein les chargés, les mains invisibles le reconduisirent doucement au sommet de la montagne.
Alors, la voix lui dit :
- Rapporte ces fleurs dans ton pays. Désor­mais, grâce à ta foi et à ton courage, ton pays ne sera plus jamais sans fleurs. Il y en aura pour toutes les régions. Les vents du nord, de l'est, du sud et de l'ouest leur apporteront la pluie qui sera leur nourriture, et les abeilles vous donneront le miel qu'elles cherchent dans les fleurs.

Le jeune homme remercia et commença aussitôt la descente de la montagne qui, malgré la quantité de fleurs qu'il portait, lui parut bien plus facile que la montée.

Quand il revint dans son pays, les habitants, en apercevant les fleurs et en respirant leur parfum, ne voulurent pas croire à leur bonheur. Puis, quand ils surent qu'ils ne rêvaient pas, ils dirent :
- Ah ! nous savions bien que les fleurs existaient et que ce n'étaient pas des histoires inventées par nos ancêtres.

Et leur pays redevint un grand jardin. Sur les col­lines, dans les vallées, près des rivières, des lacs et de la mer, dans les bois, dans les champs et dans toutes les prairies, les fleurs crûrent et se multiplièrent. Tantôt c'était le vent du nord qui amenait la pluie, tantôt le vent du sud, de l'est ou de l'ouest. Les oiseaux revinrent, ainsi que les papillons et tous les insectes, et surtout les abeilles. Désormais, les gens purent man­ger du miel, et la joie revint sur la terre.

Quand les hommes virent leur terre transformée grâce au jeune homme qui avait osé ce que personne n'avait cru possible, ils lui demandèrent d'être leur roi. II accepta et il devint un roi bon, courageux et intelligent.
-Rappelons-nous, disait-il, que c'était la méchan­ceté des hommes qui avait entraîné la disparition des fleurs de notre pays.

Et, comme personne ne voulait recommencer à habiter un désert et à être privé de miel, chacun s'efforça désormais d'être aussi bon que possible pour ne pas fâcher le grand sorcier. 

bellparole



La rose bleue


Une jeune princesse possédait toutes les qualités que l'on pût désirer. Ses yeux d'un bleu profond illuminaient un visage ravissant, et tout le monde admirait la façon qu'elle avait de raconter des histoires.


Sa mère était morte à sa naissance, et son père l'adorait et ne lui refusait rien.
La princesse cependant avait un défaut : se considérant comme une personne parfaite, elle exigeait que tout autour d'elle le fût également. Elle n'hésitait pas à jeter un gâteau si les fraises qui l'ornaient n'étaient pas toutes exactement de la même taille et de la même couleur ! Évidemment, aucun prétendant ne trouvait grâce à ses yeux. Son père insistait pour qu'elle se mariât, mais elle refusait tous les jeunes gens qu'il lui présentait. Un jour qu'il la suppliait de nouveau, elle lui promit qu'elle épouserait celui qui lui apporterait une rose bleue.


Le père ne se réjouit pas de cette décision, car il savait bien que les roses bleues n'existent pas. Les roses sont blanches, rouges, roses ou jaunes, mais jamais bleues !


Cédant à l'exigence de sa fille, il fit annoncer dans tout le pays que le premier qui apporterait à la princesse une rose bleue, de la couleur de ses yeux, l'épouserait le jour même. Nombreux furent ceux qui partirent à la recherche de cette rose dans l'espoir de devenir le gendre de l'empereur ! Beaucoup abandonnèrent leur recherche.


Seuls trois prétendants continuèrent leur quête. L'un d'eux était un riche marchand. Il alla voir un fleuriste et lui demanda de lui trouver une rose bleue, sinon il le tuerait. Le fleuriste désespéré utilisa un subterfuge pour sauver sa vie. Il trempa une rose blanche dans un liquide bleu, et la rose se teinta de la couleur désirée ! Quand le marchand revint voir le fleuriste, il le remercia et lui donna beaucoup d'argent. Il se précipita alors au palais pour montrer la rose bleue à la princesse et l'épouser. Le roi se réjouit à la vue de la fleur et dit à sa fille : « Tu dois tenir ta promesse ! Tu as la rose bleue que tu souhaitais, nous allons préparer le mariage. » Sa fille cependant avait deviné la ruse et répondit à son père : « Comment avez-vous pu vous laisser aussi facilement tromper ?

« Cette rose n'est bleue que parce qu'elle a été teintée ! Ce n'est pas sa couleur d'origine. » Elle demanda qu'on apporte un oiseau. Lorsque celui-ci se posa sur la rose, il mourut instantanément, tué par le poison qui avait servi à colorer la fleur.

Le deuxième prétendant était un militaire qui se rendit dans la région des cinq fleuves, célèbre pour ses diamants. Il examina de nombreuses pierres précieuses et finit par trouver un très gros saphir bleu. Il l'acheta et le porta à un joaillier pour le faire tailler en forme de rose. Quand l'empereur vit le bijou, il le trouva magnifique et fut persuadé que sa fille accepterait de se marier avec ce militaire.

