Nouvelles:

Nouvelle version 2024 du forum installée  !

Menu principal

Contes d'ici et d'ailleurs

Démarré par bunni, 18 Septembre 2012 à 00:22:36

« précédent - suivant »

bunni


Cafouille la sorcière

Des sorcières, il y en a de toutes sortes : 

des méchantes, des laides, des monstrueuses, 

des maléfiques, des vieilles 

et même des jeunes qui vont à l'école des sorcières 

apprendre leur métier. 

A l'école des sorcières, 

il y a des petites sorcières, très coquettes, très jolies 

pas encore très méchantes, juste un peu.... 

coquines, énervantes, agaçantes, 

quelquefois même un peu pestes, 

enfin des apprenties sorcières... 

A l'école des sorcières, c'est l'heure des vacances, 

c'est le moment pour elles d'aller dans le monde 

exercer leurs pouvoirs. 

Toutes les destinations sont possibles, 

pas de problèmes de transport, 

elles enfourchent leur balai, 

la formule magique et hop ! 

A peine parties les voilà déjà arrivées 

sur le lieu de leurs vacances ! 

Pas d'embouteillage, 

pas de risque d'accidents sur les routes, le bonheur ! 

Les unes après les autres, 

elles choisissent leur destination : 

moi l'Espagne, pour moi la montagne, 

pour moi le Pôle Nord, et pour moi l'Amérique... 

Seule dans un coin, 

une petite sorcière ne dit rien, timide, 

elle n'ose parler, 

elle prendra ce qui restera. 

Son nom, Cafouille, Cafouille la timide ! 

Elle voudrait bien donner son avis, prendre la parole, 

mais quand elle commence, elle bafouille, elle bégaie, 

les autres parlent fort, 

personne ne prend le temps de l'écouter. 

Tout à coup elle entend : 

-        Qui veut aller dans le Sahara ? 

-        C'est où  demande quelqu'un ? 

-        C'est le désert, c'est pour Cafouille, 

-        elle n'aura pas peur, il n'y a personne. 

Cafouille murmure : 

-        D'accord ! Oui, je veux bien y aller, mais.... 

Elle ne peut continuer, 

on est passé à une autre destination. 

Pourtant, se dit-elle, 

pourquoi aller dans le désert s'il n'y a personne ! 

A-t-on besoin d'une sorcière dans le désert ? 

-        Alors Cafouille ! Tu pars quand ? Tu dors ! 

   

Elle attrape son balai, patatrac !

Elle se prend les pieds dedans et tombe sur les fesses ! 

Un autre essai, elle se cogne le front, 

tout le monde rit et se moque. 

Cafouille devient toute rouge, 

elle voudrait rentrer sous terre, 

elle voudrait que personne ne la voie ! 

Oh ! Oui ! Elle sera bien dans le désert, toute seule, 

personne pour ricaner dans son dos, personne pour crier : 

« Cafouille la Timide, Cafouille qui bafouille. » 

Allez, un effort Cafouille, je lève la jambe droite, je m'assois et... 

.Ah ! La formule magique, j'allais oublier ! 

Quelle est donc cette formule qui va m'expédier dans le désert ! 

Le maître lui tend un papier sur lequel est écrit : 

Chafouri, Chafoura ! 

Ton balai enfourcheras 

Chafouri, Chafoura 

Au désert t'emmèneras! 

   

Un grand souffle chaud, le sable vole et le balai se plante dans le sable au sommet d'une dune. 

Un peu étourdie, Cafouille roule, roule, roule, 

elle est au pied de la dune et son balai est resté en haut ! 

Vite, il faut remonter le chercher ! 

Mais non suis-je sotte  ! 

Je suis une sorcière je connais les formules magiques voyons ! 

Chafouri, Chafoura 

Le balai m'apporteras 

Chafouri, Chafoura 

Le balai sera là ! 

Plusieurs essais, puis miracle ! Le balai est là ! 

Elle bat des mains, ça y est, je suis une vraie sorcière, personne n'a ri ! 

Personne, personne, bien sur, il n'y a personne ! Mais alors que vais-je faire ? 

Chafouri, Chafoura 

Qui viendra ? 

Chafouri, Chafoura 

Qui m'accompagnera ? 

   

Moi ! Moi ! Entend-elle autour d'elle ! 

Mais, mais, mais...Il y a du monde ! pourtant le désert, c'est le désert ! 

Elle se retourne et voit : un dromadaire, un fennec, une gazelle, à ses pieds un lézard... 

Bonjour, je suis  Dromadaire le mâchouilleur, 

moi je suis  Fennec le rusé 

et moi Gazelle l'acrobate, 

et moi Lézard longue langue, 

que viens-tu faire ? 

Je suis sorcière, j'ai appris les tours de magie et je viens les expérimenter ! 

Ouf ! Je l'ai dit, et sans bafouiller, pense t-elle. 

Des tours de magie ? Quésako ? Demande l'animal à bosse. 

A quoi sert la magie ? Ca se mange ? Ca se boit ? 

Euh ! Non ! Mais c'est très utile, je dirais même indispensable. 

Ah ! Bon ! Dit le renard, montre-nous ! 

Bien, je vais te transformer en, en, en poisson ! 

Chafouri, Chafoura 

Un poisson deviendras, 

Chafouri, Chafoura 

Un poisson   tu seras ! 

   

Et le fennec ... devenu petit poisson, ouvre et ferme la bouche. 

De l'eau ! De l'eau ! Vite de l'eau ! 

Cafouille s'affole, que faire ? La formule, la formule ! 

Chafouri, Chafoura 

Redeviens, redeviens, 

Chafouri, Chafoura 

Ce que tu étais, tu redeviens ! 

   

Ouf ! Revoilà le renard. 

Tu parles d'un tour de magie ! J'ai failli y laisser la vie ! 

Mais j'en ai d'autres, j'en ai d'autres ! 

Cafouille s'affole , elle ne veut pas perdre si vite ses nouveaux amis. 

Elle n'est pas mauvaise, Cafouille, 

elle fait partie des sorcières gentilles ! 

Elle réfléchit,  réfléchit, que pourrait-elle faire ? 

Si tu es une vraie sorcière, dit le lézard, 

fait venir la pluie, 

ici, il n'y a que cela de vraiment indispensable. 

La pluie, la pluie, on a bien du lui donner la formule magique à l'école, 

voyons, cherchons, mais oui ! 

L'autre jour, une sorcière a fait tomber une averse le jour du grand pique-nique ! 

Tout le monde s'enfuyait en courant, elle ricanait, 

elle avait même déclenché une vraie tempête, 

les parasols volaient, les nappes s'enroulaient autour des arbres, 

elle, elle applaudissait à ce chari- vari ! 

La formule, vite, où est-elle ? 

Peut-être : 

Chafouri, Chafoura 

Le vent soufflera 

Chafouri, Chafoura 

Les nuages, tu emmèneras ! 

Une tornade de sable se lève ! 

Ah ! Non ! Crient les animaux, ici pas de vent s'il te plait ! 

Essayons autre chose : 

Chafouri, Chafoura, 

Gouttes, gouttelettes ! 

Chafouri, Chafoura, 

Des gouttes sur nos têtes ! 

   

Et quelques gouttes : Flic ! Floc ! Tombent sur le sol ! 

Pas mal, pas mal, mais insuffisant... Faut mieux faire..... 

Elle se croit revenu à l'école, peut mieux faire ! 

Un effort, elle va bien y arriver ! 

Chafouri, Chafoura, 

La pluie appelleras 

Chafouri, Chafoura, 

La pluie viendra ! 

   

Un grand silence, tous attendent, 

un nuage gris apparaît, un autre, un autre 

et une pluie fine  vient les rafraîchir. 

Le dromadaire, le fennec, la gazelle et même le lézard, 

tous approchent d'une flaque d'eau 

et viennent se désaltérer. 

Chafouri, Chafoura, 

Avec nous, elle est, 

Chafouri, Chafoura, 

Avec nous, elle restera !

bunni


Qui prend les pots de confiture?

Qui prend les pots de confiture?

A chaque saisons à la ferme  nous allons cueillir des fruits, dans les bois, sur les routes, sur les chemins, lors de grandes balades, avec les enfants.

Nous nous promenons pour la cueillette, par beau temps, ou quand il pleut, nous mettons nos imperméable, nos bottes, sauf en hiver. En hiver, on se balade, mais pas pour la cueillette.

Au fil des jours, sur les étagères de la remise, les pots de confiture, augmentaient, à vue d'oeil. Les pots avaient de jolis formes, on y collait des étiquettes dessus, on y écrivait le goût, et les dates. Chaque pot, était avec un tissu, sur le couvercle , entouré d'un joli ruban. Ce qui rendait les pots de confiture, encore plus beau, plus attirant sous nos yeux, mais aussi bien appétissant.

Quand un jour, la fermière, et le fermier s'aperçurent, que des pots de confiture, manqaient sur létagère, dans la remise!

Oh! Oh! Est-ce-qu'il y aurait un voleur? Ce qui est sure, c'est que quelqu'un nous vole des pots de confiture! Dès qu'on en pose au moins quatre, trois pots de confiture disparaissent, subitement.

Le fermier et la fermière décidèrent, de se réunir avec les enfants dans la grande salle à manger.

Ils leur expliquent la situation. Et puisque ce n'est pas un des enfants qui s'amuse à faire des farces, il vaut mieux ouvrir l'oeil, pour démasquer ce petit voleur, de pots de confiture!

Ce qui amusa les enfants, qui se consultèrent, et ont eu envie de jouer aux petits détectives. Ils commençaient à mettre de la farine partout dans les moindre recoins de la remise, pour voir s'ils découvrent des empreintes, certains se cachait pour voir qui rentre dans la remise, et d'autres prirent des notes. Le fermier et la fermière étaient au courant, parce que les enfants leur avaient parler de se qu'ils voulaient faire, pour démasquer le voleur, et il leur fallait un peu de matériel. Comme de la farine, du papier, un crayon, et qu'ils surveilleraient aussi la remise. Le fermier et la fermière étaient tout à fait d'accord, à la condition, qu'ils n'oublient pas leurs corvées, et leurs devoirs d'école. Bref le terrain d'entente était trouvé entre le fermier,  la fermière, et les enfants.

A la fin de la semaine, très tôt le matin, le coupable était pris au piège, on la suivit à la trace il était plein de farine, et derrière la remise, une famille de raton laveur, qui étaient là, à manger les pots de confiture. Seulement, deux de ces cinq ratons laveurs n'avaient pas l'air d'allés bien du tout . Forcement il  y a eu un petit abus de confiture. Le fermier, pris chez lui les deux petits ratons laveurs et les soigna, ils étaient guérit, et les ratons laveurs, trouvèrent de la nourriture dans des grand bol, pour se nourrir, régulièrement, derrière la remise. Quand aux autres pots de confiture, il y en avait tellement, qu'on en donna aux voisins, et on en a fait cadeau, à des enfants qui fêtaient leurs anniversaire!

T'aime la confiture? Moi celle que je préfère c'est la confiture d'abricot. Et si tu prenais une belle tranche de pain, tu demande à ton papa ou ta maman de la réchauffée au four, et tu vas te régaler à étaler la confiture dessus, et surtout à manger ta tartine de confiture. Le matin avec un bon bol de chocolat au lait chaud ou froid, c'est trop miam, miam!!! Essaie!!!



bunni


L'origine des contes

Un jour, l'araignée, tissant sa toile, trouva dans les airs une branche d'un arbre inconnu qui pendait du ciel. Elle allongea le fil, l'étira, tant et si bien qu'elle prit appui sur cette branche et atteignit le ciel.

