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Contes d'ici et d'ailleurs

Démarré par bunni, 18 Septembre 2012 à 00:22:36

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bunni


Un drôle de matin de Pâques

Branle-bas de combat chez les lapins : c'est le jour de l'expédition au poulailler.

Oui, c'est bientôt Pâques, et tous les ans.... Mais vous ne savez pas cela ?... Comment des oeufs décorés de toutes les couleurs atterrissent dans les jardins pour que les enfants les recherchent ?...Vous ne le savez pas ?... Oh, on raconte beaucoup de faussetés à ce sujet : : des histoires de cloches qui viendraient de Rome....Non, non, non, la vérité est beaucoup plus simple, tant pis si elle ne fait pas voyager en Italie !... Donc, tous les ans, chez les lapins, c'est la grande agitation, un peu comme chez les lutins du Père Noël, juste avant...Noël !... On fait le grand ménage, on secoue la paresse de l'hiver, on fait de la place dans la grande salle du terrier transformée en atelier de peinture pour l'occasion, on sort les vieux pots de couleurs, on sacrifie quelques poils pour faire des pinceaux neufs...Mais tout cela n'est rien, le plus important, le plus excitant et le plus dangereux aussi, c'est : l'expédition chez les poules pour leur voler un oeuf !.... Hé oui, les lapins ne pondent pas et pourtant, ce sont eux qui depuis toujours, sont chargés de cacher les oeufs dans le jardin.... Donc, la seule solution est d'aller en voler chez les poules et c'est pour cela qu'il y a la guerre entre eux. Enfin, ça c'est une autre histoire !... Aujourd'hui, c'est Dédé qui doit se glisser sous le grillage du poulailler pendant que Jojo et Ficelle font diversion et attirent les poules près de l'abreuvoir. C'est un grand honneur pour Dédé et aussi un grand défi : s'il réussit l'épreuve, il sera admis à assister aux conseils des adultes, il sera un vrai lapin !... Jojo a accroché une vielle casserole à la patte de Fernande pendant sa sieste, Fernande, c'est la plus vieille poule... Vous imaginez, quand elle s'est réveillée pour picorer, le boucan que ça a fait, surtout que Ficelle s'agitait devant elle en faisant sa plus belle grimace : BLLLL, BLLLL, BLLLLL... Bref, c'était la pagaille !...Toutes les poules couraient derrière Jojo pour le coincer, heureusement qu'il court vite, Jojo !... Même la grosse Henriette qui couvait son oeuf a levé son derrière et s'est agitée de tous les côtés. Et ça, faire se lever la grosse Henriette, c'était exactement le but recherché ! ... Dédé s'est doucement glissé prés du nid de la poule, il a saisi l'oeuf tout doucement entre ses pattes et s'est sauvé avec le plus vite qu'il a pu. Arrivé au terrier, Dédé a été reçu comme un chef, on l'a félicité, on a dit qu'on était fier de lui, qu'il était désormais un véritable lapin... .L'oeuf a été placé au centre de la salle et les lapins se sont mis au travail tous ensemble : Des vagues bleues et vertes, des carrés rouges et des points jaunes, bien symétriques . Une fleur au sommet, une autre à la base... Les lapins s'en donnaient à coeur joie : encore du bleu et puis du rouge plaf plaf une grosse tâche de vert , ça c'est de la peinture !... Ca s'est de la création !... Les lapins se laissaient aller à leur imagination mais attention, ils restaient très concentrés et bientôt, la décoration de l'oeuf de Pâques fut achevée ! ... Maintenant, il restait à le cacher dans le jardin. Chaque année, la discussion reprenait : vaut-il mieux le mettre derrière le gros caillou, dans la souche du vieux chêne, dans le buisson qui fleurit prés de la porte.... Chaque lieu avait ses défenseurs et ses détracteurs...On se chamaillait chez les lapins, on discutait ferme...Bref, à la fin, comme chaque fois, le chef finissait par imposer le silence et on tirait au sort avec des feuilles de trèfle quel lieu serait choisi... Attention...La souche du vieux chêne !...Ca faisait très longtemps que ce n'était pas tombé !....Mais, est-ce que les enfants connaissaient ce lieu ?... « Oui, oui, oui, s'exclame Ficelle ! L'autre jour, le petit garçon est venu s'asseoir à côté et, tout seul, il a raconté des tas de choses à l'escargot qui habite la souche, je crois qu'ils sont copains maintenant... » Ficelle, Jojo et Dédé ont attendu la nuit pour se glisser hors du terrier avec leur bel oeuf décoré...Tous les autres lapins les regardaient de loin, le nez dans l'herbe humide. Avant, tous les lapins faisaient des rondes et chantaient sous la lune pour aller cacher l'oeuf mais, une année, ils faisaient tellement de raffut que les habitants de la maison sont sortis dehors et ils ont failli être surpris... Depuis, les lapins sont beaucoup plus prudents et discrets. Les trois compères lapin ont doucement déposé le bel oeuf dans le creux de la souche d'arbre, ils l'ont caché sous des feuilles et des brindilles et sont vite repartis au terrier. ..se coucher. Oh, le lendemain, ils étaient levés tôt les trois compères !...Cachés comme seuls les lapins savent se cacher, à observer les enfants dans le jardin qui cherchent à droite, à gauche, courent et crient dans tous les sens... « Je l'ai, j'ai l'oeuf de Pâques !...C'est moi qui l'ai trouvé !.. Là dans la souche du vieux chêne !.... » C'est alors que s'est produit un événement extraordinaire, aussi stupéfiant qu'inattendu... L'oeuf a bougé, tout seul, oui, il a basculé sur lui-même et...il a craqué... De plus en plus...Il s'est ouvert, écaille par écaille ... Les enfants ébahis, et plus loin, les lapins qui observaient tout cela, ont vu sortir, tout fripé, tout neuf, un petit poussin !!! « Ca alors !...a dit Dédé, ça alors !... - Ben...De toute ma vie de vieux lapin, a dit Ficelle, j'ai jamais vu ça ! Que l'oeuf de Pâques s'ouvre pour donner un vrai poussin !...Le matin de Pâques !....Non, j'ai jamais vu ça !... »

bunni


Cotcote la petite poule qui sauva Pâques

Bonjour !
C'est une histoire qui commence pas loin de chez moi. C'était la nuit, le poulailler était calme,
la maison était calme, c'est-à-dire : tout était calme, lorsque...
- Clocloche à tour de contrôle, Clocloche à tour de contrôle, mayday ! mayday ! Je me
crashe !
BOUM !!!
Une cloche s'écrasa juste à côté du poulailler. Cotcote fut réveillée et alla voir, curieuse, la
cloche qui s'était écrabouillée.
- Ça va ? demande Cotcote en remettant ses lunettes.
- Euh ! Oui, enfin je crois... dit la cloche un peu sonnée, je ne peux plus voler. Pâques est  
fichu, les chocolats ne pourront jamais être distribués à temps, dit-elle en éclatant en sanglots.
- Si tu veux, je peux t'aider ! dit Cotcote pour la réconforter.
- Oh oui, merci !
Et c'est ainsi que Cotcote se porta volontaire pour aider Clocloche, la cloche, à faire la grande distribution.
La petite poule avait pris son panier en osier pour y mettre tous les oeufs en chocolat éparpillés par terre, qu'il
fallait d'abord ramasser. Il y en avait des petits et des gros.
Quand elles allèrent dans le centre-ville pour semer leurs oeufs, elles rencontrèrent le chat Griffou qui fit
le gros dos, souffla, et s'empara du panier de Cotcote ! Il se sauva avec en laissant tomber deux oeufs qui
dévalèrent le trottoir.

Ces deux œufs disparurent, emportés par le vent.
Cotcote, furieuse, alla voir Alphonse Baslespattes, le chien de sa basse-cour.
Elle lui raconta toute l'histoire, la chute de Clocloche, Pâques qu'il fallait sauver, le mauvais
tour de Griffou. Alphonse décida d'aller montrer ses grosses dents à cet effronté de Griffou.
Et il était bien content, car cela faisait longtemps qu'il n'avait pas mordu un chat !
Ils se rendirent tous chez Griffou, Cotcote, Clocloche et Alphonse.
- Griffou, rends les œufs de Pâques et le panier ! gronda Alphonse.
- Pourquôaa ? demanda Griffou.
- Pour les enfants de la ville, répondit Alphonse.
Le chat se contenta de bâiller en se limant les griffes. Voyant qu'il restait indifférent, Alphonse          

bondit sur lui et le mordit au mollet. Griffou s'enfuit en miaulant, loin du panier plein d'œufs.
Cotcote et Clocloche remercièrent Alphonse pour son courage, mais le temps pressait. Il restait une partie
de la ville sans chocolat, il fallait faire vite sinon Clocloche se ferait houspiller par le CCP (Comité des Cloches
de Pâques.)
Pas loin de là, dans une maison, des petites lumières apparurent, Daniel et Annie s'étaient réveillés.
- Est-ce que tu vois les cloches ? demanda Annie.
- Non, répondit Daniel.
- On réessayera plus tard, allons-nous recoucher
Alors que la porte de leur chambre se refermait Cotcote et Clocloche sortirent de leur
cachette et déposèrent leurs œufs, hop ! avant de repartir vers la maison suivante.
Cotcote et Clocloche se sentirent folles de joie quand elles aperçurent la dernière maison.
- Oohhh ! Il n'y a plus d'œufs, déclara Clocloche, je suis perdue. Les deux derniers œufs
sont ceux que Griffou a fait tomber dans la rue. Je suis fichue.
- Non, nous trouverons bien un moyen, dit Cotcote en la consolant.
BING BANG DIGUI DONG !!!
- Qu'est-ce que c'est ?
Eh là ! C'était un petit lapin qui se présentait devant elles.
- Euh... Bonjour, je m'appelle Pinpin, je vous ai suivies, je ne voulais pas vous déranger.  
     