Son père alla la chercher et lui dit : « Tu dois tenir ta promesse ! Tu as la rose bleue que tu souhaitais, nous allons préparer le mariage. » Quand elle vit la rose, la jeune femme s'écria : « Mais ce n'est pas une fleur ! Mon père, vous voyez bien que ce n'est qu'un saphir taillé en forme de fleur ! J'ai de bien plus beaux bijoux et j'attends toujours qu'on m'apporte une vraie rose bleue. »

Le troisième prétendant était un jeune noble de bonne famille. Il convoqua le plus réputé des peintres du pays et lui demanda de lui peindre la plus belle rose bleue qu'on pût imaginer. Quand le tableau fut achevé, il le porta à l'empereur, qui fut persuadé que, cette fois-ci, sa fille serait satisfaite, et qu'elle aurait enfin trouvé un mari.

Son père alla la chercher et lui dit : « Tu dois tenir ta promesse ! Tu as la rose bleue que tu souhaitais, nous allons préparer le mariage. » La princesse répondit qu'elle voulait une rose vivante et non une image, aussi belle soit-elle. Le dernier prétendant fut donc refusé comme tous les autres.

Un soir d'été qu'elle admirait le coucher du soleil, elle entendit un poète chanter. C'était un beau jeune homme à la voix douce et harmonieuse. Elle descendit à sa rencontre. Elle s'éprit de lui, mais quand il lui dit qu'il souhaitait l'épouser, elle lui répondit : « Hélas, j'ai juré que je n'épouserais que celui qui serait capable de me rapporter une rose bleue. Jusqu'à présent, personne n'y est parvenu.
— Moi j'y parviendrai. Ce n'est pas difficile, il y a partout des roses bleues. »

Le lendemain, il arriva au palais avec une rose de couleur crème. Il la présenta à l'empereur, qui se moqua de lui. Il fit néanmoins appeler sa fille et lui dit : « Voilà ma fille un poète qui prétend avoir trouvé une rose bleue ! » À sa grande surprise, il entendit sa fille répondre : « Mais oui, mon père, elle est bleue, c'est la plus belle rose que j'ai jamais vue et elle est bien bleue. » Tout le monde à la cour partagea la stupéfaction de l'empereur. Tout le monde voyait une rose crème et non bleue ! Partout la princesse disait : « Je vous assure qu'elle est bleue. C'est vous qui ne voyez pas ! Elle est d'un bleu merveilleux, et je suis heureuse car je vais épouser celui qui me l'a rapportée. » Et ainsi fut fait. La princesse fut très heureuse et perdit l'habitude de rechercher en permanence la perfection.
Ce qui rend les amitiés indissolubles et double leur charme est un sentiment qui manque à l'amour : la certitude.

(Honoré de Balzac)

bunni


bunni



La princesse de pierre

Deux princes partirent un jour à l'aventure vers de lointaines contrées. Mais comme ils s'amusaient beaucoup à faire les quatre cents coups, ils décidèrent de ne plus revenir au château.

Leur petit frère, qui se faisait du souci, décida de partir à leur recherche. Lorsqu'il les trouva enfin, ils se moquèrent de lui: "Oh! Une chance que tu sois venu, petit frère. Car nous n'aurions jamais pu nous débrouiller seuls; tu es tellement plus intelligent que nous." Mais ils acceptèrent quand même de l'emmener avec eux.

Ils reprirent donc la route tous ensembles et un jour, au détour d'un sentier, ils aperçurent une fourmilière. Le plus vieux voulu la fouiller et voir comment les petites fourmis apeurées se précipiteraient au-dehors, transportant leurs oeufs pour les mettre en sûreté. Mais le plus jeune dit: "Laisse donc ces animaux en paix, je ne peux pas supporter qu'on les dérange!"

Ils continuèrent et arrivèrent au bord d'un lac sur lequel barbotaient un très grand nombre de canards. Les deux plus vieux voulurent en attraper quelques-uns et les faire cuire, mais le plus jeune ne les laissa pas faire et leur dit: "Laissez donc les animaux en paix, je ne peux pas supporter qu'on les tue!"

Plus tard, ils trouvèrent une ruche d'abeilles qui était tellement remplie de miel, qu'elle en débordait. Les deux frères voulurent faire un feu sous la ruche, afin d'enfumer les abeilles et leur voler leur miel. Mais le plus jeune les en empêcha encore et leur dit: "Laissez donc les animaux en paix, je ne peux pas supporter qu'on les brûle!"

Finalement, les trois frères arrivèrent à un château ensorcelé. Une méchante sorcière avait transformé en pierre toutes les plantes, tous les animaux et tous les gens de ce château, à l'exception du roi. Elle avait épargné le roi car elle voulait qu'il souffre de voir ses trois filles dormir d'un sommeil de pierre.

Les trois princes se dirigèrent vers la porte du château et regardèrent à l'intérieur par un petit trou. Là, ils virent un homme gris et triste comme la pierre assis à une table: c'était le roi. Ils l'appelèrent une fois, puis une seconde fois, mais le roi ne les entendit pas. Ils l'appelèrent de nouveau. Là, il se leva, ouvrit la porte et, sans prononcer un seul mot, les conduisit à une table couverte de victuailles. Lorsque les trois princes eurent mangé et bu, qu'ils furent rassasiés et repus, le roi leur montra leur chambre et ils allèrent dormir.