L'araignée explora les nuées...

Vaste monde !

Une araignée n'est pas une bête courageuse. Elle s'arrêta auprès de la première caverne quelle rencontra. Cette caverne était habitée par un génie, et comme la bête mourait de faim, le génie lui donna une ample provision de manioc que la goulue dévora dans la nuit.

Le lendemain, comme elle se disposait à redescendre sur la terre, l'araignée vit que le vent avait arraché sa toile.

Pleurs et cris ! Le génie entendit ses lamentations, et pitoyable lui dit :

-Nous allons attacher une corde à la branche qui t'a aidée à monter. Tu te laisseras glisser le long de cette corde qui, à longueur de jour, contient un noeud. Tu as à faire un long chemin de descente. Prends ce petit sac...Il contient de la nourriture. A chaque noeud que porte la corde, tu pourras te reposer et te restaurer.

-Merci, dit l'araignée. Et si tu me donnais aussi ce canari .

Elle montrait, dans un coin de la grotte, un petit pot de terre cuite, devant lequel le génie se précipita en criant :

-N'y touche pas !

-Je ne pensais qu'il contenait de l'eau pour ma soif, dit l'araignée.

-Que contient-il...?

-Il est plein de choses qui ont peut-être une certaine valeur, mais qui ne désaltère pas les araignées !

Et le génie s'en fut, après avoir fait à l'araignée ses recommandations :

-Tu prendras aussi avec toi ce tam-tam. Quand tu seras arrivée sur terre, tu frapperas un grand coup, pour faire résonner la peau. Et alors moi, je remonterai la corde.

Intriguée par ce canari bien fermé, l'araignée restée seule préféra l'emporter sur la terre, plutôt que de se charger de nourriture.

Elle commença sa descente. Il lui fallut un jour pour atteindre le premier noeud...deux jours pour arriver au second...trois pour parvenir au troisième.

Une corde longue comme plusieurs jours sans pain !

L'araignée, mourant de soif, avait à peine la force de s'accrocher de toutes ses pattes à la corde.

Souvent, elle pensa tout lâcher. Mais les araignées tiennent à la vie, et celle-ci défendait la sienne en essayant de toucher terre le plus vite possible.

Elle arrivait à moins d'un jour du sol, quand des singes qui jouaient à lancer des pierres heurtèrent le tam-tam qui sonna !

Ce son monta vers le ciel.

"Voilà cette sotte bête arrivée sur terre", pensa le génie.

D'un coup brusque il remonta la corde, et celle-ci se cassa.

L'araignée tomba...et le canari ...

L'araignée se brisant... le canari aussi.

Ce canari était rempli jusqu'aux bords des contes qui s'étaient perdus. Ils se répandirent...

En trouve qui sait dans la Grande Brousse. Il y en a un peu partout...

bunni


Le lièvre et le Grand Génie de la brousse

Un jour le lièvre s'en alla trouver le Grand Génie de la brousse et lui dit :
-O Grand Génie ! Toi qui veilles sur tous les habitants de la brousse, Toi qui est le Maître des Maîtres, je veux te demander quelque chose.
-Quelle chose ?
-Une seule chose : c'est que tu augmentes la puissance de ma cervelle.
-Et pourquoi faire ?
-Pour que j'ai plus d'esprit que toutes les autres bêtes de la brousse.
Le Grand Génie réfléchit et dit :
-Je veux bien, mais il faut, auparavant, que tu me montres ce que tu es capable de faire. Emporte cette gourde et emplis-la de petits oiseaux ; prends cette calebasse et emplis la de lait de biche ; emporte aussi ce bâton et va chercher un serpent aussi long que lui. Quand tu reviendras avec la gourde pleine de petits oiseaux, la calebasse pleine de lait de biche, et le serpent aussi long que le bâton, alors je verrai ce que je puis faire pour toi.

Le lièvre partit, encombré de sa gourde, de sa calebasse et de son bâton. Après avoir trotté quelque temps, il vint s'allonger auprès d'une source à laquelle beaucoup d'animaux venaient boire, le soir, au coucher du soleil. Là, il se tint tranquille, et il se mit à penser, à penser et à penser encore jusqu'au moment où le soleil commença à descendre pour disparaître.
Et voilà que les petits oiseaux de la brousse arrivèrent en grand nombre. Et tous ces oiseaux de sautiller, de boire, de chanter, de jouer, de voler, de se rouler et de voleter encore.
Le lièvre se dit :
-Aujourd'hui je vais voir de quoi je suis capable !
Et, sortant de son coin, il commença à sauter à droite, à gauche, en avant, en arrière, en criant de toutes ses forces :
-Non ! Non !... Jamais !... Ce n'est pas possible en vérité !... Comment peut-on croire une chose pareille !... Non, non et non !... Ils ne sont pas assez nombreux pour ça.
Les oiseaux, arrêtés tout droit sur leurs deux pattes, et fort étonnés, l'appelèrent :
-Lièvre ! Que dis-tu ?... Mais que dis-tu donc ?
-Oh ! N'en parlons pas !... il s'agit d'une chose tout à fait impossible...
-Mais quoi donc ?
-Quelqu'un m'a raconté que vous pourriez entrer dans la gourde que voici et la remplir ! Mais je sais bien que c'est tout à fait impossible : vous n'êtes pas assez nombreux pour ça !
-Tu plaisantes, lièvre, s'écrièrent les oiseaux. Vraiment, lièvre, tu plaisantes !
Et ils riaient, tout en sautillant autour du lièvre, et en chantant :
-Nous pouvons la remplir tout entière... Tout entière nous pouvons la remplir !
Le lièvre, sans remuer, dit :
-Non en vérité, non, vous ne pouvez pas !
-Ah nous ne pouvons pas, reprirent les oiseaux mécontents de voir leur parole mise en doute. Attends un peu et tu vas voir !
Un premier oiseau entra par le goulot, puis un second et un troisième, et tant et tant qu'à la fin la gourde fut pleine.
Alors, le malin bondit sur la gourde, la ferma solidement avec un bouchon, et la cacha dans un coin.

A ce moment une biche arrivait pour boire à la source. Et notre lièvre de recommencer à sauter à droite, à gauche, en avant, en arrière, en criant de toutes ses forces :
-Non ! Non !... Jamais !... Ce n'est pas possible en vérité !... Comment peut-on croire une chose pareille !... Non, non et non !... Elle n'a pas assez de lait pour ça.
La biche étonnée , s'arrêta sur ses quatre pattes, le regarda et l'appela :
-Lièvre, que dis-tu ?... Mais que dis-tu donc ?
-Oh n'en parlons pas !... Il s'agit d'une chose tout à fait impossible...
-Mais quoi donc ?
-Quelqu'un m'a raconté que vous pourriez emplir de votre lait la calebasse que voici. Mais je sais que c'est tout à fait impossible : vous n'avez pas assez de lait pour ça.
-Tu plaisantes lièvre ; vraiment, tu plaisantes !
Et la biche de rire, tout en sautant autour du lièvre en chantant :
-Je puis l'emplir tout entière... tout entière je puis l'emplir !
Mais le lièvre secoua ses oreilles et dit :
-Non, en vérité, vous ne pouvez pas !
-Ah je ne puis pas, dit la biche fâchée d'être ainsi démentie. Attends un peu et tu vas voir !
elle s'installa au dessus de la calebasse, et le lait coula, coula, coula tant et tant que bientôt la calebasse fut remplie.
-J'ai perdu mon pari, dit le lièvre. Mon cousin le lion avait raison quand il m'affirmait que vous donnez plus de lait que la vache. Et je m'en vais le lui dire de ce pas.
-Le lion ? demanda la biche. Et elle tremblait déjà de frayeur.
-Mais oui, le lion... il est là, tout près... attendez-moi je reviens avec lui.
-Adieu lièvre dit la biche en bondissant dans la forêt, je verrai le lion une autre fois.
Content de s'être débarrassé si facilement de la biche, le lièvre ferma soigneusement la calebasse pleine de lait et la porta auprès de la gourde pleine de petits oiseaux.

Bientôt un serpent arriva pour se désaltérer à son tour.
Dès qu'il le vit, le lièvre commença à marcher le long du bâton en comptant ses pas et en criant de toutes ses forces :
-Deux pas... Trois pas... Quatre pas... Non ! Non ! Jamais... Cinq pas... Ce n'est pas possible en vérité !... Six pas... Comment peut-on croire une chose pareille !... Sept pas... Non, non et non ! Il n'est pas assez grand pour ça.
Le serpent s'arrêta, tout surpris, se dressa tout droit sur sa queue, regarda la lièvre et l'appela :
-Lièvre, que dis-tu ? Mais que dis-tu donc ?
-Oh n'en parlons pas !... Il s'agit d'une chose tout à fait impossible...
-Mais quoi donc ?
-Quelqu'un m'a raconté que vous étiez aussi long que le bâton que voici. Mais je sais bien que vous n'êtes pas aussi grand que ça !
-Tu plaisantes, lièvre, s'écria le serpent. Vraiment tu plaisantes !
Et il se mit à ricaner, et à ramper dans l'herbe, tout en sifflant :
-Je suis aussi long que le bâton... Aussi long que le bâton, je suis !
Mais le lièvre secoua ses deux oreilles et dit :
-Non, en vérité, non, vous ne l'êtes pas !
-Ah tu crois cela, dit le serpent furieux d'être pris pour un menteur. Et bien je vais me mettre à côté et tu verras que je suis aussi grand que lui. Et le serpent de s'allonger tout contre le bâton.
Notre malin lièvre fit un bond, attacha le serpent au bâton, un lien à la tête, un lien à la queue, et il serra si bien que le serpent ne pouvait plus bouger.

Alors notre lièvre pris la gourde, la calebasse et le bâton et il partit trouver le Grand Génie de la brousse.
-Grand Génie ! appela-t-il.
-Me voici, lièvre. Je t'attendais.
-Regarde, Grand Génie, voilà la gourde pleine de petits oiseaux, la calebasse pleine de lait de biche, et le serpent long comme le bâton.
Le Grand Génie regarda tout cela, regarda la lièvre, lui toucha le front et lui dit :
-En vérité, si j'augmentais la puissance de ton esprit, je ferais une grande sottise.
-Et pourquoi ? demanda le lièvre.
-Tu es assez rusé comme cela ! Si tu l'étais d'avantage, tu deviendrais mon maître.


A. Davesne et J. Gouin

bunni

#409

Comment le chameau acquit sa bosse

Et voici l'histoire suivante qui raconte comment le chameau acquit sa bosse.

Au commencement des temps, quand le monde était tout neuf et tout et tout, et que les animaux commençaient juste à travailler pour l'homme, il y avait un chameau qui vivait au milieu du désert Hurlant car il ne voulait pas travailler, d'ailleurs c'était un Hurleur lui-même. Alors il se nourrissait des bouts de bois, de tamaris, de plantes grasse et de piquants d'épine, avec une douloureuse paresse; et lorsqu'on lui adressait la parole, il répondait : "Bof ! " simplement "Bof" et rien d'autre.