- Oh, mais tu ne nous déranges pas ! répondit Cotcote.
- J'ai quelque chose pour vous.
Et le petit lapin exhiba un des deux œufs manquants !
- Merci beaucoup fit Clocloche, mais il en manque encore un. Il faut un petit et un gros œuf par enfant.
- Désolé ! dit le petit lapin en baissant la tête.
- Ce n'est pas de ta faute.
- Non, je sais.

Cette petite fille risque d'être déçue avec seulement un petit œuf, dit Cotcote.
- J'ai une idée, déclara Pinpin. J'ai été abandonné par mon maître, si j'habite chez
cette petite fille cela me plairait beaucoup et peut-être qu'elle aussi serait contente
d'avoir un ami dévoué ?
- C'est d'accord, répondit Clocloche. Le deuxième cadeau de Pâques de cette
petite fille, ce sera toi !
Le problème était résolu !
Pinpin était heureux de trouver une petite maîtresse, Cotcote de retrouver son
perchoir au poulailler et Clocloche de regagner son clocher.  
     
Tout finit encore mieux que prévu, car, pour leur dévouement, leur débrouillardise et leur courage, Cotcote,
Clocloche et Pinpin reçurent une récompense.
Leur récompense fut qu'à partir de ce jour, il n'y aurait pas que des œufs en chocolat, pour Pâques,
mais aussi :
-- des poules en chocolat,
-- des cloches en chocolat,
-- et des lapins en chocolat.



bunni


LA BOITE A BISOUS

Il était une fois un ex-enfant qui était devenu un adulte important, très sollicité et très occupé.

Toute son enfance, cet homme avait été  élevé essentiellement par sa mère, aujourd'hui âgée de 79 ans, qui vivait seule dans un petit appartement dans une lointaine ville de province. Et curieusement, avec l'âge, la distance entre la mère et le fils leur semblait à l'un comme à l'autre de plus en plus longue, de plus en plus grande, de plus en plus difficile à franchir.

Vous l'avez deviné, il y avait entre cet homme et cette femme âgée, un attachement profond. Au-delà des sentiments d'affection et d'amour qui circulaient entre eux, s'était développée, au cours des vingt dernières années, une relation d'échanges et de partages qui apportait beaucoup à l'un comme à l'autre.

Mais aujourd'hui, la distance qu'il y avait entre eux commençait à peser, surtout à la mère. Elle trouvait qu'elle ne voyait pas beaucoup son fils et en tous cas, pas suffisamment.

Bien sûr, ils se téléphonaient, il lui envoyait des petits mots, des poèmes, des petits dessins humoristiques; elle lui répondait toujours dans le jour qui suivait;  mais cette maman trouvait que cela ne remplaçait pas sa présence et surtout les petits bisous de tendresse qu'ils pouvaient se donner quand ils étaient proches l'un de l'autre.

L'homme se rappela avoir lu quelque part que, lorsqu'une situation était bloquée au niveau de la réalité, on pouvait toujours tenter de l'ouvrir et de la nourrir en pratiquant des démarches symboliques. Comme il était un peu bricoleur, il décida de fabriquer une boîte à bisous et de l'offrir à sa mère.

Vous ne savez peut-être pas comment fonctionne une boîte à bisous ?

C'est relativement simple, à condition de respecter quelques consignes élémentaires.

Tout d'abord, la boîte doit avoir un couvercle qui s'emboîte très soigneusement, de façon à ne rien laisser échapper de son contenu quand elle n'est pas utilisée. Mais vous devez toujours l'avoir proche de vous, dans un lieu d'intimité, pour pouvoir vous en servir à votre convenance. Après avoir rempli la boîte de bisous variés, d'intentions de tendresse et de pensées positives, vous refermez le couvercle et l'offrez à la personne de votre choix.Le destinataire, le soir de préférence, ou à d'autres moments de la journée quand le besoin s'en fait sentir, peut soulever délicatement le couvercle et accueillir ainsi un baiser ou deux, à lui seul destinés, ou encore recevoir un message de tendresse sous la forme d'un pétale de rose ou d'une graine de tournesol. Il doit faire très attention et ouvrir la boîte à bisous avec précaution car les baisers sont très volatils; ils ont tendance à se répandre dans la nature à la recherche de ceux qui peuvent les accepter.

Quand la boîte est vide, celui qui la possède peut demander à la personne significative de sa vie, de la remplir et de la renvoyer, soigneusement fermée.

Ainsi le jour arriva où la mère de cet homme, après avoir accueilli son fils chez elle, pour un court séjour, se vit offrir une belle boîte en bois de santal, avec une très belle forme, très parfumée, délicatement décorée. Son fils lui expliqua qu'il s'agissait d'une boîte à bisous et lui apprit comment elle fonctionnait.

- chaque fois que je viendrai te rendre visite, je remplirai la boîte de bisous, pour toi seule, Maman. Je te demande de veiller à ne pas l'ouvrir trop vite, à ne pas la laisser à la portée de tes petits-enfants qui, eux, sont de grands consommateurs de bisous et auraient vite fait de vider ta boîte en une seule soirée.

- tu es sûr que cette boîte est pour moi seule ?

- pour toi toute seule! d'ailleurs les bisous que je dépose dedans, je ne les destine à personne d'autre qu'à toi, Maman. C'est une façon pour moi d'être présent, proche de toi et de témoigner de mon affection tous les jours.

- elle me semble un peu petite, tu ne crois pas ?

- elle paraît petite mais elle contient beaucoup, beaucoup de bisous, de pensées tendres pour toi.

- et quand la boîte sera vide, je pourrai t'appeler pour que tu viennes la remplir à nouveau?

- je vois que tu as bien compris le fonctionnement de ma boîte à bisous !

Au début, cependant, ce ne fut pas aussi simple que cela. La mère avait tendance à ouvrir sa boîte plusieurs fois par jour en l'approchant de son visage. Un matin même, un peu inquiète, elle voulut vérifier s'il y avait encore des bisous et ouvrit la boîte avec un peu trop de précipitation ce qui fait que la plupart des bisous s'envolèrent.

Mais après quelques semaines d'entraînement et d'apprivoisement mutuel, la boîte à bisous fonctionna parfaitement et fut acceptée avec beaucoup de respect par la maman. La vieille dame et elle s'entendirent à merveille jusqu'à la fin de sa vie.

Si vous ne voulez pas me croire, faites un jour l'expérience et offrez une boîte à bisous à ceux que vous aimez........quand ils sont loin de vous.

bunni


LE DIAMANT ET LA GOUTTE DE ROSEE

Un beau diamant, qui avait autrefois brillé au doigt d'une princesse, gisait dans un pré, à côté de pissenlits et de pâquerettes. Juste au-dessus de lui, brillait une goutte de rosée qui s'accrochait timidement à un brin d'herbe.
Tout en haut, le brillant soleil du matin dardait ses rayons sur tous les deux, et les faisait étinceler.
La modeste goutte de rosée regardait le diamant, mais sans oser s'adresser à une personne d'aussi noble origine.
Un gros scarabée, en promenade à travers les champs aperçut le diamant et reconnut en lui quelque haut personnage.
- Seigneur, dit-il en faisant une grande révérence, permettez à votre humble serviteur de vous offrir ses hommages.
- Merci, répondit le diamant avec hauteur.
En relevant la tête, le scarabée aperçut la goutte de rosée.
- Une de vos parentes, je présume, monseigneur ? demanda-t-il avec affabilité en dirigeant une de ses antennes vers la goutte de rosée.
Le diamant partit d'un éclat de rire méprisant.
- Quelle absurdité! déclara-t-il. Mais qu'attendre d'un grossier scarabée ? Passez votre chemin, monsieur. Me mettre, moi, sur le même rang, dans la même famille qu'un être vulgaire, sans valeur et le diamant s'esclaffait.
- Mais, monseigneur, il me semblait... sa beauté n'est-elle pas égale à la vôtre ? balbutia timidement le scarabée déconfit.
- Beauté, vraiment ? Imitation, vous voulez dire. En vérité, l'imitation est la plus sincère des flatteries, il y a quelque satisfaction à se le rappeler. Mais cette beauté factice même est ridicule si elle n'est pas accompagnée de la durée. Bateau sans rames, voiture sans chevaux, puits sans eau, voilà ce que c'est que la beauté sans la fortune. Aucune valeur réelle là où il n'y a ni rang ni richesse. Combinez beauté, rang et richesse, et le monde sera à vos pieds. A présent, vous savez pourquoi on m'adore.
Et le diamant lança de tels feux que le scarabée dut en détourner les yeux, pendant que la pauvre goutte de rosée se sentait à peine la force de vivre, tant elle était humiliée.
Juste alors une alouette descendit comme une flèche, et vint donner du bec contre le diamant.
- Ah! fit-elle désappointée, ce que je prenais pour une goutte d'eau n'est qu'un misérable diamant. Mon gosier est desséché, je vais mourir de soif.
- En vérité! Le monde ne s'en consolera jamais, ricana le diamant.
Mais la goutte de rosée venait de prendre une soudaine et noble résolution.
- Puis-je vous être utile, moi ? demanda-t-elle.
L'alouette releva la tête.
- Oh! ma précieuse amie, vous me sauverez la vie.
- Venez, alors.
Et la goutte de rosée glissa du brin d'herbe dans le gosier altéré de l'alouette.
- Oh! oh! murmura le scarabée en reprenant sa promenade. Voilà une leçon que je n'oublierai pas. Le simple mérite vaut plus que le rang et la richesse sans modestie et sans dévouement; il ne peut y avoir aucune réelle beauté sans cela.

bunni


Légende des hyppotragues.