Le lendemain matin, le roi vint auprès du plus vieux des princes, lui fit signe de le suivre et le conduisit à une tablette de pierre. Sur cette tablette se trouvaient trois inscriptions, chacune décrivant une épreuve qui devait être accomplie pour que le château soit délivré de son mauvais sort.

La première disait: "Dans la forêt, sous la mousse, gisent les mille perles des princesses. Elles doivent toutes être retrouvées avant le coucher du soleil. S'il en manque ne serait-ce qu'une seule, celui qui les aura cherché sera changé en pierre." Le prince partit donc dans la forêt et chercha durant toute la journée. Mais lorsque la nuit tomba, il en avait seulement trouvé une centaine. Il arriva ce qui était écrit sur la tablette: il fut changé en pierre.

e jour suivant, le second prince entreprit à son tour de retrouver les perles. Mais il ne fit pas beaucoup mieux que son frère aîné: il ne trouva que deux cents perles et fut lui aussi changé en pierre.

Puis, ce fut au tour du plus jeune de chercher les perles. Mais c'était tellement difficile et cela prenait tellement de temps, qu'il se découragea. Il s'assoya sur une roche et se mit à pleurer. À ce moment, la reine des fourmis, à qui il avait un jour porté secours, surgit avec cinq mille autres fourmis. Les petites bêtes cherchèrent les perles et cela ne leur pris guère de temps pour qu'elles les retrouvent toutes et qu'elles les rassemblent en un petit tas.

Fort de son succès, le jeune prince s'attaqua à la seconde épreuve: "La clef de la chambre des princesses gît au fond du lac. Elle doit être retrouvée avant le coucher du soleil. Si ce n'est pas le cas, celui qui l'aura cherché sera changé en pierre." Lorsqu'il arriva au bord du lac, les canards, qu'il avait un jour sauvés, barbotaient encore. Ceux-ci plongèrent dans les profondeurs du lac et rapportèrent la clef au prince.

La dernière épreuve était la plus difficile de toutes: "Parmi les trois filles du roi, il en est une qui est plus jeune et plus gentille que les autres. Elle doit être reconnue avant le coucher du soleil. Celui qui se trompera, celui-là sera changé en pierre." Mais les trois princesses se ressemblaient toutes comme des gouttes d'eau. La seule chose qui permettait de les distinguer était qu'avant d'être changées en pierre elles avaient mangé chacune une sucrerie différente: l'aînée avait mangé un morceau de sucre; la deuxième, un peu de sirop; la plus jeune, une cuillerée de miel.

C'est alors qu'arriva la reine des abeilles dont la ruche avait un jour été sauvée par le jeune prince. Elle se posa sur les lèvres de chacune des princesses pour y goûter les cristaux de sucre qui s'y trouvaient collés. Finalement, elle s'arrêta sur les lèvres de la troisième, car elles avaient le goût du miel.

C'est ainsi que le jeune prince pu reconnaître la plus jeune des princesses. À ce moment, le sort fut levé: toutes les plantes, tous les animaux et tous ceux qui avaient été changé en pierre reprirent vie, et les trois princesses se réveillèrent.

Le jeune prince épousa la plus jeune et devint le roi après la mort de son père, tandis que ses frères marièrent chacun une des deux autres princesses.

bunni

Contes et légendes,la fée des fleurs.
                                                                                     
Une vieille légende roumaine dit que lorsque tout ce qui vit prit sa forme et sa dénomination définitive, seul l'homme fut mécontent car la terre lui semblait toute noire et déserte. Il sentait que quelque chose manquait pour que sa vie devînt belle et heureuse. La fée aux fleurs apparut et, en entendant ses lamentations, lui dit : - Je vais couvrir la terre d'une parure originale qui serait à jamais ta consolation. A un signe de sa baguette magique, des fleurs en grand nombre sortirent soudain de terre et vinrent se ranger les unes auprès des autres. La fée trempa alors sa plume magique dans les couleurs de l'arc-en-ciel et donna à chacune une coloration différente. Sa plume fit merveille et bientôt toute la terre se trouva couverte d'une multitude de fleurs de toutes sortes. Les fiers chrysanthèmes purent s'enorgueillir de leurs robes éclatantes et multicolores, les roses de leurs pétales semblables à du velours, les œillets, les jasmins, les lilas, les giroflées de leurs tons chauds et leur suave parfum. Ce fut ensuite le tour des craintives pensées, des timides violettes, si timides qu'elles se cachent derrière leurs feuilles, des campanules et de leurs sœurs les humbles fleurs des champs. En même temps, la fée donnait à chacune d'elles un nom et lui fixait le lieu de résidence qui serait désormais le sien. S'alignant sagement, toutes ces fleurs attendaient le moment de gagner leur nouvelle destination. Toujours peignant fleur après fleur, la fée se trouva nez à nez avec un rayon de soleil qui l'observait depuis longtemps et l'avait suivie tout au long de ses pérégrinations. -Mon bon père Soleil, aimerait, lui dit-il, faire quelque chose pour l'humanité. Il souhaitait qu'une fleur à sa ressemblance soit comme lui revêtue d'or pour apporter sa lumière aux humains durant les journées grises où, caché par les nuages, il demeure invisible.La fée, trempant aussitôt sa plume dans la poudre d'or en recouvrit le tournesol qu'on appela désormais le « grand soleil ». Un enfant lui demanda ensuite d'inventer une fleur particulièrement belle, pour l'offrir à sa maman. Après avoir réfléchi, la fée choisit le blanc qui est la couleur des candides pensées de l'enfance et , voulant dépeindre la douceur d'un sourire maternel, créa le lys qui est et restera à jamais le symbole de l'innocence. Lorsque toutes ces fleurs furent prêtes pour réconforter les pauvres humains, on entendit, venant de très loin, de sous un amas de neige, comme un soupir d'enfant abandonnée : -Je suis la seule à avoir été oubliée, bonne fée, disait une petite voie plaintive, et je suis restée sans couleur et sans nom. Lorsque mes sœurs se disperseront sur la terre pour accomplir leur mission et que leur beauté réjouira les regards, moi je resterai ici et personne ne le saura. Tout émue, la fée répondit : - Ne sois pas malheureuse, petite fleur. Toi, qui es la dernière, tu sera la première. Parce que tu as été oublié, petit perce-neige, c'est toi qui, avec tes clochettes toutes blanches, seras chargé d'annoncer la venue du Printemps. A ta vue, tous se réjouiront. Et c'est depuis ce temps-là que ces fleurs poussent aux quatre coins de la terre et qu'elles emplissent de joie le cœur de tous les hommes épris de beauté.