Alors le cheval vient le trouver le lundi matin avec une selle sur le dos et un mors dans la bouche, et il lui dit :

-Chameau, ô chameau, viens donc trotter comme nous tous !

-Bof ! dit le chameau.

Et le cheval s'en fut le répéter à l'homme.

Alors le chien vint le trouver avec un bâton dans la gueule et lui dit :

-Chameau, ô chameau, viens donc chercher et rapporter comme nous tous !

-Bof ! Dit le chameau.

Et le chien s'en fut le répéter à l'homme.

Alors le boeuf vint le trouver avec son joug sur la nuque et il lui dit :

- Chameau, ô chameau, viens donc labourer comme nous tous !

- Bof ! Dit le chameau.

Et le boeuf s'en fut le répéter à l'homme.

A la fin de la journée, l'homme convoqua le cheval, le chien et le boeuf, et leur dit :

-Vous Trois, ô vous Trois, je suis navré pour vous avec ce monde tout neuf et tout ce qui s'en suit, mais cette chose qui dit bof dans le désert est incapable de travailler sans cela, elle serait déjà ici. Je vais donc la laisser en paix et vous devrez travailler deux fois plus pour la remplacer.

Cela mit les Trois très en colère, avec ce monde tout neuf et tout ce qui s'en suit. Ils tinrent conseil à la limite du désert, ils discutèrent, ils palabrèrent....Le chameau arriva en mâchant des herbes, et plus que jamais dans une oisiveté mortelle. Il se moqua d'eux, et rit en les regardant puis il dit "bof" et repartit.

C'est alors qu'arriva le génie responsable de tous les déserts, enroulé dans un nuage de poussières, et il s'arrêta pour discuter avec le cheval, le boeuf et le chien.

-Génie de tous les déserts, dit le cheval, et bien est il juste qu'une créature soit paresseuse dans ce nouveau monde avec tout ce qui s'en suit ?

-Certainement non, répondit le génie.

-Et bien ! dit le cheval, il y a quelqu'un, au beau milieu de ton désert Hurlant, quelqu'un avec un long cou et de longues jambes qui n'a rien fait depuis ce matin et qui refuse de trotter.

-Hou ! Dit le génie en sifflant. Mais c'est mon chameau, par tout l'or de l'Arabie ! Et que dit-il quand on lui parle de ça ?

-Il dit "bof", dit le chien. Et il ne veut pas aller chercher ni rapporter.

-Et...dit-il autre chose ?

-Seulement "bof" dit le boeuf. Et il ne veut pas labourer.

-Très bien dit le génie. Je vais le "boffer" comme il faut, si seulement vous voulez bien attendre une minute !

Le génie s'enveloppa dans son manteau de poussière, survola le désert et trouva le chameau, toujours dans l'oisiveté la plus mortelle, qui regardait son propre reflet dans une flaque d'eau.

-Mon cher faiseur de bulles, dit le génie, qu'est-ce que j'entends dire à ton sujet ? Il paraît que tu ne travailles pas, dans ce monde tout neuf et tout ce qui s'en suit ?

-Bof ! Dit le chameau.

-Si j'étais toi, je ne répéterais pas ça, dit le génie : tu pourrais le dire une fois de trop ! Faiseur de bulles, je veux que tu travailles !

Alors le chameau dit encore une fois :

-Bof !

Mais à peine l'avait-il dit qu'il vit son dos, dont il était si fier, s'enfler, s'enfler et devenir une grosse bosse ballante.

-Tu vois ça ? Dit le génie. C'est ton propre "bof" que tu t'es mis sur le dos en refusant de travailler. Nous sommes aujourd'hui jeudi, tu n'a rien fait depuis lundi, quand le travail a commencé...A présent, tu vas te mettre à l'ouvrage.

-Mais comment le pourrais-je maintenant avec cette "bof" sur le dos ?

-C'est fait exprès, dit le génie, parce que tu as manqué ces trois premiers jours. Dorénavant, tu seras capable de travailler trois jours pleins sans manger, parce que tu vivras sur ton "bof". Tu ne diras pas que je n'ai rien fait pour toi ! Maintenant sors du désert, va rejoindre les Trois et tâche d'apprendre à te conduire. En route !

Alors le chameau se mit en route, avec son "bof" sur le dos et tout ce qui s'en suit, et il s'en fut rejoindre les trois.

Depuis ce jour-là, il porte toujours un bof sur le dos, mais il n'a jamais rattrapé les trois jours de travail qu'il a manqués au commencement du monde, et il n'a jamais pu apprendre à se conduire.

bunni


UN tout petit jardin

Au coeur d'une grande cité aux maisons grises, hautes et serrées, se nichait un jardin abandonné. Il semblait tout échevelé d'herbes et de fleurs parfumées.
Les chenilles s'y faufilaient, les papillons y dansaient, les escargots venaient y flâner, les abeilles y faire leur marché, les coccinelles s'y cacher, les libellules y boire à petites gorgées aux fraîches gouttes de rosées et les oiseaux y papoter ...
Dans ce minuscule jardin ignoré des autres gens de la cité, Pim et Pomme venaient s'amuser. Ils jouaient parfois au ballon en fredonnant des chansons .... Ils tissaient des colliers de fleurs, se racontaient les petits malheurs et les plaisirs de leur journée ... Ce qu'ils aimaient par-dessus tout, c'était partager des secrets, en chuchotant, sans faire de bruit quand, doucement, le soleil fuit, derrière les feuilles, en fin d'après-midi ...

Un jour, à l'ombre d'un saule pleureur, ils découvrirent une drôle de fleur. Elle avait une tige longue, une curieuse tête ronde, une collerette un peu fripée mais elle n'était parée d'aucun pétale de couleur ! On aurait dit qu'elle avait oublié de s'habiller et dormait d'un sommeil profond ... Afin de la réveiller, Pim et Pomme se mirent à chanter :

Debout ! Debout ! Petite sotte !
Tu ronfles comme une marmotte ...
Le printemps est arrivé !
Il faudra bien te lever
et danser pour le saluer !

Aussitôt, l'étrange fleur bondit et tout étonnée, elle dit :

-Poil de cactus et poil de géranium ! Où est donc passée ma couronne ?

Ses cheveux étaient dressés sur sa tête en une curieuse houppette, Pim et Pomme riaient aux éclats :

-Ta couronne ? Que racontes-tu là ?

La petite fleur se fâcha :

-Figurez-vous que je suis roi ! L'été dernier, j'étais vigoureux et fort avec ma crinière d'or ... Les fleurs m'ont élu souverain de ce jardin. Elles m'ont même donné un nom : je suis le fameux " Dent-de-Lion " ! Mais l'hiver m'a déplumé... Il m'a tout ratatiné !

-Il n'est ni roi, ni rien du tout ! cria quelqu'un tout à coup. Son vrai nom c'est " Pissenlit !" Et si vous le cueillez, vous ferez pipi au lit .... Hi ! Hi ! Hi !

Pim et Pomme s'élancèrent, furieux, vers Thomas qui se moquaient d'eux. Ils voulurent le persuader que ce végétal bizarre, pas très joli mais très bavard, pouvait être extraordinaire ... Mais Thomas se mit en colère !

-C'est un vulgaire pissenlit qui ne vaut même pas un radis !

Alors, les trois enfants commencèrent à se disputer, à s'envoyer des coups de pieds, à se tirer les oreilles et le nez ...
Soudain le pauvre Thomas trébucha .... Il pleura de rage et cria :

-Dent-de-Lion est un porte-malheur ! D'ailleurs, votre jardin abandonné va très bientôt être rasé ... Vous n'aurez plus d'endroit pour jouer seuls ni pour chuchoter des secrets ! Il ne vous restera que le trottoir pour raconter vos histoires ...

Il essuya ses larmes avec son mouchoir, renoua ses baskets et partit le coeur gonflé de jalousie.
Pim et Pomme voulurent le rappeler afin de se réconcilier avec lui, mais le moteur d'une énorme tondeuse à gazon faisait déjà trembler les maisons. Les enfants retrouvèrent Dent- de- Lion dans une drôle de position : les feuilles pendantes et froissées, la tête toute ébouriffée ...

-Vite ! cria le petit roi. N'hésitez pas à souffler sur moi ! Dispersez mes cheveux transparents ... Mes graines s'envoleront au vent ... Qui sait où elles repousseront ?

Le temps passa ... Et chaque fois que la tondeuse vrombissait, le jardin rapetissait ! Il n'y eut bientôt à sa place qu'un grand espace vide et nu. Seul, un recoin tout riquiqui avait échappé comme par magie à cette espèce de folie coupeuse, grondeuse et ratisseuse ...
Pim et Pomme entendirent raconter qu'on allait bientôt édifier des immeubles et des maisons entre lesquels ne pousseraient que de maigres touffes de gazon. Les deux enfants se désolaient. Il n'y avait plus que le trottoir pour se raconter des histoires et pour jouer au ballon.
Soudain, par une fente du pavé ils entendirent crier :

-Coucou ! C'est moi .... Dent-de-Lion, le petit roi ! Je pousse où l'on ne m'attend pas. Vite ! Vite ! Cachez-moi afin que l'on ne me découvre pas !

Pim et Pomme emportèrent la fleur, tendrement serrée contre leur coeur. Ils la déposèrent près des poubelles où, même quand la nuit est belle, il ne vient jamais personne ...
Là, le petit souverain prit la situation en main. Il rassembla les dernières fleurs et leur dit :
-Chardons, pensées ou pissenlits, nous sommes tous dans le même pétrin : on nous a volé notre jardin ! Réveillez donc les papillons ! Et bousculez les escargots ... Prévenez aussi les abeilles, les chenilles et les vermisseaux ... Je veux qu'ils poussent ces bouts de fer, ces vieilles boîtes de conserve, ces détritus et ces boulons dans le moteur de la tondeuse à gazon ! Qu'elle en étouffe ! Qu'elle craque ! Et qu'elle en soit toute patraque ...

Au matin, Dent-de-Lion, courageux, s'en fut s'asseoir dans le jardin presque tout rasé où il ne restait plus que quelques herbes dressées dans l'air tout illuminé d'une fine brume rosée. Quand le jardinier appuya sur le bouton de l'énorme tondeuse à gazon, la machine toussa, s'étrangla, sursauta, rugit et cracha. Elle avança en vrombissant, hoquetant, grinçant et vibrant jusqu'au pied du pissenlit tout tremblant ... Puis, brusquement, s'arrêta, souffla et se tut d'un seul coup.
Les fleurs s'écrièrent :

-Hourra ! Vive Dent-de-Lion, notre roi ! C'est vraiment lui le plus malin ... Il a sauvé notre jardin !

Pim et Pomme accoururent, heureux ... Même, Thomas s'était joint à eux ! Il ne pouvait en croire ses yeux et ne se sentait plus jaloux ! Ce bout de rien du tout serait le coeur de la cité. Ensemble, ils pourraient y jouer, s'y raconter des secrets, courir après les papillons ou même jouer au ballon.
Alors, les habitants du quartier se penchèrent à leur fenêtre. Ils songèrent que des enfants et des petites fleurs des champs, c'était plus joli que des immeubles et des murs gris. Ils décidèrent de protéger le minuscule jardin secret, d'y laisser pousser les chardons, les pensées et les dent-de-lion.