Il était une fois un royaume d'animaux où tout se passait bien.

Chaque espèce vivait dans son coin, mais en harmonie avec les autres. Style, on se dévorait , mais seulement si nécessaire, et respectueusement.
Le lion évidemment régnait en maître absolu sur ce petit monde.

Seulement, de plus en plus, les animaux commençaient à devenir super potes, et ça énervait le lion. La chaîne alimentaire en prenait un coup, et il se demandait ce que Darwin et ses amis allaient penser d'eux.
Par exemple : la hyène , au lieu de dévorer un animal en entier, afin de rassasier une famille hyène affamée, ne prélevait qu'une jambe à une antilope, histoire de ne pas lui faire de peine et de la laisser brouter afin qu'elle puisse continuer à s'occuper de sa famille elle aussi. Je vous entends dire: " Elle va mourir d'infection... c'est couru d'avance". Et bien non, les bactéries saprophytes ayant décidé d'être sympa elles aussi ne mangeaient qu'un tout petit peu d'antilope en se disant: "on se divisera moins, certes, mais on est si nombreuses...". Pareil, les vers, les mouches mangeaient moins, pondaient moins, ce qui évitait aux antilopes d'exploser sous la force de l'éclosion de leurs oeufs... Il était donc devenu courant de voir des herbivores à trois pattes.
Certains animaux s'invitaient même à manger les uns chez les autres.
Les buffles, invités par les chacals ou autres carnivores,  mangeaient de la viande pour ne pas les vexer, devenaient fous bien entendu, et contaminaient leurs prédateurs. Les buffles étaient tellement chagrinés par cette situation, qu'ils se traitaient aux antibiotiques en secret afin d'essayer de devenir mangeables.

Bref, tous les animaux rivalisaient de sympathie les uns avec les autres, et s'adonnaient à ces pratiques anti-écologiques.
Tout commençait à aller de travers...
Le lion se dit alors qu'il était temps de décréter quelques lois.
Loi n° 1: interdit de se parler entre espèces différentes.
Loi n° 2: interdit de changer de régime alimentaire.
Loi n° 3: interdit de gaspiller: quand on a faim, on tue un animal en entier , on ne prélève pas un steak gentiment, en douce: c'est vrai, quoi, gaspiller ça ne se fait pas, c'est sa mère qui lui avait dit.

Seulement voilà, avec tout ça, une antilope était tombée amoureuse d'un cheval.
Les parents, mis au courant, ont commencé à avoir des hics, style: "C'est une mésalliance ma fille, il ne sautera jamais assez haut pour toi, ce lourdaud ."
" Les antilopes sont toutes des femelles de mauvaise vie, mon fils. Avec elle, tu sera malheureux comme les pierres. Mieux vaudrait une bonne  jument bien solide que ce truc tout frêle qui bondit comme une écervelée "...
Mais finalement, après un repas en commun (c'était encore autorisé), les familles tombèrent sous le charme des conjoints de leurs rejetons respectifs, et donnèrent leur accord pour le Pacs (c'était encore autorisé aussi...).

Le lion eut vent de tout ça...Il rugit de rage, et opta pour une 4ème loi qui disait en gros ceci:
Loi n° 4 : interdit de se marier entre espèces différentes, non mais !

Evidemment, les deux quadrupèdes sous - nommés s'enfuirent, afin de vivre leur amour en grand secret, bien cachés...
Ils eurent des enfants, qui tenaient à la fois du papa et de la maman, comme tous les enfants du monde: les fameux hippotragues, ou antilope-cheval.

Le lion eut vent de tout ça...
Cette fois, il trouva qu'on se moquait un peu trop de lui et de ses royaux décrets, et opta pour l'intervention divine (1 seule intervention divine autorisée par vie, il faut bien choisir le moment): il autorisa la création de cette nouvelle espèce.
Mais, depuis, chaque espèce ne peut se reproduire qu'avec un individu de la même espèce.
Et les fraudeurs me dites-vous ? Et bien, dans ce cas, les enfants obtenus sont stériles... Demandez au cheval qui a voulu recommencer à faire son intéressant, mais avec une ânesse, et vous verrez !

bunni


Conte du Mézenc farceur et des nuages chatouilleux.


Monsieur Mézenc est un mont majestueux qui est né voici plusieurs millions d'années, alors que la terre était tout entière en ébullition.

Les montagnes sont comme tous les êtres vivants : elles naissent, elles grandissent ; elles ont une jeunesse... et elles vieillissent aussi.

Monsieur Mézenc donc était né, et il avait grandi : à vrai dire, il avait eu une adolescence un peu tumultueuse... Bouillonnante, pourrait-on dire!

N'avait-il pas en grandissant tout bouleversé autour de lui? Ne s'était-il pas comporté comme un chamboule-tout, ne laissant rien en paix dans son entourage?

N'avait-il pas lancé flammes et laves à des dizaines de kilomètres et entraîné ses petits voisins à faire de même?

Pourtant, sous ses dehors d'agitateur, Monsieur Mézenc était un mont d'une sensibilité exquise – car les montagnes ont une sensibilité!- et sous son apparente rudesse se cachait une âme tendrement espiègle!

Le saviez-vous? Auriez-vous pu l'imaginer? Depuis qu'il était tout petit, en regardant vers les cieux, il avait nourri le désir de... chatouiller les nuages!

Les années avaient passé.

Avec l'âge, Monsieur Mézenc avait pris des allures de montagne sage et bien rangée, avec l'apparence paisible d'une grande table de pierre...

Des millénaires étaient passés...

Monsieur Mézenc était devenu un grand seigneur, dominant de son impressionnante masse tout le cirque des Boutières, et attirant les regards depuis tous les sommets et toutes les crêtes à des kilomètres à la ronde.

Il forçait l'admiration et le respect par sa sereine et splendide majesté.

Sur ses pentes, les chevreuils, les renards, les sangliers, les marmottes – et même à certaines époques les ours et les loups – adoraient vivre et se promener...

Son sommet n'avait certes rien de ces pics bien aiguisés que l'on peut voir en d'autres massifs : toutefois il estimait qu'il avait une pointe suffisante pour, le moment venu, parvenir à chatouiller les volutes immaculées qu'il voyait se promener au dessus de lui.

En effet, malgré cette apparence si sage, Monseigneur le Mézenc gardait son rêve d'enfant turbulent. Quoique paraissant très calme, il avait toujours son regard levé vers le ciel... guettant les nuages.

Car, pour tout dire, il s'ennuyait un peu, et il souhaitait toujours leur faire sa petite blague.

Or un jour – un jour qui aurait pu être tout pareil aux autres jours – il entendit chanter dans le lointain : -« Hé ho, hé ho, nous sommes les nuages, hé ho hé ho hé ho hé ho... »

-« Oh oh! se dit Monsieur Mézenc, mais ne dirait-on pas qu'un groupe de nuages se dirige par ici? Ils sont bien dodus, bien rondouillards et bien cotonneux... Mon heure ne serai-elle pas venue? »

Sans se douter qu'il se faisait le complice de son innocente malice, le vent les amenait dans sa direction : génial ! Il les laissa approcher en faisant semblant de dormir. 

Un sourire coquin à l'intérieur de lui-même, Monseigneur le Mézenc attendit patiemment qu'ils arrivent juste au dessus de lui.

Encore quelques mètres... et voilà : il les avait juste à portée de sommet !

Alors, il se haussa sur la pointe des pieds et, imperceptiblement, il se mit à donner à son sommet de petits mouvements afin de gratter le dessous des nuages.

D'abord tout doucement... Puis, un peu plus fort !
Un premier nuage commença à se trémousser en se déformant quelque peu. Un deuxième se tortilla en faisant entendre de petits gloussements. Un troisième, qui avait été chatouillé avec plus d'audace, hoqueta de rire:

-« Hey! Mais que se passe-t-il ici? J'ai l'impression qu'on me gratouille là-dessous! »

Le nuage se contorsionna pour regarder son ventre, et voir qui pouvait l'avoir ainsi papouillé. Monsieur Mézenc, l'air de rien, ne bronchait pas.

A l'intérieur de lui-même cependant, son rire exultait : c'était vraiment trop drôle, ces nuages qui se tortillaient!

Il reprit son œuvre  et chatouilla le reste du groupe : les nuages s'étiraient puis se recroquevillaient en riant, car ils étaient tous très chatouilleux!