bunni


La fin du royaume des fées
Il y avait une fois un prince d'Andalousie, très jeune et très beau nommé Guzman. Il devait épouser sa cousine, la princesse Zangora, que la fée Gnomis, sa marraine, avait dotée de dons précieux : beauté, esprit, bonté, richesse.
A ce mariage, qui devait réunir deux grandes maisons, on avait convié une foule considérable de princes, de seigneurs et, pour complaire à la fée marraine, toutes les fées du globe.
Toutes s'en réjouissaient fort et faisaient déjà des projets sur leur apparat, sur les présents à faire aux mariés, voulant s'éclipser les unes les autres, et surtout éblouir les simples mortels.
Mais voilà qu'au dernier moment, on apprit une nouvelle fort contrariante. Un vieil officier du palais avait rappelé au roi régnant la tradition établie de tous temps dans la famille, et qui voulait que chaque prince de la dynastie se mariât dans le mausolée élevé sur la sépulture du premier roi de la race.
Le roi, s'étant en effet rappelé cette coutume, avait, par respect pour les usages établis, décidé que le mariage se ferait dans la chapelle. Mais cela modifiait toutes les dispositions prises. A cause de l'exiguïté du sanctuaire, il était impossible d'essayer de placer les inviter selon les lois de la préséance. Le roi décida que chacun se caserait comme il pourrait, tant qu'il y aurait de la place.
Le surcroît resterait à la porte, les fées comme les autres.
Vous pensez bien qu'une telle mesure n'était pas faite pour flatter l'orgueil des fées, qui s'attendaient à trôner aux premiers rangs.
Il faut dire aussi, qu'étant fort curieuses de leur naturel, elles auraient bien voulu jouir du spectacle charmant de l'union des deux princes.
Elles se récrièrent, se montrèrent lésées dans leur amour-propre ; bref, ce contre-temps fut l'occasion d'une grande réunion qu'on fixa à la nuit qui devait précéder le mariage, dans une immense forêt.
A l'heure indiquée, l'assemblée jugée complète, la présidente ouvrit la séance, et chacun prit la parole à son gré. Je n'affirme pas que si le roi eût pu entendre ce concert de récriminations, il n'eût pas regretté sa détermination.
«Ces orgueilleux, ne savent-ils donc pas, disait la Fée des Airs, que, à l'instant même, assemblant mes nues, je puis faire s'écrouler sur eux ce fétu de temple.
- Et moi, ajoutait la Fée des Eaux, ne puis-je, si je le veux, déchaîner un torrent qui fera vaciller sur sa base ce joujou de chapelle, et entraîner comme des atomes ces soi-disant grands princes.»
Ainsi chaque fée, chaque génie, vantait un moyen de destruction.
Le Génie du Tonnerre voulait, à l'instant où le prince passerait l'anneau au doigt de sa fiancée, faire éclater sur eux sa foudre, tandis que le Génie du Feu assurait que ce serait d'un bon exemple d'allumer, à la place même de la chapelle, un incendie qui, brûlant à perpétuité, rappellerait l'offense faite aux fées toutes-puissantes. »
«Sans compter, reprit soudain une voix douce, que vous serez bien avancés quand vous aurez fait le malheur de ces pauvres enfants. Est-ce leur faute, après tout, si les lois d'une sotte coutume nous privent d'un plaisir espéré. Je puis vous affirmer, au contraire, que la princesse, ma filleule, en est fort désolée.
- La fée Gnomis a raison, cria une petite voix pointue, celle de la Fée Curieuse. Tandis que vous vous laissez aller à la colère, moi j'ai trouvé, je crois, le moyen de voir quand même.
- Voyons, voyons ?
- Rien de plus simple, reprit Curieuse. Pour rien au monde, nous ne voudrions nous exposer à être bousculées, entassées comme de simples créatures, et nous sommes justement irritées d'être traitées en cette occurrence, nous, toutes-puissantes, comme le dernier des petits barons. Mais qui nous empêche de nous distinguer, de nous trier en changeant de forme ? Voici donc ce que j'ai pensé : nous, les fées, nous nous transformerions en fourmis, mouches, chenilles, tandis que les génies prendraient la forme de papillons et de hannetons. Est-ce bien trouvé ? Ajouta-t-elle avec un sourire triomphant.
- Parfaitement, parfaitement, clama l'assemblée.
- Cela est très beau, reprit la fée Prévoyante, quand le silence se fut rétabli, mais vous savez, mes sœurs, que lorsque, de notre chef, nous prenons une forme quelconque, une autre fée seulement peut nous tirer de la métamorphose. Eh bien ! Comment ferons-nous, si personne ne consent à se priver de la fête ? »
Il y eut un moment de consternation.
Tous voulaient voir. Mais, tout à coup, le gros Génie Sans-Souci, qui s'était tenu à l'écart de toute cette discussion, prit la parole.