C'est ainsi que le pissenlit demeura parmi ses amis. Il y est encore aujourd'hui ... Quand le vent d'hiver le déplume, parfois, il tremblote et s'enrhume. Mais à chaque printemps il repousse entre les herbes et les mousses. Chacun peut alors voir éclore sa radieuse couronne d'or.



bunni


Elfes et fées du lac de Joux

Au temps jadis, alors que dans toutes les régions de notre pays, les hommes œuvraient et défrichaient, elfes et fées s'étaient réfugiés en un lieu qu'ils avaient rendu inaccessible. C'était une haute vallée entourée d'une ceinture de montagnes hérissées de forêts enchevêtrées. Là, dans un décor charmant, un lac ravissant clapotait, tandis que, sur ses rives, fleurissait un éternel printemps.
Il y croissait les fleurs les plus délicates, aux couleurs irisées. Les elfes, tout menus et gracieux, voltigeaient d'une corolle à l'autre, en compagnie de papillons bigarrés. Les fées, aux longues robes diaprées, dansaient sur l'eau les soirs de clair de lune, au son d'une musique harmonieuse et légère. Flora lyse, la reine des fées, régnait sur ce domaine enchanté.
Or, un jour que tout ce petit monde s'ébattait joyeusement, une biche survient, hors d'haleine.
-Alerte! Les forêts vont s'ouvrir et les hommes envahiront votre royaume! Aussitôt on l'entoure. Les questions pleuvent:
-Quand? - Comment? - Pourquoi? - Les hommes, merci ! On se passe de leur société! La reine Flora lyse saura bien lancer aux alentours des sortilèges qui empêcheront leur intrusion! Toutefois, elle, qui vient de discourir longuement avec la biche, secoue gravement la tête. Non, aucune magie ne pourra agir en l'occurrence: ceux qui projettent de venir dans la vallée sont des moines. Dieu les protège.
-Dans ce cas, remarque Prunet, l'elfe aux ailes violettes, ils ne nous feront pas de mal! - Non, certainement pas, admet la reine. Mais en abattant une partie des forêts, ils ouvriront un passage aux vents et aux l'hiver pénétrera derrière eux. Puis, peu à peu, d'autres hommes viendront et s'établiront sur nos rives. qu'allons-nous devenir? disent les elfes en s'asseyant par terre, prêts à pleurer.
-Ne commencez pas à pleurnicher, protestent Luciole et Myrtille, les fées qui vivent à la lisière des bois. Si les hommes sont vraiment trop rudes pour le petit peuple que nous sommes, nous nous retirerons au fond du lac, voilà tout! Qu'en pense notre gracieuse souveraine?

-La première chose à faire, décide Floralyse, en dressant fièrement sa tête mignonne couronnée de fleurs d'or, est d'envoyer des messagers qui, à leur insu, observeront les hommes s'apprêtant à envahir notre vallée. S'ils se révèlent moins frustes que nous le supposons, il y aura peut-être possibilité de communiquer avec eux.
-Et si ce sont des rustres? interroge Liseron, le fragile elfe bleu à la voix cristalline.
-Dans ce cas, comme l'ont dit Luciole et Myrtille, il faudra nous résoudre à disparaître dans les demeures souterraines où nous créerons un palais qui abritera fleurs rares, insectes trop fragiles, oiseaux et animaux désirant nous accompagner dans notre exil.
Sans tarder davantage, le petit peuple commence ses investigations. Liseron et Prunet, les plus hardis parmi les elfes, se proposent comme observateurs. L'un quitte la vallée guidé par un rouge-gorge, l'autre s'en va dans la direction opposée, accompagné d'une abeille expérimentée.
Ils reparaissent le lendemain, épuisés de fatigue et stupéfaits de ce qu'ils ont vu et entendu. Elfes et fées les écoutent, consternés, tandis qu'ils présentent leurs rapports à la reine Floralyse.
-Hélas! Majesté, annonce Prunet, à mon avis, nous ne pouvons cohabiter avec les hommes. Jamais ils ne nous comprendront. Ils ne savent ni voir, ni entendre ce que la nature leur dispense, et cherchent le bonheur je ne sais où, sans remarquer toutes les joies qu'ils ont à leur portée.
-J'ai chanté pour eux mes plus douces mélodies, se désole Liseron, personne n'y a pris garde.
-J'ai dansé dans un rayon de lune et nul ne l'a remarqué, s'indigne Prunet.

-Comment est-ce possible! murmurent tous les assistants. En êtes-vous sûrs?
-Je crois, dit alors la reine Floralyse, que ces faits sont tristement exacts. Toutefois, avant de prendre une décision, je vais tenter quelques expériences et me rendre en personne sur les lieux. Que l'on amène mon char volant!
Anxieux, le petit peuple voit s'éloigner sa souveraine, dans un pétale de rose traîné par des libellules. Heureusement, elle ne tarde pas à reparaître.
-Non, crie-t-elle avant même d'atterrir, ne nous mêlons pas à de pareilles gens. J'ai fait éclore pour eux des fleurettes exquises et ils les ont foulées aux pieds. Vite, au travail, quittons la surface de la terre!
Lorsque les hommes arrivèrent à la vallée qu'ils nommèrent « Joux » à cause de ses forêts, le petit peuple vivait heureux dans un palais souterrain dont on voit toujours les orifices. Le rocher qui émerge parfois dans le lac n'est autre que le sommet de sa tour.

bunni

#412

Conte du Rayon-de-soleil et du Papillon-haut-dans-le-ciel

Il était une fois, dans la douceur et le parfait épanouissement d'un été de juillet, un papillon voletant au gré du vent, sous le regard complice du soleil. Il volait haut dans le ciel, plus haut que n'importe quel autre papillon. Il voulait voir ce qui se cachait par delà les nuages. Sa grâce éthérée et ses couleurs chatoyantes attirèrent l'attention d'un Rayon-de-soleil. Ébloui par la danse aérienne de ce petit insecte éphémère, mais si plein de vie, le timide rayon en tomba profondément amoureux. Ne sachant comment lui exprimer l'ardeur de ses sentiments, il se mit à briller plus fort. Il baigna de lumière le papillon qui volait, volait haut dans le ciel, pour atteindre les nuages. Il l'illumina de toute sa tendresse, l'éclaira de sa passion.
Le Rayon-de-soleil n'avait d'yeux que pour le Papillon-haut-dans-le-ciel. Il lui envoyait chaque jour davantage de lueur et de chaleur, en hommage à ses ailes enchanteresses et à la beauté de sa danse. Il scintilla et flamboya tant et si bien, que sa flamme en devint insupportable. Aveuglé par son amour, le Rayon-de-soleil ne se rendit pas compte qu'il brûlait les ailes du Papillon-haut-dans-le-ciel. Celui-ci, blessé, ne put poursuivre son vol. Il tomba.
Dans sa chute, il vit les nuages s'éloigner, et son cœur se brisa de chagrin devant ce rêve qu'il n'atteindrait jamais. Il allait s'écraser au sol quand le vent, le prenant en pitié, se mit à souffler et le déposa en douceur dans l'herbe verte.
Lorsqu'il vit le papillon qu'il aimait tant tomber, les ailes en feu, le Rayon-de-soleil hurla de peur et de chagrin. Et quand il réalisa que, par sa faute, il ne volerait plus jamais, le rayon se cacha derrière les nuages.
Ivre de douleur et de culpabilité, il pleura.
Il pleura longtemps.
Quand enfin ses larmes se tarirent, il sortit de sa cachette vaporeuse. Sa première pensée fut de trouver le papillon, pour lui demander pardon. Mais lorsqu'il regarda vers la Terre, le Rayon-de-soleil découvrit que le Papillon-haut-dans-le-ciel, qui avait fait battre son cœur, avait disparu. Il partit à sa recherche.
Il ne le retrouva jamais.

En son absence, l'hiver arriva. Le monde sombra sous la torpeur du froid. Puis, un jour, résigné et le cœur gros, le Rayon-de-soleil reprit sa place dans le ciel. L'été revint et réveilla la vie trop longtemps endormie. L'herbe redevient verte, les fleurs ouvrirent leurs corolles et les insectes bourdonnèrent dans les airs. Et, parmi eux, de petits papillons volant de fleurs en fleurs. Parfois, ils volaient haut dans le ciel, pour voir ce qui se cachait derrière les nuages.
À leur vue, le Rayon-de-soleil versa des larmes de joie. Il retrouvait un peu de celui qu'il avait tant aimé dans les couleurs chatoyantes, et les battements d'ailes gracieux. Désireux d'expier sa faute, il se fit un devoir de les protéger, pour que leurs courtes vies ne connaissent jamais que la douceur et la volupté. Les papillons reconnurent en lui un ami. Ils ne se montrèrent plus que s'il était présent pour veiller sur eux.
Depuis ce jour, le Rayon-de-soleil berce d'une lumière suave et légère le vol des papillons, en souvenir de celui qui cherchait à voir au-delà des nuages. Et sa seule présence suffit à les attirer dans les airs et à les faire danser, haut, très haut dans le ciel.


bellparole




Le berger aux yeux d'étoiles

Il était une fois un roi si puissant que chaque fois qu'il éternuait tous les habitants du royaume devaient dire: «A vos souhaits! Dieu vous bénisse!»
Quand il était enrhumé, on n'entendait pas d'autres mots à travers son royaume que «A vos souhaits! Dieu vous bénisse!»
Tous faisaient ainsi excepté le berger aux yeux d'étoiles. Le roi ayant eu vent de cela, se mit en colère et fit appeler le berger. Celui‑ci se présenta devant le roi qui se tenant sur son trône était très furieux.

«Dis tout de suite: A mes souhaits! Dieu me bénisse!» cria-t-il.
«A mes souhaits! Dieu me bénisse!» dit le berger aux yeux d'étoiles.
«A moi, à moi, misérable que tu es!» cria le roi.
«A moi, à moi, Majesté!» répondit le berger.
«Mais à mes souhaits, aux miens! Dis immédiatement: A vos souhaits! Dieu vous bénisse, Votre Majesté!» hurla à pleins poumons le roi, hors de lui.
«Quoi qu'il arrive, moi, je ne le dirai pas tant que je n'épouserai pas la Princesse», riposta le berger.

La Princesse, elle-même, se trouvait dans la pièce, et se tenait assise sur un petit trône. Elle appréciait beaucoup ce courageux berger cependant elle ne fit pas entendre qu'elle ne l'épouserait pas.
Par contre, le roi, pris d'une colère noire, ordonna aussitôt que le berger soit emprisonné dans la cellule de l'ours blanc.
Les soldats le saisirent et s'exécutèrent. Mais quand l'ours aperçut les yeux d'étoiles du berger, il recula et se recroquevilla dans le coin opposé de la cellule. Pour rien au monde il n'aurait osé toucher au berger.
Le lendemain, le chambellan vint pour ramasser les os du berger et vit que celui-ci se portait comme un charme. Il reconduisit le berger devant le roi.

«Alors, misérable que tu es! Et maintenant que tu es passé si près de la mort, vas-tu enfin dire:A mes souhaits! Que dieu me bénisse!»

Le berger rétorqua:
«Mais mourir dix fois ne me fait pas peur à moi! Je le dirais à la seule condition que vous me donniez la main de la Princesse.»
«Eh bien, tu vas donc mourir dix fois!»

Le roi ordonna que le berger soit jeté en prison dans la cellule des hérissons géants. Les soldats s'exécutèrent mais dès qu'ils refermèrent la porte, le berger sortit une flûte de la manche de son manteau brodé et joua si bien que les hérissons se mirent à danser bras dessus, bras dessous.