-« Oh oh oh, c'est trop rigolo! » s'écria l'un d'eux, dans un grand éclat de rire. -« Oui, ajouta un autre, et je crois bien que c'est cette montagne, avec son air de sainte nitouche qui nous joue des tours... » -« Tu as raison, renchérit un troisième : regarde son sommet ; c'est en fait une véritable brosse à gratter! »

En se faisant de grands clins d'œil , les nuages se rapprochèrent les uns des autres en chuchotant:
-« Hep, psst, psst... Si nous lui faisions, à notre tour, une bonne blague? » -« Oui, oui, oui! Faisons-lui nous aussi une blague! » -« Que diriez-vous de l'arroser? » suggéra le chef de groupe.

Aussitôt, les nuages s'amoncelèrent, puis ils se serrèrent et s'essorèrent tous en chœur  juste au-dessus de lui.

Quelle bonne douche se prit le mont : il était trempé!

Ah, ces nuages ne l'avaient pas raté. Il les vit rire de leur bonne farce.

Ils ne perdaient rien pour attendre. En moins de temps qu'il ne faut pour le dire, il leur mijota un bon coup à sa manière : ouvrant brusquement une de ses anciennes petites failles, il leur souffla un bon jet de vapeur.

Les nuages surpris se trouvèrent tout décoiffés : ils avaient tous la même coupe aérodynamique, en forme de crête de coq. -« Ha ha ha! exulta le Mézenc : je les ai bien eus ! »

Mais les nuages ne s'en tinrent pas là : ainsi donc, ce mont espiègle voulait jouer avec eux... et bien eux aussi allaient jouer avec lui!

Monsieur Mézenc méritait vraiment une réponse à ses petites blagues.

Les nuages se dispersèrent alors tout autour de lui et entreprirent de lui dessiner des moustaches de coton sur les flancs : bientôt, Monseigneur le Mézenc ressembla à une immense boutique de moustaches blanches.

Il y en avait pour tous les goûts : des fines et des épaisses, des raides ou des frisées, des recourbées en guidon de vélo et des toutes droites, des anglaises ou des rouflaquettes... Sans parler d'une espèce d'énorme perruque vaporeuse qui lui faisait une tignasse de zazou...

Monsieur Mézenc dut admettre que leur farce était plutôt réussie, il s'amusait beaucoup en se regardant dans le miroir du firmament et trouvait leur réponse vraiment désopilante :  » Quels joyeux lurons, ces nuages! » Alors ils se mirent tous à rire à gorge déployée : et leur rire en cascade dévalait et roulait dans les vallées alentour, et se trouvait amplifié par tous les échos des Boutières.

Rien de tel qu'une bonne partie de rigolade pour détendre l'atmosphère!

Et c'est pourquoi, depuis ce jour mémorable entre tous, quand les nuages, poussés par le vent, arrivent aux confins du Vivarais et du Velay, ils ont pris l'habitude – et ils sont tout heureux – de se rassembler au dessus de Monseigneur le Mézenc... qui en est tout heureux lui aussi.

Oui, désormais, c'est leur rituel commun, qui se perpétue depuis des centaines et des centaines d'années : les nuages viennent en groupes à portée de son sommet et le Mézenc farceur peut inlassablement renouveler son rêve d'enfant.

Les nuages lui laissent leur chatouiller le ventre, et ils recommencent à l'arroser puis à le décorer de moustaches fantaisistes et de perruques cotonneuses!

Si certains esprits chagrins vous disent que c'est du mauvais temps et du tonnerre, surtout ne les croyez pas : ce sont là des gens qui ne savent rien de ce qui se passe dans le cœur  des montagnes!

Ils ne peuvent pas comprendre quelle âme d'enfant cache en lui Monsieur Mézenc, et ils ne soupçonnent pas non plus que les nuages sont espiègles!

Et ils sont vraiment trop sérieux pour entendre, dans ce qu'ils croient être le bruit du tonnerre, le rire sonore des nuages chatouilleux et du Mézenc farceur...


bunni

#636

Conte : La naissance du Muguet

Il était une fois, il y a très, très longtemps, un géant qui vivait en Corée. Il habitait dans une grotte, dans la montagne, à l'abri d'une forêt obscure, où personne n'allait jamais par peur de se perdre. Il restait ainsi loin du village car il ne voulait pas se montrer et se cachait pour ne pas effrayer les villageois, surtout les enfants. Il aimait ces enfants, mais eux le détestaient parce qu'ils avaient peur de lui à cause de son apparence : des sourcils noirs et épais surmontaient ses deux gros yeux rouges et lorsqu'il ouvrait sa bouche aux lèvres énormes, rouges comme le sang, ses dents apparaissaient, longues et pointues comme celles d'un loup.

Or, un jour, arriva dans la région un dragon, énorme, aux écailles vertes et visqueuses qui crachait de longues flammes et dont les yeux lançaient des éclairs. Sa poitrine était couverte de petits boutons blancs. Il terrifiait les habitants de la région, dont il dévorait les troupeaux pour se nourrir. Personne n'osait l'affronter par peur d'être dévoré à son tour . Un jour, le géant qui, seul dans la montagne, ne savait rien de ce qui se passait au village, décida de se préparer un festin avec l'un des moutons de son troupeau. A l'aube, il se mit en route pour l'enclos où étaient enfermées ses bêtes, mais il eut la surprise de le trouver vide. Fou de rage, il se précipita vers le village pour trouver une explication. En chemin, il rencontra un vieillard du village qui lui raconta toute l'histoire. Le géant comprit alors qui avait volé ses moutons et, très énervé, malgré sa peur des dragons décida de se venger, d'attaquer le dragon et de le massacrer . Il chercha longtemps, mais finit par trouver le repaire du dragon qui dormait. Le dragon entendit du bruit, se releva brusquement et se jeta contre le géant qui menaça de le tuer . Le dragon lui répondit que c'était impossible, car sa mère lui avait autrefois donné une potion appelée Muguet qui lui avait fait pousser des boutons blancs sur la poitrine et cela le rendait invincible . Le géant se précipita sur le dragon avec son épée, le frappa dans le ventre mais le dragon sembla ne rien sentir et envoya une longue flamme sur le géant qui hurla de douleur, le bras presque paralysé par la brûlure. Malgré tout, il prit son arc et lança des flèches empoisonnées qui atteignirent le cœur du dragon et surtout les boutons blancs. Le dragon s'effondra et mourut. La potion de sa mère ne l'avait pas complètement protégé . Sorties des points blancs, des graines se répandirent sur le sol, la pluie commença à tomber, suivie du soleil. Aussitôt, à une vitesse vertigineuse, des fleurs, ressemblant à des grappes de petites clochettes se mirent à pousser . Pendant ce temps, le géant, gravement blessé par le dragon, était en train de mourir.

Mais, une petite fille du village qui s'était perdue dans la forêt avait vu le combat. Elle s'approcha, cueillit les fleurs et les posa sur les plaies du géant qui peu à peu se sentit mieux. Grâce à cette plante, il guérit. La petite fille raconta toute l'histoire à tout le monde et personne n'eut plus peur du géant qui put vivre heureux avec les villageois. C'était le Premier Mai et le muguet continua de pousser en Corée, puis dans le monde entier.

bunni


Le renard et l'ours... !!! – Conte Russe

Il était un renard qui avait pour voisin un ours. Un beau jour, il vint le trouver et lui dit :

-         Michka, écoute-moi, j'ai une idée.

-         Oh, je les connais, tes idées. Tu vas encore te moquer de moi.

-         Ce n'est pas bien de penser ainsi du mal du moi, Michka. Et puis, tu es tellement plus fort que moi que si jamais il me prenait l'envie de te faire du tort, tu n'aurais pas de mal à te venger. Alors, écoute-moi. Avec ta force et ma ruse, si nous nous unissons, nous pourrons facilement nous enrichir. Prenons un champ, labourons-le ensemble, ensemençons-le, puis nous nous partagerons la récolte et chacun de nous vendra sa part au marché.

-         Je sais que tu vas me rouler.

Le renard prit un air fâché.

-         Allons, Michka, ce n'est pas gentil ce que tu dis là. Nous sommes deux bons camarades et je ne te roulerai jamais. La preuve : nous partagerons la récolte en deux parts, et c'est toi qui choisiras celle que tu préfères. Je prendrai celle dont tu n'auras pas voulu. Qu'en penses-tu ?

-         Comme ça, je suis d'accord, dit l'ours.

Ils labourèrent le champ et y semèrent des pommes de terre. Enfin, « ils labourèrent », c'est une façon de parler. L'ours étant le plus costaud, c'est qui s'attela à la charrue, tandis que le renard trottinait à ses côtés et le houspillait.

-         Tu traînes ! Tu pourrais aller plus vite, quand même, gros flemmard ! Ah, quelle drôle d'idée j'ai eue de vouloir m'associer à cet ours ! Je n'ai pas fini de le regretter !

L'automne vint, le champ se remplit de jolies tiges souples aux fines feuilles d'un vert tendre, sous lesquelles avaient gonflé de gros tubercules d'un gris sale. Le renard proposa à l'ours :

-         Eh bien, Michka, à toi de choisir : les tiges ou les tubercules ? Le dessus ou le dessous ?