«Je me soucie fort peu, dit-il, de voir le prince Guzman épouser sa cousine Zangora. Allez donc au mariage, je me tiendrai près de la porte pour vous toucher de ma baguette, dès que vous le désirerez.
- Vive Sans-Souci ! « cria le chœur.
Le son des cloches et des fanfares joyeuses, montant de la ville, annonça l'heure de la cérémonie nuptiale. Il était temps d'arriver.
En un clin d'œil, les fées se trouvèrent à l'entrée de la chapelle, où déjà s'entassait une foule compacte.
Entre une double haie de demoiselles d'honneur et de cavaliers richement parés, les deux époux s'avançaient, resplendissants de beauté, de jeunesse, dans leurs riches vêtements, tout brodés d'or et de pierreries.
Derrière eux, venaient les parents et les quelques dignitaires choisis pour assister au mariage.
Comme le cortège passait sous la grande porte d'or massif, on entendit un bourdonnement inusité de mouches, de hannetons qui se heurtaient aux vitres, cherchant un passage, tandis qu'une nuée de papillons aux ailes diaprées, voltigeant autour du jeune couple, leur faisaient une auréole radieuse, et qu'une multitude de soyeuses chenilles se glissaient furtivement en faisant onduler leur traîne entre les rangs des invités. Puis les lourds battants se refermèrent et chacun prit place.
Papillons, mouches, hannetons se placèrent comme ils purent, qui sur le diadème d'une grande dame, qui sur le nez d'un vieux chambellan, ou sur les têtes des sphinx sculptés...
A la porte, Sans-Souci veillait - veiller est une façon de parler, car le gros génie, mollement appuyé sur une canne de maître des cérémonies, ronflait doucement - quand il se sentit touché à l'épaule, par une main légère. Il ouvrit à moitié ses pesantes paupières et reconnut près de lui la gracieuse Fée Mélusine.
La Fée des Forêts arrivait d'un voyage lointain et, n'ayant pas assisté à la réunion, elle était absolument ignorante de ce qui s'était passé.
«Je suis un peu en retard, Sans-Souci, dit-elle, vite, laissez-moi passer. »
Mais le génie, fort contrarié d'être ainsi brusquement arraché au sommeil, lui barra brutalement le passage :
«Défense d'entrer,» fit-il d'un ton bourru.
La patience n'était pas la vertu dominante des fées. Mélusine entra aussitôt dans une violente colère et, sans plus d'explications, d'un coup de baguette, elle changea Sans-Souci en un immonde crapaud.
Puis, entrebâillant la porte, elle glissa un regard dans la chapelle. Mais, à la vue de tous ces personnages enfermés dans cet étroit espace, à la vue des figures rouges de chaleur, des postures incommodes, Mélusine renonça aussitôt à son projet et, s'enveloppant d'un tourbillon, elle se laissa emporter par la brise, abandonnant à sa douleur l'infortuné génie qui, pour la première fois de sa vie, sanglotait à fendre l'âme...
La cérémonie était achevée.
De nouveau les mariés franchirent la lourde porte et, comme il s'éloignaient, suivis des acclamations de leur peuple, un fourmillement d'insectes se répandit sur le parvis.
«Mais où est donc Sans-Souci ?» s'écrie chaque fée, chaque génie.
On cherche... peu de temps, d'ailleurs !... Eh quoi ! Cet affreux crapaud vautré sous une pierre... ? Hélas ! Oui, voilà Sans-Souci.
Le résultat de cette découverte fut une scène de rage, de désespoir indescriptibles.
Les chenilles se tordaient de douleur ; les papillons s'arrachaient les ailes, les mouches, les hannetons ronflaient comme des bourdons.
Une grêle d'injures assaillit le génie. Mais après des efforts désespérés, le malheureux put enfin se faire entendre et raconter son aventure.
Vous pensez bien qu'on n'attendit pas plus longtemps pour se mettre à la poursuite de Mélusine.
Hélas ! Une fatalité inexplicable poursuivait les malheureuses fées.
Mélusine, qui ne se doutait de rien, était arrivée à un fourré qu'elle affectionnait beaucoup. Au-dessus d'elle, de grands arbres formaient une voûte fraîche, impénétrable aux rayons du soleil et pleine de chants d'oiseaux ; dans l'herbe, une source coulait discrètement entre deux haies d'iris bleus.
«Comme il ferait bon s'y baigner, vraiment, pensa la Fée. Comme un cygne au col blanc ferait bien parmi ces nénuphars !»
Décidément Mélusine est tentée... Un coup de baguette ! Et elle a pris la forme convoitée, se promettant de demander à la première fée qui passera de la tirer de là. Mais Mélusine attend toujours !
Elle attend, comme les mouches et les hannetons qui, depuis ce temps, errent à la recherche d'une fée échappée au sort commun.
Elle attendra éternellement, car les papillons aux ailes d'or, les petites mouches qui tournoient dans un rayon de soleil, et les hannetons qui font bourdonner leurs élytres, sont tout ce qui reste maintenant de la brillante légion des Fées.