Le lendemain, le chambellan vint voir s'il restait des os. Mais le berger jouait encore de la flûte et les hérissons dansaient toujours. Il n'y avait rien d'autre à faire que de le reconduire devant le roi qui lui dit:
«Alors, misérable que tu es! Maintenant que tu es passé si près de la mort, vas-tu enfin dire : A mes souhaits! Que dieu me bénisse!
-Mais moi, mourir cent fois ne me fait même pas peur! Je le dirais à la seule condition que vous me donniez la main de la Princesse.
-Eh bien, tu vas donc mourir cent fois!» cria le roi dans une immense colère et il ordonna que le berger soit jeté dans un gouffre dont les murs étaient hérissés de faux.

Les soldats se saisirent du berger. Mais avant d'être jeté dans le gouffre aux faux, il les pria de s'écarter un instant pour y jeter un oeil. Peut-être reviendrait-il sur sa décision?

Les soldats sortirent et le laissèrent seul dans le cachot, devant le gouffre. De son côté, il dressa sa masse hérissée de pointes et la déguisa de son manteau brodé et de son chapeau, puis cria aux soldats qu'il ne changerait pas d'avis.
Ceux-ci rentrèrent à nouveau, saisirent la masse habillée du manteau et du chapeau et la jetèrent dans le gouffre pensant qu'il s'agissait du berger alors que celui‑ci s'était caché dans un coin du cachot.

Le lendemain, le chambellan arriva avec sa lanterne et faillit tomber à la renverse en apercevant le berger. Il le reconduisit devant le roi dont la colère ne cessa d'augmenter. Il posa tout de même la question au berger:
«Alors maintenant que tu es revenu du centième cercle de la Mort, vas-tu dire enfin:A mes souhaits! Dieu me bénisse!»

Mais le berger répondit sèchement:
«Je ne le dirais pas tant que vous ne me donnerez pas la main de la Princesse!»

Le roi finit par comprendre qu'il n'arriverait pas à tuer le berger et fit atteler le carrosse royal. Le berger prit place à ses côtés et le roi donna l'ordre d'être conduit dans la Forêt d'argent.

Une fois arrivé, il dit au berger:
«Vois-tu cette Forêt d'argent? Je te la donne si tu dis:A mes souhaits! Dieu me bénisse!»

Mais le courageux berger s'entêta et donna la même réponse:
«Je ne le dirais pas tant que vous ne me donnerez pas la main de la Princesse!»

Le roi donna l'ordre d'être conduit au Château d'or.
Une fois arrivé, il dit au berger:
«Vois-tu ce Château d'or? Je te l'offre ainsi que la Forêt d'argent pourvu que tu me dises: A mes souhaits! Dieu me bénisse!»

Mais le berger répéta inlassablement:
«Je ne le dirais pas tant que vous ne me donnerez pas la main de la Princesse!»

Ils poursuivirent leur route jusqu'au Lac de diamant. Le roi dit:
«Vois-tu ce Lac de diamant? Je te l'offre ainsi que le Château d'or et la Forêt d'argent pourvu que tu me dises: A mes souhaits! Dieu me bénisse!»

Mais le berger répéta sans cesse:
«Non, non, je ne le dirais pas tant que vous ne me donnerez pas la main de la Princesse!»

Le roi finit par comprendre qu'il n'y avait rien à tirer du berger. Il poussa un grand soupir et dit:
«Sacrebleu! Je te donne la main de ma fille mais alors dis-moi tout de suite: A vos souhaits! Dieu vous bénisse!»
«Bien sûr, bien sûr, je vous le dis! Pourquoi je ne le ferais pas?»

Le roi s'en réjouit et annonça à tous les habitants du royaume que sa fille allait se marier. La Princesse, qui avait éconduit tant de prétendants, était désormais la plus heureuse au monde car elle était tombée sincèrement amoureuse du berger aux yeux d'étoiles.

Ils donnèrent un si grand repas de noces que tout le pays buvait, mangeait et dansait. Mais c'est au palais royal que fut célébrée la plus belle fête, que se joua la meilleure musique et que l'on servit les meilleurs plats.

Quand le garçon d'honneur présenta la tête de porc au raifort, le roi plaça le plat devant lui pour le partager, comme il se doit avec tous les invités, quand soudainement l'odeur du raifort le fit éternuer:
«A vos souhaits! Dieu vous bénisse!» cria le premier le berger. Le roi s'en réjouit tellement qu'il tomba de son siège et mourut sur-le-champ.

C'est ainsi que le berger aux yeux d'étoiles devint le roi.
Il devint même un excellent roi qui jamais n'imposait à son peuple de lui présenter ses voeux à contre coeur.
Cependant, tous lui souhaitaient tout le bien possible de tout leur coeur parce qu'il était un très bon roi et tous l'aimaient beaucoup.
Ce qui rend les amitiés indissolubles et double leur charme est un sentiment qui manque à l'amour : la certitude.

(Honoré de Balzac)

bunni

#414

Le petit garçon et la chenille.

Il était une fois un petit garçon, qui recevait toujours pour goûter une brioche et du chocolat, et qui s'en allait aussitôt les manger dans le jardin.  

Dès qu'il s'installait sur le banc, à côté du potager où s'alignaient les carottes, les salades et les choux, une petite chenille verte glissait vers lui et venait manger les miettes de brioche, que l'enfant répandait pour elle, tant il aimait la regarder grignoter et faire onduler son long corps soyeux.    

Quand d'aventure elle ne paraissait pas, doucement il chantonnait:  

Chenille, Petite Chenille,
La table est servie,
Brioche et chocolat,
N'attendent plus que toi!  

Et la petite chenille sortait alors du chou, dans lequel elle habitait, et rejoignait le petit garçon, pour partager son goûter.    

Or, un après-midi qu'il était à l'école, sa maman alla chercher un chou dans le potager, et elle prit justement celui dans lequel la petite chenille avait sa maison. Avec un grand couteau, elle commença à détacher les feuilles, une à une, et se mit à les laver sous l'eau tiède.    

La petite chenille, terrifiée, se cramponna de toutes ses forces à la sienne, mais un tel torrent d'eau se déversa soudain sur elle, qu'elle lâcha prise et tomba au fond de l'évier, où elle tourbillonna, avant d'être engloutie dans la canalisation.    

Le petit garçon, quand il revint de l'école, emporta comme d'habitude son goûter au jardin, et se mit à chantonner:  

Chenille, Petite Chenille,
La table est servie,
Brioche et chocolat,
N'attendent plus que toi!  

Mais il eut beau reprendre et reprendre la chanson, la chenille resta invisible. Fouillant des yeux le jardin, il se mit à chercher le chou dans lequel habitait son amie, mais il ne trouva rien. Le chou avait disparu, il n'en restait que quelques feuilles jaunies, et aucune trace de la chenille...    

Soudain, le petit garçon se rappela la bonne odeur qui l'avait accueilli lorsqu'il était rentré de l'école : cette odeur chaude et enveloppante, ce fumet délicieux, oui, cela sentait le chou! Sa maman avait préparé le chou, mais qu'était devenue la chenille?    

Angoissé, le petit garçon rentra aussitôt à la maison, et se mit à chercher partout, dans le moindre recoin. Mais elle n'était nulle part, et plus il y pensait, plus il se disait qu'elle devait être morte, et aveuglé par les larmes, le cœur broyé comme dans un étau, il se sentit seul, terriblement seul, et il s'assit pour pleurer.    

Sa maman eut beau essayer de le consoler, rien n'y fit. «Se mettre dans un tel état pour une chenille», lui répétait-elle, «n'est-ce pas insensé?  Tu en trouveras une autre, le jardin en est plein», et elle l'embrassa tendrement, persuadée que le lendemain, il aurait oublié.    

Mais les jours passèrent, et le petit garçon pensait toujours à la chenille. Quand elle venait manger avec lui, il grandissait en force et en santé, alors que maintenant, il perdait ses belles couleurs et maigrissait de plus en plus. Un matin, il ne put se lever de son lit, tant il était faible, et le docteur, que sa maman avait appelé, déclara qu'il était très malade, et le petit garçon comprit qu'il allait mourir, et que rien ne pourrait le sauver.    

La nuit suivante, comme il ne trouvait pas le sommeil, il se mit à observer les étoiles qui scintillaient au firmament, et soudain, il lui sembla que l'une d'entre elles bougeait et grossissait, comme si elle venait vers lui. Repoussant ses couvertures, il s'assit dans son lit pour mieux voir, et il s'aperçut qu'une boule lumineuse était entrée par la fenêtre entrouverte. Avec un bruit de clochettes, la boule s'ouvrit et une toute petite femme en sortit, tenant à la main une baguette.    

La fée, car c'en était bien une, s'approcha du petit garçon et lui dit: «Ton amie la chenille n'est pas morte. Elle est blottie dans son cocon, qu'elle a filé comme elle a pu, après avoir été chassée avec les eaux sales dans le talus derrière la maison . Si ta maman le trouve et en prend soin, tu retrouveras ton amie et tu guériras». Elle toucha  alors le cœur du petit garçon de sa baguette, et disparut comme elle était venue, ne laissant derrière elle qu'une traînée de lumière.    

Comme si ses forces lui étaient revenues d'un seul coup, le petit garçon pu se lever, et courir jusqu'à la chambre de sa mère: «Maman», lui dit-il, «il faut que tu ailles chercher la chenille. Elle a construit son cocon sur le talus derrière la maison. Si tu en prends soin, je retrouverai mon amie et je guérirai, la fée me l'a promis!»    

Sa maman, croyant qu'il délirait, et craignant qu'il n'attrape froid ainsi pieds nus sur le sol, le reconduisit dans sa chambre, et à peine le petit garçon fut-il couché, qu'il tomba profondément endormi.  

Dès lors, il ne se réveilla plus. Ses paupières restaient closes, sa respiration légère allait et venait, et un sourire flottait sur ses lèvres, comme s'il faisait un rêve délicieux.    

La mère ne parla à personne de ce qui s'était passé cette nuit-là. Bien qu'elle n'ait pas cru un mot de ce que son petit garçon lui avait dit, elle était si désespérée qu'elle s'en alla tout de même inspecter le talus, derrière la maison. Et à sa grande surprise, elle y trouva un cocon, mal attaché à une brindille, et que le vent aurait tôt fait d'emporter. Emue à la pensée de ce petit être sans défense, dont la vie était suspendue à un fil, si ténu qu'un souffle pouvait le briser, elle détacha la brindille avec précaution et l'emporta avec son précieux fardeau dans la chambre de son fils, où elle l'accrocha solidement à l'une des tentures.    

Les journées et les nuits se succédaient, toutes semblables, et puis un jour, la mère perçut dans le cocon un léger mouvement, et petit à petit, une patte, deux pattes se dégagèrent puis le papillon lui-même apparut, tout recroquevillé, et déploya ses ailes fripées, mais déjà éclatantes de beauté.    

La mère l'observait, émerveillée, quand le papillon s'envola brusquement et vint se poser délicatement sur les lèvres du petit garçon endormi. Et juste à cet instant, comme par enchantement, il ouvrit les yeux, et reconnut son amie la chenille, devenue maintenant un magnifique papillon. Ils étaient à nouveau réunis!    