L'ours pensa à par lui : « Pas si bête ! Le renard voudrait peut-être que je me prenne ces grosses boules sales toutes cabossées. Personnes ne voudra me les acheter. » il se dépêcha de cueillir le dessus, ce qu'on appelle les fanes, tandis que le renard déterrait les tubercules. Puis ils partirent l'un et l'autre pour le marché. Le renard, évidemment, écoula vite ses pommes de terre, tandis que l'ours resta aves ses fanes sur les bras. Bien plus, l'ours devint la risée de tout le marché.

-         Alors, voisin, nous recommençons comme l'année dernière ? Nous cultivons le champ ensemble, et c'est moi qui choisirai ma part de la récolte.

Comme l'année précédente, c'est l'ours qui laboura, tirant la charrue aussi fort qu'il pouvait, tandis que le renard lui reprochait de ne pas en faire assez.

Ensuite, ils semèrent du blé. Une fois qu'il eût mûri, ils entreprirent de partager la récolte.

-         Alors, Michka, demanda le renard, à toi de choisir. Le dessus ou le dessous ?

-          Le dessous, bien sûr !

-         Tu ne pourras pas dire que je t'ai empêché de faire ce que tu voulais, remarqua innocemment le renard. Je me contente de ce que tu mes laisses.

Le renard faucha les tiges du blé et battit le grain, tandis que l'ours déterrait les racines. Inutile de vous raconter les éclats de rire qui accueillirent Michka quand il arriva au marché. Tous les acheteurs se montraient l'ours du doigt. L'ours était fou de rage.

-         Ah, c'est comme ça, dit-il au renard. Tu vas me le payer, et cher !

L'ours, confiant dans sa grosse voix, proposa au renard un concours de grognements. Celui qui grognerait le plus fort dévorerait l'autre.

L'ours gonfla sa poitrine, ouvrit si grand sa gueule qu'il en ferma les yeux, et lança un son tellement puissant qu'il s'assourdit lui-même. Le renard, se voyant sans surveillance en profita pour se sauver. Un ours sait crier fort, mais un renard sait courir vite. Le nôtre, personne ne l'a encore rattrapé.

bunni


Trois amis : le moineau, la souris et la crêpe au beurre

Dans une petite chaumière, au milieu des bois, vivaient trois amis :
un moineau, une souris et .. une crêpe au beurre !!
Ils vivaient tous les trois très heureux ensemble, ils s'entraidaient
de leur mieux :
le moineau allait chercher les provisions,
la souris coupait le bois et allumait le feu,
et la crêpe au beurre faisait cuire la soupe.

Mais quelle soupe !.. épaisse, beurrée, assaisonnée .. Un vrai régal !
Le moineau avait coutume de dire :
- Une soupe pareille, même le roi des rats n'en mange pas tous les
    dimanches. Et nous, c'est comme ça tous les soirs.
La crêpe au beurre ajoutait :
- C'est parce que, avant de servir, je plonge dans la marmite,
    je m'y tourne et retourne, je clapote et barbote,
    et voilà la soupe bien beurrée et assaisonnée.
La souris disait à son tour :
- Et moi, je ronge le bois fin, fin, fin, pour qu'il brûle bien, et
    j'attise le feu du bout de ma queue et la soupe cuit encore mieux !
Et le moineau reprenait :
- Il faut voir avec quoi elle est faite, cette soupe ! .. rien que des
    produits de premier choix. Un champignon par ci, une poignée
    d'orge par là, deux feuilles de chou, quatre pois-chiches,
    c'est ça qui fait la soupe riche !
Et tous les trois reprenaient en choeur :
- Une soupe pareille, il n'y a rien de meilleur !!

C'est donc ainsi qu'ils vivaient tous les trois, très heureux ensemble.
Mais un jour ... le renard, qui passe par là, voit par la fenêtre
la crêpe assise au coin du feu.
Hmmm ! Une belle crêpe au beurre, toute ronde, toute dorée,
croustilla-a-ante !.. Le renard aimerait bien la manger, mais la crêpe
ne sort jamais de la maison et la porte reste toujours fermée.

Alors le renard a une idée.
Il s'en va trouver le moineau dans la forêt et lui dit :
- Mon pauvre ami ! Mais tu te tues au travail ! Quand je pense que
    tes compagnons ne font rien de la journée, ça me fait vraiment de
    la peine.
Le moineau répond alors que ses compagnons travaillent aussi,
chacun à sa façon. Mais le renard secoue la tête avec pitié :
- Tu appelles ça travailler ?.. Un fagot de bois à couper, la soupe
    à mettre au feu, et puis c'est tout ! Tandis que toi, tu cours les
    bois toute la journée pour rapporter les provisions. Je voudrais
    bien voir la crêpe en faire autant ! Tiens ! Pas de danger qu'elle
    accepte, la grosse paresseuse !
Et sur ces bonnes paroles, le renard s'en va.
Le moineau reste là, à réfléchir. Il se dit : Mais il a raison, le renard !
C'est moi qui fait tout le travail. Ce n'est pas juste. On va y mettre
bon ordre, et pas plus tard que tout de suite !!

Le moineau rentre à la maison. Il se fâche, crie, tape du pied.
Comme quoi il en a assez de faire seul le plus gros du travail ..
Et que demain, c'est la crêpe qui ira chercher les provisions.
La souris fera la soupe, et pour ce qui est du bois, lui, moineau,
en fait son affaire.
Bon, bon, c'est d'accord !..

Et le lendemain matin, la crêpe, le panier au bras, s'en va faire
les provisions.
Elle roule à travers bois, ramasse des coquilles de noix.
Elle roule sur la mousse humide et ramasse une cosse de pois vide.
En passant sous le chêne vert, elle trouve un champignon mangé
aux vers et en traversant l'herbage, elle cueille un oignon sauvage,
un peu pourri, mais ça ne fait rien ..
Que voulez-vous, elle ne sait pas comment faire, la pauvre !
Elle n'a pas l'habitude.
Et juste comme elle se dit qu'il est temps de rentrer à la maison,
voilà le renard qui sort son museau pointu de dessous les branches.
Et il attrape la crêpe par son bord doré et croustillant.
Aïe ! Ouille ! La crêpe a crié .. Le renard a crié .. C'est qu'elle est
chaude la crêpe, brûlante comme au sortir du four. Le temps que
le renard lèche son museau échaudé, la crêpe est déjà loin.
Elle roule vers sa maison aussi vite qu'elle le peut.
Mais elle boite, la pauvre !.. Le coup de dents du renard lui a enlevé
un bon morceau .. alors, pour rouler, ce n'est pas très pratique !

Et à la maison, pendant ce temps, que se passe-t-il ?
Eh bien, les choses ne vont pas beaucoup mieux.

Le moineau a voulu couper le bois fin, fin, fin pour qu'il brûle bien,
et il a attaqué la bûche à grands coups de bec. Mais le bois, ce n'est
pas une cosse de petit pois, ça ne se fend pas facilement. Alors le
moineau s'est obstiné, la bûche n'a pas cédé, et c'est le bec du
moineau qui s'est tordu.

La souris de son côté a préparé la soupe. Elle a fait de son mieux,
puis elle s'est dit : Comment qu'elle fait déjà, la crêpe ?  "je plonge
dans la marmite, je clapote et barbote, et voilà la soupe prête !"  Bon,
je vais en faire autant  ..  Alors, la souris a plongé dans la marmite ..
Elle a été ébouillantée, elle a failli se noyer, et elle n'a jamais su
comment elle s'en est tirée ! Elle a couru dehors, s'est assise sur le
seuil de la porte et s'est mise à pleurer. Sa fourrure est ébouillantée
et elle a le bout de la queue qui tremble.

Là-dessus, la crêpe arrive, en se dépêchant, en boitant ..
Elle voit ses deux amis assis sur le seuil de la porte. Le moineau a
le bec tordu, la souris a sa fourrure mouillée et elle a le bout de la
queue qui tremble ..
Eh bien, nous voilà jolis, tous les trois !! Mais qu'est - ce qui nous a
pris de vouloir changer de métier ? Ce qu'on sait bien faire, on le
fait bien et tout le monde en profite. Mais ce qu'on ne sait pas faire,
on le fait mal et après il faut tout refaire.

Le moineau, de honte, s'est caché la tête sous l'aile.
Et c'est encore les deux autres qui ont dû le consoler.
Et après ? .. Et après, nos trois amis se sont remis à vivre comme
avant : le moineau a cherché les provisions, la souris a coupé le
bois et allumé le feu et la crêpe au beurre a cuit la soupe. Et tout
le monde en a été satisfait. Sauf le renard, bien sûr ! Mais à celui-là
on ne lui a pas demandé son avis.

Et voilà ! mon histoire est finie !

bunni


Le serpent et l'indien

Le soir, quand le soleil descend derrière les collines, la coutume veut que les
anciens racontent les légendes du peuple indien. Alors les guerriers, squaws
et papooses s'installent autour du conteur, et celui-ci raconte ..


En ces temps étranges, le soleil s'est arrêté au-dessus de la terre ..
il n'y a plus ni ombre, ni nuit ... Les bêtes et les hommes ont bien du
mal à dormir, dès qu'ils s'assoupissent un instant, la brûlure de la
lumière les réveille bien vite. Seuls les serpents s'en accommodent ..
car on ne sait par quel incroyable hasard, les serpents possèdent
également la nuit et les ténèbres. Ce qui est profondément injuste !