J. PERINAUX

bbchaton

Chang E s'envole vers la Lune

Le quinze de chaque mois du calendrier lunaire, lorsque la nuit est belle, le disque de la Lune suspendu au milieu du ciel, est plus rond et plus blanc que jamais. Il enveloppe la Terre d'une douce clarté. On dit que dans la Lune habite la Déesse Chang E, l'épouse de l'Archer Céleste Yi. Pourquoi Chang E habite-t-elle solitaire dans la Lune?
Voici son histoire:

PARTIE I

Sur la demande de l'Empereur Céleste, Yi abattit les neuf soleils, châtia le démon des eaux Hebo et tua nombre de monstres et d'animaux féroces. Le peuple l'aimait et le vénérait. Yi voyageait beaucoup, se liait d'amitié avec la population et menait une vie paisible.

Un jour, alors qu'il chassait dans les bois, Yi traversa un ruisseau et aperçut sur l'autre rive une jeune fille puiser de l'eau avec un tube de bambou. Sa longue course l'avait assoiffé. Il s'approcha de la jeune fille et lui demanda à boire. En voyant cet homme au visage plein de bonté, un arc rouge et un carquois de flèches blanches au dos, la jeune fille devina qu'il était le héros Yi. Elle l'accueillit aimablement, lui offrit à boire et lui cueillit une belle fleur en témoignage de son respect. Yi choisit alors dans ses trophées une magnifique peau de renard et lui en fit cadeau.

En bavardant avec elle, il apprit qu'elle s'appelait Chang E. Ses parents avaient été tués par des animaux sauvages. Depuis, elle vivait seule et, toute l'année en signe de deuil, portait une robe blanche à la mémoire de ses parents.

Yi se prit de pitié pour elle et Chang E le respectait beaucoup. les deux jeunes gens tombèrent amoureux l'un de l'autre. Peu de temps après, Yi et Chang E se marièrent et devinrent inséparables.

Yi et Chang E étaient très attachés l'un à l'autre. Ils ne se quittaient jamais, voyageant et chassant ensemble. Ils menaient une vie heureuse, et Yi oublia complètement de retourner au ciel.

PARTIE II

Le temps passa très vite. Trois années plus tard, l'Empereur Céleste ordonna à Yi de retourner au ciel. En apprenant cette nouvelle, Chang E pleura de douleur et Yi ne put retenir ses larmes lui aussi.

Lorsque l'Empereur Céleste apprit que Yi s'était marié sur Terre et ne voulait pas revenir au ciel, il se mit dans une grande colère. Dès lors, il fut interdit à Yi de remonter au ciel, mais il se consola en trouvant qu'il était plus heureux sur terre. Il aimait les montagnes, les forêts, le peuple et sa jolie femme...
Ainsi continua-t-il à vivre sur la Terre.

Mais Yi savait que la vie des êtres humains a ses limites. Un jour, il dit à sa femme:
- Quand j'étais au ciel, j'ai entendu dire que dans les monts Kunlun, à l'Ouest, habite la Reine-mère d'Occident. Elle possède une pilule d'immortalité. Je vais aller la chercher.

Ravie de cette initiative, Chang E prépara rapidement des provisions de route pour son mari, lui prodigua maints conseils de prudence et lui demanda de revenir au plus vite. Ils étaient très tristes de cette première séparation mais, pour vivre éternellement tous les deux, ils étaient prêts à affronter le danger et la mort. Yi prit son arc et ses flèches, enfourcha un bon cheval et se dirigea vers l'Ouest.

PARTIE III

La demeure de la Reine-mère d'Occident se trouvait loin, très loin de là. Il fallait traverser un grand nombre de montagnes escarpées, de forêts profondes s'étendant à perte de vue et de déserts sauvages. Non loin des monts Kunlun, il fallait traverser deux grands obstacles: le Fleuve aux eaux limpides et la Montagne de Feu. L'eau de ce fleuve était si légère que même une plume d'oie était tout de suite immergée. Quant à la Montagne de Feu, elle était inapprochable. Ses flammes d'une dizaine de mètres de haut, ses tourbillons de fumée rendaient impossible sa traversée.

Après avoir franchi de nombreux cols et chevauché longtemps, Yi arriva enfin au bord du Fleuve aux Eaux limpides. Comment faire? Yi se rappela qu'un jour, en chassant dans le Sud, il avait vu un bois insubmersible qui provenait d'un grand arbre croissant dans de hautes montagnes. C'était un bois à la fois très dur et très léger. Avec ce bois, Yi pourrait certainement traverser le fleuve.