Et le petit garçon se jeta dans les bras de sa maman, dont l'amour les avait sauvés tous les deux de la mort, et leur avait rendu leur joie de vivre.

bunni

#415

La fée des forêts


Un jour que je me promenais à l'orée d'une forêt, j'entendis une toute petite voix qui me murmurait à l'oreille: " Bonjour toi! Je te reconnais bien car tous les jours tu viens visiter ma forêt". Je me demandais alors qui pouvait bien me parler ainsi. J'avais beau écarquiller les yeux mais hélas, personne autour de moi!

Je me suis surprise à m'entendre dire à haute voix: "Qui me parle, où êtes-vous donc et que voulez-vous?"

"Je suis la Fée des forêts" me répondit une voix douce et enchanteresse. "Je ne veux rien de toi mais simplement que l'on fasse connaissance. Il y tant de choses que je voudrais te dire, tant de secrets que j'aimerais partager avec toi!"

"Où êtes-vous donc Fée des forêts? J'aimerais bien vous voir et être votre amie!"

Après quelques secondes d'un temps qui me parut éternel, la Fée des forêts me répondit alors: " Écoutes bien ce que je vais te dévoiler car aucun être humain avant toi n'a eu ce privilège. Gardes bien en mémoire tout ce que je te dirai et ne le confie qu'à la personne en qui tu auras toute confiance". "Oui, bonne "Fée des forêts", lui répondis-je. "Je vous promets de garder secret tout ce que vous me direz et je ne le dévoilerai qu'à la personne qui méritera ma confiance".

C'est ainsi que naquit le début d'une merveilleuse amitié entre la "Fée des forêts" et moi.

Ainsi commença l'histoire...

Au début des temps, les fées devaient perpétuellement se cacher des êtres humains de peur qu'ils ne les voient et ne veuillent les capturer afin d'en obtenir quelques voeux à exaucer. Elles choisirent alors la forêt comme lieu de refuge car c'était là le seul endroit où les humains auraient pu penser à venir les capturer. Tels des oiseaux, leurs petites ailes leur permettaient de se promener ici et là, entre les branches des grands arbres.

Vêtues de robes tissées de pétales de trilles rouges et blancs, coiffées d'un joli chapeau fabriqué à même les glands des chênes et portant de mignons petits souliers faits de mousses de lichens, elles voltigeaient gracieusement entre les fougères, les lucioles et les "Sceau de Salomon".

Tout en écoutant le récit de la "Fée des forêts", je lui demandai alors:
"Comment pourrais-je vous retrouver un jour, lorsque je reviendrai dans cette forêt?"

"Rien de plus facile" me répondit-elle. "Suis bien mes conseils et sans peine tu me trouveras. Tu devras cependant être bien attentif car pour me retrouver, tu devras également utiliser ton intelligence afin d'élucider les énigmes et rebus de mon histoire".

Comment trouver la Fée des forêts

À l'aurore, dès que le soleil dispense aux vertes fougères ses tout premiers rayons, vers elles je m'envole, de leurs perles de rosée scintillantes comme des diamants je vais m'abreuver. De baies sauvages, de miel et de petits fruits des champs que m'apporte "La fée des prairies" je me nourris avec joie.

Après ce frugal repas, mon ami le lièvre accourt à ma rencontre. Sur son dos je me pose et ensemble, nous courrons allégrement vers la clairière dont les fleurs multicolores sont un pur ravissement pour le regard. Dès notre arrivée, mes gentils amis les papillons et les libellules viennent nous saluer d'un gracieux battement d'ailes. "Bonjour Fée des forêts! Viens-tu jouer avec nous sur l'étang?" me demandent-ils dans leur doux langage.

Je quitte à regret mon ami le lièvre et m'envole enfin vers le grand étang dont les eaux limpides ont toujours su m'éblouir. Sur l'eau, le soleil fait miroiter de minuscules petites étoiles dont les couleurs multicolores se répandent dans toutes les directions. Sur les pétales roses du nénuphar je me pose pour admirer cette féerie.

Perchée tout en haut du grand pin, la grive solitaire m'aperçoit...Comme un doux sortilège, sa voix cristalline et mélodieuse m'appelle. "Emmènes-moi avec toi!" lui dis-je. D'un gracieux battement d'ailes, elle s'envole alors vers le grand étang, s'approche de la fleur de nénuphar et toute heureuse, m'emporte avec elle".

Nous nous envolons alors vers le ciel et surplombons ensuite vallées et montagnes couvertes de fleurs toutes aussi magnifiques les unes que les autres. Un peu plus tard, la grive me dépose délicatement sur son nid de mousses et de brindilles. "Je te remercie "Grive solitaire" pour ce merveilleux périple" lui ais-je dit. La grive s'envole ensuite vers la clairière enténébrée où se prépare un orage.


"Lorsque les premières gouttes de pluie vont tomber,
sous le chapeau du champignon tu pourras me trouver.
Sous son ombrelle, je me sens rassurée.
Dès que cesse la pluie,
Et que le soleil à nouveau luit,
Vers le bel arc-en-ciel je m'envole,
Sur la nuée me rejoint Éole.

Son souffle me propulse vers la colline
Où l'agneau se repose. De sa voix tranquille,
La brebis le rassure. Dans de verts pâturages,
Du bel oiseau bleu j'écoute le ramage.


Des fleurs jaunes, rouges ou bleues
Je ne peux me passer. Comme le soleil en feu
À son coucher, leurs couleurs me fascinent
Et m'attirent vers leurs corolles si fines.

Mais bientôt le ruisseau me fait entendre sa mélodie,
Légère, joyeuse, envoûtante: "Viens me voir! " il me dit.
J'y accours en déployant gaiement mes petites ailes.
Sur ses eaux limpides je pose mon corps frêle.

"Voilà comment tu pourras toujours me retrouver" me dit à la fin
"La fée des forêts". Depuis ce jour où j'ai trouvé la "Fée des forêts", je me promène inlassablement de forêt en forêt. Si j'observe attentivement ses conseils, il m'arrive de l'apercevoir à l'orée de la forêt ou près du grand étang. Et vous?

bunni


Sarah et la louve magique

Il était une fois, dans la vallée de Görnia, une petite fille nommée Sarah. Elle vivait avec son père dans un chalet de bois.
Un jour, son père, qui était malade, lui dit :
«J'ai besoin d'une plante pour me soigner. C'est une plante avec des feuilles rouges. Tu en trouveras derrière la montagne. »

Sarah partit donc à la recherche de cette plante. Elle marcha très longtemps dans la forêt. Fatiguée, elle décida de s'arrêter un peu.
C'est alors qu'apparut une louve suivie de ses petits. Mais elle n'était pas comme les autres. Elle avait un pelage d'or, des ailes d'argent, et au bout de chaque griffe brillait un diamant. Voyant Sarah, elle dit :
«Bonsoir petite fille. Tu es perdue ?

-Non, répondit Sarah, je dois trouver une plante pour mon père. Une plante avec des feuilles rouges.

-Je vois, dit la louve. Il n'y en a que derrière la montagne. Mais c'est très dangereux de s'aventurer là bas !

-Pourquoi ? Demanda la fillette.

-Il y a un gros dragon vert qui crache du feu !! Dit un louveteau

-Il fait très peur !! Dit un autre.

-Il mange tout ce qu'il voit !! Dit un troisième.

-C'est le gardien de la plante que tu cherches. Si tu la veux, il faut l'endormir très profondément.

-Mais comment vais-je faire ?

-Tu trouveras la réponse sur place.En attendant, viens te reposer dans ma tanière »

Sarah suivit la louve et ses petits, et resta dans la tanière jusqu'au lendemain matin.
Quand Sarah fut prête, la louve lui donna plusieurs pitons d'escalade et un petit maillet :
«La montagne est glissante, ces pitons t'aideront à la gravir.

-Merci dit Sarah » et elle partit.

Elle marcha toute la matinée en se nourrissant de baies sauvages trouvées dans la forêt. Elle gravit la montagne en plantant les pitons dans la roche pour y poser ses pieds.

Une fois de l'autre côté, elle examina les alentours, mais pas la moindre trace de plante. Tout était désert comme brûlé par du feu.
«C'est sûrement le dragon », pensa la petite fille.

Une immense porte se dressait devant elle. Elle essaya d'ouvrir, mais en vain.
Sarah pensait à son père malade, et se mit à pleurer. La nuit tombait, il faisait froid, et Sarah, fatiguée, n'avait nul endroit où dormir. Pour comble de malheurs, elle fut harcelée par une horde de korrigans affamés, qui cherchaient à lui voler son sac, pensant y trouver de la nourriture. Elle se défendit avec tant de courage qu'ils finirent par abandonner. Exténuée, Sarah se laissa tomber sur le sol et sanglota à chaudes larmes.

«Ne pleure pas, dit une voix à ses côtés.C'était la louve, sans ses petits.

-Où sont tes petits ? demanda Sarah

-Ils sont à la tanière avec leur père, expliqua la louve. C'est trop dangereux pour eux ici. C'est le repère du dragon. Prends cette clé, ouvre la porte et laisse moi passer. Je te dirai quand tu pourras rentrer »

Sarah ouvrit la porte et laissa entrer la louve. Le dragon ronflait si fort que la terre tremblait. Il y eu des éclairs de toutes les couleurs et des étincelles .La louve était magique. Elle ressortit et dit à Sarah :

«Tu peux prendre la plante dont tu as besoin pour ton père. Le dragon ne se réveillera pas. Mais dépêche-toi ! »

Sarah, effrayée mais courageuse, couru chercher la plante que son père lui avait demandée, et ressortit. La louve l'attendait.

«Ca y est, je l'ai !! S'écria Sarah heureuse.
-Bien, dit la louve. Monte sur mon dos, je te ramène chez toi. »

Sarah obéit et la louve s'élança, survola la montagne, traversa la forêt et s'arrêta devant le chalet où son père l'attendait. Tout était passé si vite que la fillette n'avait rien vu du voyage.

Elle remercia la louve, qui était devenue son amie, lui dit au revoir et rentra soigner son père.

Quand celui-ci fut guéri, elle lui raconta ses aventures. Son père ne la croyait pas :
«Tu as sûrement rêvé ma fille ! »

A ce moment précis, on frappa à la porte. Sarah ouvrit et la louve entra suivie de sa famille.

«Tu me crois maintenant ! Dit Sarah à son père »

Il n'en croyait pas ses yeux et resta ébahi devant les éclairs et les étincelles de toutes les couleurs.

bunni


On a volé le soleil

         Il était une fois, un royaume très lointain, bien au-delà de notre continent, tout près du pays des rêves. Dans ce royaume, régnait un fort bon vieux roi, qui avait deux petits enfants. Une petite fille blonde et vive qui s'appelait Rose (si elle avait été un garçon son petit frère aurait aimé l'appeler : Bleu) et un petit garçon facétieux nommé Hugo. Les deux enfants adoraient aller chez leur grand-père le roi, surnommé en grand secret « Papi-Bonbon ».

         Papi-bonbon était très heureux de voir souvent ses petits-enfants et les gâtait du mieux qu'il pouvait. Il avait fait fabriquer une aire de jeux à l'intérieur d'une salle de son grand château pour qu'ils puissent jouer à l'abri du mauvais temps et dépenser leur formidable énergie. Un endroit rien que pour eux, pour grimper, sauter, rouler, glisser, plonger des heures durant sans se lasser. Au plafond, on pouvait voir briller un magnifique soleil et un arc en ciel plus vrais que nature.