Un jour, le grand chef Indien s'enfonce au plus profond de la forêt,
là où vit le roi des serpents, pour le prier de partager les ténèbres
avec tout le monde.
Le roi des serpents dort dans son palais d'ombre fraîche quand le
grand chef Indien se présente devant lui.
Au bruit qu'il fait, le serpent se réveille en sursaut.
- Qui es-tu, toi qui oses interrompre mon repos ? siffle-t-il furieux.
Le grand chef Indien lève les bras en signe de paix et dépose au
pied du serpent un arc magnifique et des flèches à la pointe d'or :
- Je ne suis qu'un pauvre homme, ô serpent, qui vient te demander
   un peu de nuit et de ténèbres. En échange, voici le plus beau
   présent que je puisse t'offrir.
Le serpent le fixe de son oeil immobile :
- Que puis-je faire d'un arc, ô homme, moi qui n'ai pas de mains ?
Le grand chef Indien songe qu'il a raison !

Il retourne chez les siens, convoque le conseil des Anciens qui,
après délibération, décide d'offrir au serpent une crécelle.
Sage idée, pense le grand chef. Elle lui sera utile pour accompagner
les danses de son peuple.
Et il s'aventure à nouveau au coeur de la forêt.
Le roi des serpents l'attend. Il considère la crécelle d'un air songeur :
- Que puis-je faire d'une crécelle, ô homme, moi qui n'ai pas de
   mains ?
Mais cette fois, le grand chef Indien a une réponse :
- Je vais l'attacher au bout de ta queue, ô serpent, cela t'amusera.
Ce qu'il fait. Et quand le roi des serpents remue la queue, la crécelle
tinte. Il trouve cela assez drôle, en effet. Alors il donne au grand chef
Indien un peu de nuit et de ténèbres, qu'il emprisonne dans un sac
en cuir. Le grand chef soupèse le sac, c'est bien léger !..
- Dis-moi, ô roi des serpents, que veux-tu en échange de la nuit
   toute entière et de ses ténèbres ?
Le serpent réfléchit, l'oeil mi-clos.
- Ce que tu demandes là est considérable ! Cent crécelles ne suffiront
   point. Apporte-moi plutôt une grosse cruche de ce terrible poison
   dont vous enduisez la pointe de vos flèches !

Sur ce, le grand chef Indien s'en retourne au village. Les siens le
reçoivent triomphalement et lorsque l'on ouvre le petit sac en cuir,
la nuit et ses ténèbres recouvrent la terre.
Les Indiens peuvent alors se reposer. Mais le sac est minuscule et la
nuit de courte durée. A peine le sommeil s'est installé sous les
paupières que la lumière l'en chasse bien vite.
Les Indiens ne s'accommodent point de ce jour si long et de cette
nuit si brève. On convoque à nouveau le conseil des Anciens qui
autorise alors le grand chef à porter au roi des serpents une cruche
pleine de poison.
C'est un long, très long travail que de recueillir goutte à goutte toute
cette quantité de poison, mais ils y parviennent, tant est grand leur
désir de ténèbres.
Et pour la troisième fois, le grand chef Indien s'enfonce dans la forêt.
Le roi des serpents a fait préparer dans un grand sac une longue
nuit pleine de ténèbres et il l'offre au grand chef en échange de la
grosse cruche de poison.
- Je te remercie au noms des miens, ô roi, dit le chef Indien. Mais,
   dis-moi, une chose m'intrigue : que vas-tu donc faire de ce terrible
   poison ?
Le serpent soupire :
- Vois comment nous sommes : petits, faibles pour la plupart,
   inoffensifs et désarmés. Trop de gens nous font des misères.
   Ce poison servira à nous défendre à l'occasion.
Le grand chef hoche la tête :
- Il est juste que tous puissent se protéger !
   Il met le grand sac sur son épaule. Mais le serpent ajoute :
- Surtout, n'ouvre pas ce sac avant d'arriver chez toi. Les ténèbres
   envahiraient la terre avant que je n'ai eu le temps de distribuer
   le poison à tous les miens.
Le grand chef promet et s'en retourne vers son peuple.

Mais sur le chemin, il rencontre un perroquet.
- Qu'as-tu sur tes épaules, ô grand chef Indien ?
A peine a-t-il répondu, que l'indiscret oiseau s'envole en criant à
tue-tête : L'homme porte dans son sac une longue nuit pleine de
ténèbres ! Venez tous !
Et tous les animaux s'attroupent autour du grand chef. Et ils
supplient : Montre-nous, montre-nous, ..
Le grand chef refuse, rappelant la promesse qu'il a faite au serpent,
mais les animaux ne veulent rien entendre, ils lui arrachent le sac
des mains et l'ouvrent en poussant des cris de joie.
Tout aussitôt, les ténèbres plongent la terre dans une nuit épaisse.
Ainsi qu'il l'a dit, le roi des serpents est en train de répartir le poison
entre les siens, mais la grande nuit noire l'empêche de poursuivre
sa tâche. Et pire, les serpents, affolés, se bousculent pour avoir leur
part et renversent alors la cruche de poison ..
Les uns ont réussi à emporter une grande quantité de poison,
d'autres un peu, et certains pas du tout.

Voilà pourquoi, aujourd'hui, il y a des serpents venimeux, dont la
morsure est parfois mortelle, et des serpents qui ne le sont pas.
Ce n'est pas toujours facile à deviner.
Sauf pour la famille du roi : ceux qui en font partie portent tous une
crécelle au bout de la queue, .. vous savez, ce petit cadeau amusant
du grand chef Indien !

                 
                                       "Légende des Indiens d'Amérique"

bunni


Léon, le rat de bibliothèque

La famille s'était installée dans le bâtiment, il y a bien longtemps.

Léon se souvient de ses jeunes années, quand lui et ses frères couraient dans les rayonnages, et après avoir effrayé quelques visiteurs, se réfugiaient dans les coins les plus reculés, où la lumière avait du mal à passer.

Il aimait grimper sur les étagères les plus hautes.

Elles étaient très poussiéreuses, mais il pouvait avoir une vue d'ensemble des tables, qui à une époque étaient couvertes de livres et encyclopédies consultés par une jeunesse avide de connaissances.

A la mort de ses parents, pris au piège dans les caves, le reste de sa famille avait déménagé. Ses sœurs étaient parties pour l'opéra, ses frères vers les égouts de la ville, et ses cousins et cousines à la campagne.

Léon se plaisait dans cette bibliothèque et puis, il n'y était pas seul, il avait une amie, Mademoiselle Angèle !

Il se souvenait d'elle, alors qu'elle était une toute jeune fille.

Elle portait des lunettes avec des verres grossissants, et une fin d'après-midi, alors qu'elle remontait des livres de poésie du dix-neuvième siècle sur la plus haute des étagères,  leur regard s'était croisé.

On ignore lequel des deux fut le plus apeuré.

Elle avait failli glisser de l'échelle bancale, et lui, il s'était coincé la queue entre « Les chants de Maldoror » et « L'après-midi d'un faune ». Lautréamont et Mallarmé n'étaient pas parmi ses auteurs favoris, il avait eu beaucoup de mal à les digérer.

Léon adorait les livres, surtout ceux avec des couvertures en cuir et fines dorures.

Angèle avait bien essayé de le faire fuir, en le poursuivant avec du Maupassant et du Flaubert. Elle avait même presque réussi à l'assommer avec un roman plus volumineux de Victor Hugo.

L'agilité de Léon avait eu raison des ressources littéraires d'Angèle.

Un soir, alors qu'elle rangeait les derniers livres qui trainaient sur une table, et tout en faisant de la place dans une rangée, elle toucha une matière aussi douce que du velours.

L'étagère n'étant pas bien haute, elle monta sur un tabouret et aperçut une masse informe, inerte, toute recroquevillée.

Elle hésita à la déplacer, puis reconnut le rat qui la narguait depuis plusieurs mois.

La créature semblait en piteux état. Elle avait les yeux mi-clos et le ventre ballonné.

Angèle aperçut un Walter Scott, « Le lai du dernier ménestrel » dont le cœur avait été déchiqueté.

La bibliothécaire prit le coupable entre deux livres et le plaça sur une table de lecture.

Elle se rendit ensuite dans le rayonnage contenant les encyclopédies et traités de médecine.

Elle parcourut rapidement les quelques pages traitant de l'indigestion.

Souffrant elle-même de l'estomac, elle avait dans son sac un flacon de bicarbonate de sodium.

Léon gémissait sur la table, il se tordait de douleur.

Angèle dilua la poudre dans l'eau, prit son mouchoir, le trempa dans le verre et fit couler goutte à goutte le liquide dans la bouche du petit animal.

Leur regard se croisa à nouveau, mais il n'y avait plus de peur, juste un peu d'inquiétude dans celui d'Angèle, et de la gratitude dans celui de Léon.

Elle aménagea dans le tiroir de son bureau, un petit espace et l'y installa.

Le lendemain matin, Léon avait quitté sa couche de fortune.

En fin de journée, Angèle l'entendit chicoter. Elle avait gardé les restes de son repas de midi, et les déposa sur la plus haute des étagères, où elle savait qu'il résidait.

Léon se régala de pain de mie et de fromage.

Jour après jour, Angèle lui installait un petit plateau, contenant ce mets qu'il s'était mis à apprécier, tant et si bien qu'il s'était désintéressé des livres.

Il ne les rongeait plus. Il attendait que son amie ferme la grande porte et l'éclairage des lampes des tables, pour la rejoindre sur son bureau.