Il remonta sur son cheval, se dirigea vers le Sud et trouva enfin l'arbre qu'il cherchait. En évidant le tronc, il fit une embarcation qu'il ramena au fleuve. Il la mit à l'eau et après s'être assuré qu'elle flottait, monta avec son cheval et se dirigea à la rame vers la rive opposée. Le fleuve était très large, mais l'embarcation arriva en moins de temps qu'il n'en faut pour avaler un repas.

Après avoir traversé le fleuve, Yi arriva au pied de la Montagne de Feu. Mais notre héros était sûr de lui. Jadis, quand il avait tué le monstre Jiuying sur les rives du fleuve Xiongshui, il avait gardé sa peau très dure et la portait parfois pour se défendre. Avec la peau, il se fit une armure pour lui-même et pour son cheval.

Une fois prêt, il sauta sur son cheval et, d'un coup de cravache, lança sa monture au grand galop. Les flammes et la fumée l'étouffèrent bientôt. Heureusement, son cheval était un coursier rapide qui pouvait couvrir mille li en une seule journée et il traversa la Montagne de Feu d'une seule traite. Hors de portée des flammes, il descendit de son cheval et en l'examinant constata que seuls les crins de sa queue avaient été roussis par le feu.

PARTIE IV

Après avoir surmonté d'innombrables difficultés, Yi arriva enfin au pied des monts Kunlun.

La Reine-mère d'Occident habitait la Montagne de Jade située au centre des monts Kunlun. Lorsque Yi arriva au pied de la montagne l'Oiseau vert, le messager de la Reine, avait déjà informé celle-ci de l'arrivée de l'archer céleste. La Reine savait que Yi était un héros céleste qui avait délivré le peuple de nombreux fléaux. Aussi l'accueillit-elle avec beaucoup de respect.

Ayant appris le but de sa visite, la Reine ordonna à l'Oiseau à trois pattes, gardien des pêches d'immortalité, d'apporter une calebasse contenant une pilule d'immortalité fabriquée à partir d'un des fruits de l'arbre d'immortalité. Cet arbre ne donnait des fruits qu'une fois tous les trois mille ans; c'est pourquoi ces pilules étaient très rares et extrêmement précieuses.

- Emporte cette pilule, dit la Reine, c'est la seule qui me reste. Néanmoins, c'est largement suffisant pour ton épouse et toi : Prenez-en chacun la moitié, et vous deviendrez immortels. Mais attention, si l'un de vous deux l'avale entière, il s'envolera au ciel et ne pourra jamais plus redescendre sur Terre.

Je ne suis venu chercher la pilule d'immortalité que pour vivre éternellement avec Chang E, répondit l'Archer céleste. Puis il prit la calebasse, remercia la Reine et s'apprêta à partir...

PARTIE V

Au moment où Yi allait monter sur son cheval pour repartir, la Reine ordonna à l'Oiseau à trois pattes d'aller cueillir de l'herbe Yao près de l'Etang de jade et la confia à Yi pour l'offrir à Chang E. C'était une plante très rare, issue d'une métamorphose de Yao Ji, fille aînée de Yandi, dieu du Soleil.

Yao Ji était une jolie et charmante jeune fille. A dix sept ans, elle s'éprit de Chi Songzi, le maître de la pluie de Shen Nong. Au début, ils s'aimèrent passionnément. Néanmoins, Chi Songzi n'était pas fidèle à Yao Ji. Quelques temps après, il l'abandonna et partit.

Espérant jour et nuit le revoir, Yao Ji le chercha partout. C'est en arrivant au centre des monts Kunlun qu'elle apprit que Chi Songzi était tombé amoureux d'une autre fée. Elle mourut alors de chagrin et de regret.

A sa mort, Yao Ji se métamorphosa en herbette qui prit racine au bord de l'Etang de Jade. Quelques temps après, les alentours de l'étang furent recouverts de cette herbe. On l'appela l'herbe Yao. On raconte que les gouttes de rosée qui, en toutes saisons, perlaient sur les feuilles de cette herbe étaient les larmes intarissables de la jeune fille.

L'herbe Yao avait une particularité. Si une jeune fille humait son parfum, elle devenait belle et douce. C'est pourquoi on l'appelait aussi l'herbe charmeuse. Après avoir pris la pilule d'immortalité et l'herbe Yao, Yi s'en retourna en hâte. Cela faisait six mois déjà qu'il avait quitté sa femme.

PARTIE VI

Lorsque Yi retrouva Chang E, il lui raconta tout ce qui s'était passé et lui confia la pilule d'immortalité.
- Je suis passé par mille épreuves pour aller la chercher. Si nous la partageons, nous deviendrons immortels tous les deux. Mais si l'un de nous l'avale entière, il ira au ciel sans espoir de retour. Garde-la précieusement, nous la partagerons un jour faste prochain et nous vivrons ensemble éternellement heureux.

Chang E mit la calebasse dans sa poche avec précaution. Puis, Yi lui donna l'herbe Yao et dit :
- Regarde, c'est la Reine Mère d'Occident qui te l'offre.