         Un autre de leurs endroits préférés était la grande salle de dessin entièrement recouverte de feuilles où ils pouvaient crayonner sur tous les murs, peindre, coller, décorer avec des tas de crayons de toutes les tailles et couleurs imaginables. Ils avaient appris à dessiner des bonbons de toutes les formes possibles. Une fois le dessin fini, ils l'enfournaient dans une petite fente qui, après quelques minutes d'agitation, leur faisait apparaître les bonbons désirés dans une petite boîte disposée à côté. La machine à bonbons originaux était la grande réussite de Papi-Bonbon, jamais elle ne tombait en panne. Les enfants savaient qu'ils repartiraient toujours les poches pleines, les doigts et la bouche poisseux et colorés, quel régal !

         Depuis leur naissance, Rose et Hugo avaient toujours vu Papi-Bonbon et son visage rond et souriant penché vers eux. Il avait été le premier à venir les voir quand ils étaient tout bébés, le premier à s'extasier devant leurs premiers pas, leurs premiers dessins et c'est aussi chez grand-père que la souris ne manquait jamais de passer, dans son jardin que se cachaient les œufs de Pâques et même par sa cheminée que descendait le père Noël en premier lieu.

         Il était d'une patience d'ange, très confortable lorsque Rose se lovait sur lui pour lire inlassablement des histoires merveilleuses, un peu comme celle-ci. Il connaissait aussi chaque recoin du jardin, chaque plante, chaque fleur et plantait des fraises et des framboises qu'il arrosait pour que les enfants les ramassent. Il était toujours d'accord pour jouer dehors, pour jardiner et les enfants aimaient beaucoup creuser des trous avec leurs petites pioches, juste pour le plaisir de chercher des trésors enfouis et tout reboucher ensuite.

         Mais la grande spécialité de Papi-Bonbon, c'était de concocter de nouvelles recettes de cuisine... Il priait la cuisinière de prendre des congés et s'installait en seigneur et maître dès l'aube dans le grand laboratoire. Lorsque les deux enfants descendaient boire leur chocolat bouillant et les larges tartines qu'il leur avait préparé, ils sentaient les mémorables effluves de viande délicatement découpée et patiemment rôtie.

         Un jour de grand soleil, ils décidèrent de filer à la rivière en passant par le chemin de la prairie parsemé de moucailloux, les moucailloux présentaient le grand avantage de ne pas les blesser lorsqu'ils tombaient parce qu'ils n'étaient pas durs comme les pierres, mais tout tendres. Une fois à la rivière, ils sautaient dans l'eau en pensant très fort à leur couleur préférée et l'eau devenait de la couleur de leur choix. Leur jeu favori consistait alors à se baigner avec plusieurs amis de façon à ce que, chacun choisissant une couleur différente, ils arrivaient à donner à l'eau de la rivière toutes les couleurs de l'arc-en-ciel qui, jaloux, n'osait plus se montrer. En rentrant, leurs yeux brillaient de plaisir lorsqu'ils racontaient leurs exploits à leur grand-père bien-aimé.

         Au moment de se coucher, Hugo et Rose aimaient beaucoup qu'on leur raconte une histoire au lit. Malheureusement, celle-ci se terminait toujours bien trop tôt à leur goût... Alors, un soir, papi-bonbon alla farfouiller dans le grand coffre de sa chambre et leur rapporta un beau livre mystérieux. Il s'installa près d'eux et commença une jolie histoire captivante, mais les enfants s'endormirent, épuisés, sans en entendre la fin. Derrière chaque page tournée se trouvait une autre page et encore une autre, le livre ne se finissait jamais...

Un matin pourtant, il n'y eut pas de jour. Le soleil ne se leva pas. Hugo et Rose restèrent au lit plus tard que d'habitude, pensant qu'il était trop tôt pour se  réveiller. Mais non, l'heure était déjà avancée, il faisait toujours nuit. Au bout d'un grand moment, ils se levèrent ensemble, se tenant par la main, pas très rassurés. Leur grand-père n'avait pas peur lui, mais ne comprenait pas ce qu'il se passait... Mais où était donc allé le soleil ? Dans la salle de jeux, tout était comme recouvert d'un voile sombre. Rien n'avait changé mais les couleurs étaient absentes : plus de soleil visible au plafond et tous les feutres dessinaient avec la même couleur gris sombre. Les enfants n'osèrent pas s'aventurer dans les tunnels obscurs pour jouer. Dehors tout était noir, peuplé d'ombres sombres menaçantes, effrayantes.

Courageusement, ils décidèrent d'aller affronter le noir, chercher le soleil qui inondait d'habitude leur royaume. Parterre, les moucailloux se faisaient souples pour amortir leurs pas hésitants. Ils allèrent jusqu'à la rivière qui coulait telle de l'encre noire. Aucun des deux n'eut envie de se baigner, craignant de voir surgir un monstre affreux. Ils s'assirent au pied d'un grand arbre et écoutèrent le silence, le bruissement du vent dans les feuilles, mais aussi des craquements nettement plus inquiétants. Seuls au milieu de l'obscurité, ils entendaient aussi leur respiration rapide, leur cœur battre très vite... Ils commençaient à avoir très, très peur tout seuls. Hugo eut alors l'idée d'empiler des moucailloux pour faire un petit muret tout autour d'eux. Au fur et à mesure, les moucailloux s'encastraient les uns dans les autres comme les morceaux d'un puzzle, formant une barrière solide. Rose se prit au jeu et bien à l'abri dans leur petite tour de moucailloux, ils continuèrent à les empiler de plus en plus haut. Ils ne voyaient plus la forêt alentour, inquiétante, seulement tout en haut, au dessus de leurs têtes, la nuit noire et quelques étoiles qui scintillaient doucement.  Les étoiles ! Ça brille les étoiles ! Ça fait de la lumière ! Il fallait absolument les atteindre et trouver un moyen de les ramener au royaume de leur grand-père. Grimpant à l'intérieur de la tour grâce aux moucailloux-escaliers, ils continuèrent leur construction, jusqu'à toucher les étoiles. Là, ils entendirent un murmure... « C'est Gourbillar, Gourbillar, Gour-biiiiillarrrrr, c'est lui qui a caché le soleil !!!

-Mais qui est Gourbillar ? demanda Hugo.

-C'est un géant très méchant, très vilain, il est sombre, sa  peau est comme du carton, toute sèche. Il est tellement méchant que même ses dents sont froides. Papi m'a raconté son histoire, un soir » lui répondit Rose.

         Grimpé tout là-haut, Hugo cueillit quelques étoiles qu'il fourra dans sa poche. Puis les deux enfants redescendirent de leur tour et prenant une étoile dans chaque main, ils éclairèrent le chemin du retour. Il faisait toujours aussi nuit, mais les étoiles leur donnaient suffisamment de lumière pour ne plus avoir peur. Il faisait tout aussi froid et noir dans le château de Papi-Bonbon, aussi leur grand-père les entraîna dans le jardin, s'asseoir sous un grand arombre. Sous l'arbre amical régnait une douce chaleur, à la place de l'ombre habituelle. Ils placèrent les étoiles attrapées dans le ciel, sous un globe de verre et réfléchirent ensemble à la pâle lumière des astres.

-Si Gourbillar a pris le soleil, l'affaire est sérieuse, commença Papi-Bonbon. Ça ne va pas être simple de le retrouver.

-Nous allons le chercher et l'obliger à nous rendre le soleil, dit Hugo en se levant.

-Il ne nous écoutera pas, nous ne sommes que des enfants, répliqua Rose.

-Pourquoi a-t-il enlevé le soleil ? s'enquit Hugo.

-Gourbillar est un géant triste et sombre, il ne veut certainement plus voir le soleil qui éclaire la vie et redonne le sourire aux gens, lui expliqua son grand-père. Il aimerait que tout le monde soit triste comme lui.

-Il doit être très malheureux, ajouta Rose avec sagesse.

-Mais nous, on a besoin du soleil !!! ajouta Hugo.

A peine avait-il fini ces mots, qu'un oiseau virevolta et vint leur parler à  l'oreille. Ils entendirent alors le même murmure que tout à l'heure, en haut de la tour.

-Je l'ai vu, Gourbillar, c'est lui qui a pris le soleil !

Les enfants  regardaient le joli martinet, médusés.

-Nous les martinets, volons de longues heures, il nous arrive même parfois de dormir en volant, très haut dans le ciel.

-Dormir en volant ? répéta Hugo stupéfait, il aimerait bien lui, pouvoir manger des bonbons en dormant !

-Hier soir en plein vol, je ne dormais que d'un œil ! J'ai vu Gourbillar avec le soleil. Il l'a emmené... sur la lune même ! Sur sa face cachée, celle qu'elle ne nous montre jamais. Ah ! Il a trouvé une bonne cachette, qui penserait le chercher là bas ?!

-Qui pourra aller le ramener surtout ? soupirèrent les deux enfants... Notre tour ne sera jamais assez haute et comment reprendre le soleil sans nous brûler ?

-Et Gourbillar ? Comment il a fait lui, pour ne pas se brûler ? demanda Papi-Bonbon avec bon sens.

-Il n'a pas pu le prendre, il a dû le persuader, l'obliger à se cacher d'une façon ou d'une autre, réfléchit Rose.

-Et il va falloir trouver une aussi bonne idée pour le convaincre de ressortir, ajouta Hugo. Allons trouver Gourbillar, on en saura peut être plus.

bunni

On a volé le soleil (suite et fin)

Et voilà nos deux amis, guidés par le martinet et deux étoiles éclairantes, qui s'enfonçaient à nouveau dans la forêt sombre.

-Gourbillar habite une cabane au fond des bois, je la connais, je l'ai déjà survolé plusieurs fois, leur expliqua le martinet. Par contre, il a un chat noir pas très commode, il va falloir le distraire pour entrer.

         Effectivement, en arrivant devant la cabane du géant, un chat noir dormait sur le perron, mais seulement d'un œil, personne ne pouvait approcher sans goûter à ses griffes redoutables.

-Et maintenant qu'est-ce qu'on fait ? demanda Rose pas très rassurée.

-Eh bien, on y va ! répondit Hugo sûr de lui. Et il fila vers la porte d'entrée de la cabane. Il s'approcha du chat et sortit de sa poche des petits poissons et une grosse souris : les bonbons de Papi-Bonbon, les derniers qu'il avait fabriqué avec la machine à bonbon. Il avait eu une vraie bonne idée de dessiner des formes d'animaux ! Pendant que le chat conquis, jouait avec ses anibonbons colorés, Hugo et Rose entrèrent dans la cabane et trouvèrent Gourbillar en train de dormir dans le noir. Le géant, surpris d'être réveillé par deux enfants sans avoir entendu son chat les repousser, n'eut pas le temps de préparer un mauvais coup.

-Qu'as-tu dit au soleil ? Pourquoi s'est-il caché ? demanda Hugo toujours pas impressionné.

-C'est moi qui l'ai caché, héhéhé, leur dit Gourbillar d'un air suffisant.

-Tu n'as pas pu le porter, c'est impossible ! répliqua Rose, il est trop brûlant !