Pendant qu'elle lui faisait la lecture, Léon s'empiffrait de nourriture plus terrestre.

Pour se rapprocher d'elle, il s'installa sur les étagères des livres pour enfants. Il avait une préférence pour les contes des frères Grimm, même si le « Joueur de Flûte de Hamelin », lui avait donné des cauchemars.

A présent la bibliothèque est fermée, mais dans un petit appartement du centre-ville, un vieux rat fait la lecture à une dame âgée, dont les verres de lunettes grossissants ne sont  plus d'aucune utilité.

M.H.

bunni


Vivance


Dis Belle Maman, raconte moi une histoire ...


" Le conte de la grand-mère qui inventa un mot nouveau et rare"

Grand-mère ! dit le petit garçon, apprends-moi des mots neufs. Des mots encore plus beaux que ceux d'hier, plus beaux que ka-léi-dos-co-pe, plus rigolos que ceux qui font des bruits comme cla-po-tis, chu-cho-te-ments... Encore, grand-mère, encore ! La vieille femme sourit. Le temps est venu, se dit-elle. Il est prêt !

Oui, j'ai un beau mot pour toi. Je vais t'aider à le trouver...

Oh ! oui, j'adore les devinettes, dit l'enfant en sautillant.

Voilà. C'est un mot qui contient les plus belles valeurs du monde...Un mot qui est présent en toi et tout autour de toi si tu sais le ressentir.

C'est facile ! c'est...la Vie ! Ce qui est présent en moi et tout autour de moi, c'est la Vie !

Oui bien sûr, il y a de la vie dans ce mot, d'abord de la vie. De la vie vivante, toute joyeuse. De celle qui chante dans tes oreilles chaque matin, avant même que tu ouvres les yeux. Un élan de vie qui te fait dire en regardant le ciel chaque jour : Merci pour ce bleu. Tant mieux pour cette pluie, la terre a soif. Quel vent ce matin ! ça nettoie tout le ciel, mais fermez un peu les portes en haut, ça fait courant d'air ! Un mot qui peut dire l'élan, la fougue, l'enthousiasme. Imagine-toi grimpant vers le haut d'une colline. Tu es presque au sommet, c'est tout clair, c'est tout rond d'herbe verte. Tu marches, il y a l'air vif qui souffle à tes oreilles, tout autour s'étend à perte de vue l'immensité du paysage. C'est tellement beau que tu en as le souffle coupé. Ton cœur déborde presque. Tu te sens fort, grand et petit en même temps, léger comme un oiseau, tu te sens aussi libre que le vent. Tiens, tu pourrais t'envoler, être le vent toi-même...

C'est le bonheur, grand-mère ?

Il y a du bonheur dans le mot, oui, mais cherche encore... Quand tu mets du bon dans tout ce que tu fais, quand tu sais ouvrir tes yeux pas seulement pour voir, mais pour regarder, alors tu peux t'émerveiller de tout et d'un rien, du gazouillis d'une mésange, d'un sourire reçu, de la force du brin d'herbe qui pousse dru dans le bitume du trottoir, de la lumière d'or des étoiles. Quand une fleur devient le plus beau des bouquets du monde, que ton regard se fait caresse pour dire en silence toute ton émotion, quand tu accueilles les bras qui t'aiment et que tu est si plein de désir et d'amour que tu rayonnes comme un soleil...


J'ai trouvé, j'ai trouvé, c'est Soleil d'Amour ! C'est un petit nom que tu me donnais, grand-mère, quand j'étais petit !

Oui, tu es ce soleil-là et il y a de l'amour dans ce mot, mais cherche encore, cherche... C'est un mot qui te dit aussi d'avoir du courage, même quand il y a du gris dans ta vie. Un mot lucide qui n'exclut pas les peines et les difficultés. Un de ceux qui te permettra aussi de trouver toi-même dans chaque évènement difficile, le petit bout de ciel bleu, l'infime lumière qui te redonnera confiance en toi, et surtout en la vie qui est en toi.

C'est l'espérance !

Tu y es presque, continue, continue... Un mot qui contient la Vie, la Joie, l'Enthousiasme, la Tendresse des petits bonheurs, le Courage, le Désir, l'Amour, la Confiance, l'Espérance !

Il existe, grand-mère, ce mot qui dit tout ça à lui tout seul ?

Oui, mon petit... C'est le mot Vivance. C'est la Vivance dans la vie !

C'est un joli mot Vivance, grand-mère !

Murmure-le, écoute-le... Tu l'entends rire dès que tu le prononces...

Vivance !

C'est un mot précieux, tu sais...

Un mot près-des-cieux ?

Oui, dit-elle en souriant. Il vient certainement du ciel, peut-être même du pré-des-cieux... C'est un mot si précieux qu'il est mon héritage pour toi ! C'est qu'il me vient de loin, tu sais, de mon enfance, de ma maman à moi, de mon histoire... Il vient de toute ma lignée et je te l'offre aujourd'hui car le temps est venu... Cette Vivance, elle est la force vive qui donnera plus de vie à ta vie. Je la dépose en toi comme une graine pour qu'elle germe, qu'elle éclose, qu'elle resplendisse, qu'elle fructifie, afin qu'un jour toi aussi tu puisses à ton tour la transmettre à d'autres, à ceux que tu aimeras, que tu aideras, que tu accompagneras... Ouvre la bouche, tire la langue, ferme les yeux, mon petit Soleil d'Amour...Et...hop ! dit la grand-mère, en riant, la graine de Vivance est en toi ! N'oublie pas, c'est pour toute ta vie. La Vivance de la vie, c'est le plus beau cadeau que tu puisses faire à ta propre vie.

J.S.


bunni


L'arbre qui n'avait pas d'amis

Le bouleau gris est triste. Seul, au milieu du pré vert, l'arbre a des idées noires. Il gémit : « Je suis toujours tout seul dans ce champ. Parfois le vent vient jouer dans mes feuilles, mais il ne reste pas bien longtemps. »

Le bouleau pousse un petit soupir et ses branches frémissent. « Si j'avais des jambes pour marcher, j'irais dans la forêt, mais je n'ai que des racines. On ne marche pas avec des racines. Alors je reste ici et je m'ennuie toute la journée. » Il pousse un très gros soupir et toutes ses feuilles tremblent très fort. Une chenille rousse qui grignotait au bout d'une branche lui crie de toutes ses forces :

- Un peu de calme! Je mange!

- Qui a parlé? Demande le bouleau.

La chenille s'agite sur sa feuille.

- C'est moi. je viens ici tous les jours. Je mange un peu de tes feuilles.

- Je ne t'ai jamais remarquée, s'étonne le bouleau.

- Je ne te parle pas. Tu as toujours l'air si sérieux, dit la chenille.

Le bouleau est très surpris. Il a une locataire et il ne le savait même pas.

- L'araignée pense comme moi, ajoute la chenille.

- Quelle araignée? Demande le bouleau.

- Tu ne la connais pas? Dit la chenille. Elle tisse des toiles dans tes branches pour faire la chasse aux fourmis? Elle vient tous les matins, juste après les écureuils?

- Les écureuils!

Le bouleau est de plus en plus surpris.

- Eh oui! Dit la chenille. Il y a tout un monde qui grouille autour de toi : des insectes, des oiseaux, des rongeurs.

Le bouleau est tout excité par cette nouvelle. Il n'est plus triste. Il redresse ses branches et son tronc. Il se tient droit. Il est tout beau. De loin, on le voit bien. Un chardonneret jaune qui passait par là voit ce bouleau tout fier. Il s'approche et lui demande :

- Pardon, aimez-vous les oisillons? Je cherche un arbre solide et gentil pour construire un nid pour ma famille.

Le bouleau est ravi. Il s'écrie :

- Moi qui me pensais seul dans ce champ. Quelle erreur!

C'est comme ça qu'un grand bouleau gris, au beau milieu d'un pré vert, est devenu la maison des chardonnerets jaunes.



bunni

#643

La petite souris et le Grand Lama ( conte tibétain )

Au sommet du monde, dans les montagnes de l'Himalaya, vivait un sage. Un grand Lama, comme on dit là-bas. Cet homme était connu dans toute l'immensité du Tibet pour son intelligence et sa bonté. Un matin, en sortant de chez lui, voici ce qui lui arriva.

Le Grand Lama pousse la porte de sa maison, passe un pied puis l'autre et « coui », un petit cri retentit près de lui. Un cri franchement petit. Le Grand Lama se baisse, tend l'oreille, cherche sous la pierre et que voit-il ?

Une petite souris blottie, toute transie par le froid de la nuit. Bientôt la petite souris a si chaud qu'elle revient à la vie.

Le Grand Lama lui offre un peu de lait tiède de yak et la petite souris, ragaillardie, se met à couiner poliment :

- Rimpoché (un nom qui veut dire le « haut précieux » et qui est signe de grand respect), je n'oublierai jamais que tu m'as sauvé la vie. Mais je serai toujours trop petite pour te remercier à bon prix !

- Détrompe-toi, répond le Grand Lama. Il suffit que tu restes ici, à me tenir compagnie. Dans ma chambre souvent je m'ennuie. Et puis, chez moi, tu n'auras jamais froid.

Et c'est ainsi que la petite souris commença une nouvelle vie, dans la chambre du Grand Lama. Elle était choyée comme une princesse. Ses jours s'écoulaient tranquillement à jouer sur le grand tapis de soie, celui aux mille voyages. Et, à chacun de ses couchers, le Grand Lama la berçait de ses histoires préférées.