Chang E, très touchée, admira l'herbe Yao un long moment.
- Comme elle est belle! Je n'en ai jamais vu de semblable.

Et lorsque Chang E huma le parfum de l'herbe Yao, elle devint encore plus belle et plus douce qu'auparavant.

Yi habitait sur la Terre depuis longtemps déjà et un grand nombre de jeunes gens venaient le voir pour apprendre le tir à l'arc. Yi leur enseignait consciencieusement son art. Lorsque le maître est compétent, ses disciples sont brillants, dit le proverbe. De fait, la plupart de ses élèves devinrent de célèbres archers.

L'un d'entre eux s'appelait Feng Meng. C'était un bon archer, mais un homme ambitieux et jaloux. Il caressait l'espoir que son maître mourût avant lui, afin de devenir le meilleur archer du monde.

PARTIE VII

Quand il apprit que Yi avait obtenu une pilule d'immortalité de la Reine Mère d'occident, Feng Meng en fut très contrarié. Il conçut alors un plan perfide.

Un jour que Yi était allé chasser, Feng Meng en profita pour pénétrer chez lui et menaça Chang E de son arc.
- Donne-moi vite la pilule d'immortalité, lui ordonna-t-il, sinon je te tuerai.

Surprise, Chang E lui demanda :
- Feng Meng, tu es le disciple de Yi; pourquoi...?

- Je ne considère plus Yi comme mon maître. Devrais-je toujours rester un archer de second ordre toute ma vie? Non, car il mourra avant moi! rétorqua Feng Meng en riant sarcastiquement.

Chang E était rouge d'émotion et de colère.
- Allons, dépêche-toi de me donner cette pilule! Cria Feng Meng en brandissant son arc d'un air menaçant.

Chang E pensa à toutes les épreuves que son mari avait dû traverser pour aller chercher la pilule d'immortalité. Elle ne devait pas laisser Feng Meng s'en emparer. Alors Chang E sortit de sa poche la pilule et, au moment où Feng Meng tendait la main, la porta rapidement à la bouche. Elle l'avala et s'élança vers la porte.

Chang E avait déjà franchi le seuil lorsqu'elle se sentit toute légère et s'envola vers le ciel. En pensant à son mari resté sur terre, elle décida de se réfugier sur l'astre le plus proche, la Lune. Dès lors, le Palais lunaire, dans lequel vivait désormais Chang E, brilla d'un éclat nouveau.

PARTIE VIII

Lorsqu'à son retour de la chasse, Yi apprit ce qui s'était passé, une immense tristesse l'envahit. Il regarda la Lune et pensa à sa femme Chang E; des larmes inondaient ses joues.

Devant l'ingratitude que Feng Meng lui avait témoigné, Yi fut rempli de colère. Il prit son arc et ses flèches et sortit à la recherche de son disciple.

Feng Meng s'était caché dans un bois derrière la maison de Yi. Lorsque celui-ci passa à la hâte devant lui sans le voir, il lui assena un violent coup de bâton sur la tête. Yi s'affaissa, mortellement blessé.

Lorsque les disciples de Yi découvrirent le crime de Feng Meng, ils arrêtèrent ce dernier immédiatement, l'attachèrent à un grand arbre et le transpercèrent chacun d'une flèche. Son ambition démesurée l'avait mené à sa perte.

EPILOGUE

En souvenir de Yi, chaque famille accrocha son portrait dans la maison, éleva l'archer divin au rang de dieu tutélaire et le prit pour modèle dans la conduite du monde et la vertu. Après sa mort, le peuple continua à lui témoigner une grande vénération et à l'invoquer lors de calamités naturelles comme les sécheresses ou les inondations.

Quant à Chang E, elle vivait dans le Palais lunaire. Cependant, malgré le luxe du Palais et la vie immortelle à laquelle elle avait droit, Chang E menait une vie solitaire et triste depuis qu'elle avait perdu son mari.

Dans le Palais lunaire vivait aussi un lièvre condamné à broyer des plantes médicinales toute l'année. Il avait ainsi été châtié par l'Empereur Céleste pour avoir volé l'herbe des immortels.

Un autre condamné à perpétuité, Wu Gang, habitait le Palais. L'Empereur Céleste l'avait envoyé couper le laurier lunaire pour avoir fait des erreurs dans l'apprentissage de l'immortalité. Son travail achevé, il pourrait revenir sur Terre. Mais dès que Wu Gang faisait une entaile dans l'arbre, celle-ci se refermait au moment où il levait sa hache pour frapper à nouveau. Aussi Wu Gang, voulant expier sa faute, taillait le laurier lunaire d'un bout de l'année à l'autre, espérant toujours achever son travail et quitter la Lune.

Parceque le lièvre et Wu Gang menaient une vie expiatoire sur la Lune, on crut logtemps que Chang E avait volé la pilule d'immortalité et s'était réfugiée dans la Lune après son forfait. Li Shangyin, célèbre poète de la dynastie des Tang, a même écrit:

Se repentant d'avoir volé la pilule d'immortalité
Chang E rêve chaque nuit à la mer émeraude
Sous un ciel bleu

Quelle qu'en soit la version, les amours contrariés de l'archer céleste Yi et de la belle Chang E font encore de nos jours pleurer bien des coeurs.

Fin de cette Histoire.