-Le soleil a fait une bêtise, il a bien fait de se cacher, concéda Gourbillar, content de lui. Je l'ai un peu aidé... C'est de sa faute aussi, il a oublié l'éclipse de samedi dernier. Il devait passer derrière la lune et il ne l'a pas fait. Tous les astronomes l'attendaient derrière leur lunette et rien, pas l'ombre d'une lune noire auréolée de soleil. Ils doivent refaire tous leurs calculs maintenant, ils ne comprennent plus rien. Je l'ai dit au soleil, il est trop tête en l'air celui-là... tant pis pour lui. Il est parti se cacher, il doit avoir trop honte. Hahahaha ! Et il est très bien là-bas, j'aime la nuit, moi !

-Mais il faut aller le chercher, il faut qu'il revienne ! lui dirent les enfants.

-Le faire revenir ?? NOOON ! pas question,  répliqua le géant, ne comptez pas sur moi. Au revoir !

     Les enfants un peu abattus, ressortirent de la cabane. Ils croisèrent le chat noir qui vint se frotter contre eux dans l'espoir d'obtenir de nouveaux anibonbons.

-Pourtant, il faut le convaincre de revenir, dit Hugo à Rose. On ne peut pas rester sans soleil, il fait trop froid et trop noir, c'est trop triste.

      Le martinet qui les avait accompagné, voletait dans le ciel non loin d'eux.

-Les martinets volent tellement haut... Tu crois qu'ils pourraient aller jusqu'à la lune, chercher le soleil et le convaincre de sortir ? suggéra Rose.

-On peut toujours essayer, répondit Hugo. Il appela le martinet.

-Je vole peut être les yeux fermés, mais j'entends très bien, leur dit le martinet. Je crois que je peux essayer de voler tout là-haut. Je vais aller voir le soleil. Moi aussi j'ai besoin de lumière pour me nourrir et de chaleur pour mes petits.

         Les enfants retournèrent dans le jardin de leur grand-père et s'assirent sous l'arombre qui les réchauffa de son ombre lumineuse. Ils suivirent des yeux, le plus longtemps possible, l'oiseau courageux qui volait à tire-d'aile, rejoindre le soleil. Le martinet se concentra sur son vol, montant toujours plus haut en direction de la lune. Il en fit le tour et passa de l'autre côté. Effectivement, le soleil, tout rose, se faisait tout petit derrière la lune.

-Soleil, nous avons besoin de toi, il faut sortir, revenir briller, dit le martinet au soleil tout penaud.

-Je ne peux pas, je ne suis pas un bon soleil, répondit le soleil d'une petite voix. J'ai oublié mon éclipse, je vais prendre ma retraite et rester caché pour me faire oublier.

-Mais tu ne peux pas faire ça ! Tout le monde peut oublier de faire quelque chose, ce n'est pas grave. Mes petits ont froid dans leur nid, ils ont peur du noir. Hugo et Rose ont peur eux aussi, ils ne peuvent plus jouer, même les fleurs se fanent. Tous t'attendent avec impatience, je suis sûr qu'ils seront trop contents de te voir pour penser à t'en vouloir.

         Le soleil, tout timide, ne savait plus que penser, il faut dire que Gourbillar l'avait vraiment terrorisé avec ses remontrances. La lune qui l'abritait, elle, était très attentive aux paroles du martinet qu'elle trouvait très courageux et très pertinent. Aussi, elle fit de son mieux pour convaincre le soleil à son tour. Il ne pouvait pas rester caché là toute sa vie. Il lui fallait faire ce  qu'il savait faire de mieux : briller, donner des couleurs, faire vivre les fleurs, jouer les enfants. Le soleil finit par se rendre aux arguments du martinet et de son amie la lune.  Ça lui manquait aussi de ne plus voir les petits courir à la rivière et jardiner dehors. Il devait reprendre sa place dans le ciel et ne plus écouter Gourbillar, trop de monde avait besoin de lui. Il était fier de se sentir important et utile.


Rose et Hugo étaient toujours sous l'arombre, attendant patiemment le retour du martinet.

-Tu crois qu'il va l'écouter ? demandait Hugo.

-Je l'espère, répondit Rose, sinon, ça va être triste.

         A ce moment-là, la lune devint noire, avec une couronne de feu tout autour. Et le soleil sorti, certes son éclipse avait quelques jours de retard, mais il avait décidé de ne plus se cacher. Rapidement ses rayons s'étendirent jusqu'au sol et réchauffèrent les plantes et les animaux apeurés, cachés dans leurs terriers. Tout reprit vie. Les fleurs se relevèrent, les animaux sortirent gambader, les enfants sautèrent de joie et le martinet revint à tire d'aile. Seul Gourbillar, dans sa cabane était furieux. Mais après quelques jours de jeux au soleil et dans la rivière aux mille couleurs, Hugo et Rose revinrent se promener dans la clairière de Gourbillar. Le géant était seul avec son chat et tout triste.  Les deux enfants n'osèrent pas lui parler. Ils s'accrochèrent à une corde qui traînait là, dans un arbre et commencèrent à se balancer, puis à grimper. Ils allèrent dans les branches regarder un nid d'oiseau en discutant joyeusement. Alors qu'ils descendaient de l'arbre, ils virent Gourbillar qui les observait intrigué, mais un sourire aux lèvres.

-Vous êtes bien les seuls à ne pas avoir peur de venir jouer par ici. Je serais moins triste si vous veniez plus souvent. Ça me ferait de la compagnie.

-J'ai une idée ! dit Rose en s'élançant vers le château de son grand-père, Hugo sur ses talons.

Le lendemain, une équipe de bûcherons vinrent envahir le coin de forêt autour de la cabane de Gourbillar et s'affairèrent dans les arbres. A quelques jours de là, tout était prêt. Hugo et Rose entraînèrent plusieurs de leurs amis dans la nouvelle forêt d'aventure qu'ils avaient demandé à leur grand-père. Installée avec des lianes, des petits ponts de bois, des cabanes solides tout en haut des arbres, ils pouvaient jouer pendant des heures et ne manquaient pas d'appeler le géant pour les sortir de situations inconfortables... Le géant d'abord bougon, s'était pris au jeu et venait les aider à monter ou descendre des arbres, leur tenir la main pour traverser et même... leur préparer à goûter lorsqu'ils avaient faim. Le géant n'était plus triste, il était occupé et il pouvait s'amuser à regarder les enfants jouer tout près de lui. Il appréciait grandement leur rire et leur compagnie et il attendait le soleil avec impatience, car il était sûr que les enfants viendraient jouer tout près de chez lui.
 

bunni


La marmotte au collier d'étoiles


Très haut dans la montagne vivait une fois une colonie de  marmottes. Tous les ans, les mamans marmottes avaient des bébés à fourrure soyeuse qui jouaient tout l'été dans les fleurs avant de s'endormir à la première neige.

Cette année-là naquit un bébé marmotte qui n'était pas tout-à-fait comme les autres. Au lieu d'aller gambader dans les gentianes et les rhododendrons  avec les autres petites marmottes, elle préférait rêver devant l'entrée de sa grotte. Mais le soir, dès que le soleil disparaissait, elle restait des heures à contempler les étoiles, avec de grosses larmes dans les yeux. Sa famille et ses amis, très inquiets, finirent à force de questions par connaître la raison de ce comportement étrange: la petite marmotte  avait envie d'un collier d'étoiles  qui resplendirait sur sa fourrure. Mais toutes les marmottes  savaient bien que c'était impossible, on n'avait jamais vu une marmotte aller décrocher des étoiles pour les enfiler ensuite sur un cordon d'herbes odorantes. Aussi essayèrent-elles de lui faire oublier son idée fixe, en l'entraînant dans des courses folles sur la prairie , en lui apportant les baies les plus savoureuses, mais rien n'y fit. La petite marmotte avait toujours les yeux tristes.

Pourtant, un jour, ses amis l'entendirent rire brusquement, tout joyeux, ils crurent qu'elle était guérie et qu'elle allait désormais partager leur vie insouciante. Bien au contraire! La petite marmotte venait d'avoir une idée. Elle attendit toute la journée et quand vint la nuit, elle se glissa silencieusement en dehors de la grotte et commença à marcher vers le pic le plus élevé, celui qui semblait caresser les  étoiles. Elle quitta rapidement la prairie et se mit à grimper dans les rocailles. Ses pattes étaient déjà toutes égratignées par les cailloux tranchants mais elle marchait toujours en regardant vers le ciel. Puis elle arriva sur la neige, glissant sur la glace, ne remarquant ni les difficultés de l'escalade, ni la  brûlure de ses pattes. Enfin, elle atteignit le sommet.

Hélas, elle dut s'apercevoir que toutes ses peines avaient été inutiles: Les étoiles étaient toujours aussi haut, aussi loin que quand elle les admirait de sa prairie. Avec de gros sanglots, elle commença à redescendre vers la vallée, mais, épuisée, s'effondra dans les rocailles . C'est là que la trouvèrent ses parents, affolés de sa disparition, qui la cherchaient depuis l'aube.

La petite marmotte fut longtemps malade, ses pieds étaient douloureux, elle avait voulu aller trop loin, mais surtout, terriblement déçue de n'avoir pas pu réaliser son rêve, elle n'avait plus la volonté de guérir. Toutes les autres marmottes venaient la voir pour essayer de la distraire. Un jour, elle reçut la visite d'une très vieille marmotte que tous respectaient pour sa sagesse et son intelligence, elle s'approchait souvent d'un village voisin, pour essayer de comprendre comment vivaient les  humains. Elle avait appris le désir de la petite  marmotte et une idée lui était venue. Elle avait entendu que les  humains savaient fabriquer des machines pour aller dans les étoiles, la petite marmotte  pourrait peut-être se cacher dans une de ces machines et ramener son collier?

Toute contente, la marmotte se dépêcha de guérir, et dès qu'elle eut le droit de sortir, elle se dirigea avec une amie vers l'endroit où elle savait que les humains s'arrêtaient pour regarder le paysage. Bien avant d'arriver, elles se mirent toutes les deux à tousser, car l'air était empoisonné par toutes les voitures qui passaient par là. Cachées derrière un rocher, elle observèrent les touristes. Mais bientôt, elles renoncèrent, dégoûtées. Les humains parlaient trop fort, ils grondaient leurs petits, jetaient des papiers sales sur le sol et ne regardaient même pas le magnifique panorama. Jamais ils ne pourraient aller dans les étoiles. Déçues, elles rentrèrent lentement à la grotte.

A partir de ce jour-là, la petite marmotte  sembla renoncer à son rêve et participa aux jeux des autres  marmottes, mais sans jamais rire.

Jour après jour, l'air devint plus frais, les nuits plus longues, vint le temps du long  sommeil d'hiver. Toutes les marmottes  rentrèrent dans leurs grottes, s'allongèrent sur leur lit d'herbes et fermèrent les yeux en baillant. Toutes dormirent d'un sommeil sans rêves.
Toutes, sauf une.
Car la petite marmotte  mélancolique commença à rêver.

Légère, toute légère, elle volait d'étoile en étoile, en faisait un magnifique bouquet qu'elle semait ensuite sur la prairie.

Tout l'hiver, elle joua ainsi. Quand le printemps arriva, elle se réveilla doucement et eut d'abord du mal à réaliser que tout n'avait été qu'illusion et faillit pleurer.
Mais très vite, elle retrouva le sourire, car elle savait maintenant que
tous les hivers, elle pourrait rêver du  plus beau collier d'étoiles  qui puisse jamais exister.