Pourtant, dans le gris de ses yeux, quelque chose n'allait pas. Un soir, le Grand Lama s'en inquiéta :

- Qu'as-tu Petite Souris ? Regrettes-tu la montagne et le froid ?

Dès le printemps, si tu veux, tu y retourneras.

- Oh, non, non, Rimpoché, répond la petite souris, je ne regrette rien, ni la montagne, ni le froid, mais...- Mais quoi, Petite Souris ?

- Rimpoché, c'est que... ma vie est douce près de toi et les gens de ta maison sont tous bons pour moi, mais il y a le chat !

A ces mots le Grand Lama pouffe de rire .

Il n'avait pas pensé au chat.

Un animal trop bien nourri pour s'occuper d'une souris !

- Tu n'as rien à craindre, je t'assure, mon chat ne ferait pas de mal à une souris !

- Je te crois, couine timidement la souris, mais c'est plus fort que moi. Voilà, j'ai peur du chat!

Le Grand Lama s'assied et il se met à réfléchir tandis que la petite souris trépigne.

- Rimpoché, chuchote-t-elle un peu gênée, je crois que j'ai une idée : transforme-moi en chat et je serai heureuse près de toi !

Le Grand Lama hésite, hoche la tête, mais devant la petite souris suppliante, il finit par
décider :

- Puisque c'est ainsi, Petite Souris, que ton désir se réalise ! Aussitôt dit, la petite souris devient un beau chat gris.

Au petit matin, le beau chat gris sort tête haute de la chambre du Grand Lama. Mais juste après la porte, il rencontre le chat de la maison qui revient de la cuisine.

Le beau chat gris prend peur, il fait le gros dos, il crache, il miaule, il souffle devant l'autre chat, ahuri. Et, pour finir, il se précipite, les poils tout hérissés, dans la chambre du Grand Lama.

En le voyant dans cet état, le Grand Lama, se désole :

- Qu'as-tu à présent ? Tu n'as tout même pas eu peur de mon chat si gentil ?

La petite souris-chat a tellement honte qu'elle répond :

- Oh, non, non, Rimpoché, ce n'est pas ton chat qui m'a fait peur, c'est un chien. Un chien géant, qui m'a montré ses dents !

Le Grand Lama se met à réfléchir, il hésite, il hoche la tête puis il finit par demander :

- Voudrais-tu devenir chien, par hasard ?

- Oh Rimpoché, ta bonté n'a pas de limite !

- Puisque c'est ainsi, répond le Lama, que ton désir se réalise !

Aussitôt dit, le beau chat gris devient un superbe chien gris.

Vers l'heure de midi, le superbe chien gris sort triomphant de la chambre du Grand Lama. Mais, dans la cour, il croise à nouveau le chat de la maison qui se lèche les babines.

Le chat, épouvanté par cet énorme chien, s'enfuit en miaulant affreusement.

Quant au chien, encore plus terrifié, il bondit en aboyant comme un fou avant de se réfugier dans la chambre du Grand Lama.

Cette fois, le Grand Lama sursaute et s'inquiète :

- Qui t'as fait peur ainsi ? Un autre chien, plus fort que toi ?

La petite souris-chien, la tête sous le tapis, répond morte de honte :

- Oh, non, non, Rimpoché, figure-toi que dans la cour, je viens de rencontrer un tigre. Un tigre géant qui m'a sorti ses griffes !

Le Grand Lama se met à réfléchir, il hésite, il hoche la tête, puis, il finit par dire :

- Je comprends ton malheur et ta peur.

Veux-tu alors que je te transforme en tigre ?

- Oh, Rimpoché, répond la petite souris-chien en sortant sa tête de dessous le tapis, ce serait sûrement la fin de tous mes soucis !

A la tombée du jour, un puissant tigre au pelage d'or quitte la chambre du Grand Lama. Il se promène fièrement dans la maison, faisant fuir tous ses habitants. Soudain, dans la pénombre, il rencontre le chat de la maison qui s'en retourne vers la cuisine.

A la vue du tigre, le chat, se croyant déjà mort, s'élance en haut du toit. Mais à la vue du chat, le tigre, encore plus fou de peur, s'enfuit hors d'haleine dans la chambre du Grand Lama et se cache sous le matelas.

Le Grand Lama n'en croit pas ses yeux :

- Pauvre tigre, quelle horrible bête a osé te menacer ?

- Oh, la plus monstrueuse qui soit, Rimpoché.

Une bête comme tu n'imagines pas !

- Mais il n'y a pas d'animal plus effrayant que le tigre dans toute l'Asie ! s'étonne le sage.

- Oh si, il y en a un, je t'assure...

- Mais qui est-il ?

Réponds-moi ! insiste le Lama.

- C'est... c'est... je veux dire que c'est... C'est le chat ! bafouille le tigre encore tout essoufflé.

Alors le Grand Lama éclate de rire et dit :

- Tu vois, Petite Souris, ce qui compte c'est ton cœur de souris. L'apparence ne change rien.

Tu auras beau être transformée en chat, en chien, en tigre, tu auras toujours peur du chat parce que tu es, toi,  une souris. Voilà !

Et c'est ainsi que la petite souris-chat-chien-tigre redevint petite souris pour la vie.



FIN


bunni


Le grand voyage du petit mouton-nuage

Il était une fois un petit mouton très mignon qui était si petit que le moindre coup de vent l'emportait comme une plume. Ce n'était pas seulement parce qu'il était petit qu'il pouvait voler ainsi. C'était aussi à cause de sa toison* très particulière. Au lieu de porter un lourd manteau de laine bouclée et rêche* comme les autres moutons, ses poils étaient si doux et si légers qu'on avait l'impression qu'il était entouré de mousse, comme celle d'un bain. On aurait dit un petit nuage sur pattes. Pour éviter qu'il ne s'envole, le berger était obligé de l'attacher à un autre mouton ou à un arbre. Quand le vent soufflait sur la prairie, on voyait donc le petit mouton flotter, tel un joli ballon blanc, au-dessus du troupeau.

Mais, par un jour d'automne où l'orage menaçait, le berger se hâta de rassembler ses animaux et rentra à la bergerie en oubliant le petit mouton, attaché à son arbre. Le pauvre animal bêlait* à l'aide pour que quelqu'un vienne le chercher, mais personne ne l'entendait... Enfin, pas tout à fait. Ses plaintes attirèrent l'attention des nuages qui passaient par là. Un gros nuage se pencha et s'écria : « Oh, regardez là-bas, ce bébé nuage qui pleure. Le pauvre, il a dû s'accrocher aux branches de cet arbre. Allons tout de suite le libérer. » C'est ainsi que le petit mouton partit avec les nuages.

Il resta longtemps tout là-haut, dans le ciel. Si longtemps qu'il eut le temps de faire plusieurs fois le tour de la planète. Il survola les mers et les continents et put admirer d'en haut ce que la Terre avait de plus beau. Et, pendant tout ce temps, le petit mouton grandissait et ses poils poussaient. Tant et si bien qu'il finit par devenir aussi gros que ses amis nuages et, malheureusement, bien plus lourd qu'eux...

Alors, tout doucement, il descendit et finit par se poser sur une île perdue au milieu de l'océan. L'île fut immédiatement noyée dans un brouillard à couper au couteau. C'était comme de la toile d'araignée qui s'accrochait partout. Personne n'avait jamais vu un brouillard pareil. Et pour cause... Les premiers jours, les habitants de l'île trouvèrent ça plutôt amusant, surtout les enfants, qui avaient l'impression de bouger dans une espèce de barbe à papa géante. Puis, les jours passant, cela devint beaucoup moins amusant, car on ne pouvait plus rien faire et personne ne savait comment se débarrasser de cette étrange couverture tombée du ciel.

Jusqu'au jour où une petite fille qui s'appelait Lena et qui en avait assez de rester enfermée chez elle, ouvrit sa fenêtre et attrapa un morceau de brouillard. Le morceau de brouillard s'étira et se transforma en un long fil. Lena tira dessus de plus en plus vite. C'était rigolo et ça venait tout seul, si bien qu'elle se retrouva en quelques minutes avec, à ses pieds, un gros tas de fil. Alors, elle en fit une pelote*. Puis une autre, et encore une autre, et ainsi de suite. Ne sachant que faire avec toutes ses pelotes, elle les apporta à sa grand-mère. « Quelle magnifique laine ! » s'exclama la grand-mère. Elle prit deux grandes aiguilles et se mit à tricoter des pulls, des chaussettes et plein d'autres vêtements. Quelques jours plus tard, à force d'être filé* et tricoté, le brouillard bizarre s'effilochait* de plus en plus. Bientôt, il n'en resta qu'un petit nuage à quatre pattes posé au milieu du jardin de la maison de Lena. La petite fille s'en approcha et le caressa. Le nuage frémit et fit « Bêêêê ! » puis s'envola.

Quand Lena et sa grand-mère expliquèrent aux habitants de l'île que le brouillard était en fait la laine d'un mouton tombé du ciel, personne ne les crut, bien sûr. En revanche, tout le monde voulut avoir un de leurs merveilleux tricots, si doux et si légers que lorsqu'on les enfilait, on avait l'impression de flotter comme un nuage.